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Bail commercial assorti d'une clause d'échelle mobile : des précisions quant aux modalités de révision du loyer

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Par deux décisions rendues le 15 décembre 2016 (Cass. 3° civ. n°15-23.069, Cass. 3° civ. n°15-27.148), la Cour de Cassation est venue apporter des précisions en matière de révision du loyer d’un bail commercial assorti d’une clause d’échelle mobile.

Pour rappel, une clause d’échelle mobile ou clause d’indexation est un mécanisme conventionnel consistant en pratique à réviser annuellement le loyer sur la base, selon le cas, de l’indice « ILC » ou « ILAT » (respectivement indice des loyers commerciaux et indice des loyers des activités tertiaires .

Il n’existe à notre connaissance aucune définition légale de la clause d’échelle mobile, mais ses conditions de validité et d’application sont notamment rappelées au sein des Codes monétaire et financier (articles L.112-1 et suivants) et de commerce (articles L.145-39 et R.145-22).

Si un bail commercial est assorti d’une clause d’échelle mobile, la révision du loyer du bail peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve « augmenté ou diminué de plus d’un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire » (article L. 145-39 du Code de commerce).

Les deux arrêts rendus le même jour par la Cour suprême sont venus préciser la notion de « prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire » en considérant d’une part, que le loyer à prendre en considération est le loyer du bail en cours à la date de la demande en révision (arrêt n°15-23.069), et d’autre part, que pour apprécier la variation, il faut tenir compte du loyer résultant du jeu de la clause d’indexation et non du loyer effectivement payé par le locataire (arrêt n°15-27.148).

Dans la première espèce (n°15-23.069), un preneur sollicitait, après avoir formulé une demande de renouvellement du bail restée sans réponse du bailleur, la révision du loyer sur le fondement de l’article L.145-39 du Code de commerce.

Sa demande ayant été déclarée irrecevable par la Cour d’appel, le preneur forme un pourvoi en cassation. La Cour de cassation suit la Cour d’appel et rejette le pourvoi en considérant que : « le loyer à prendre en considération pour apprécier la variation d’un quart permettant d’exercer l’action en révision de l’article L. 145-39 du code de commerce était le loyer initial du bail en cours à la date de la demande de révision ».

En effet selon la Cour, la demande de renouvellement avait mis fin au bail initial d’octobre 1999 et un nouveau bail avait pris effet le 1er janvier 2010, de sorte qu’à défaut de variation d’un quart du loyer (même s’il était identique à celui alors en cours au titre du bail initial) entre la date du renouvellement (janvier 2010) et la date de la demande de révision (juillet 2010), cette dernière était irrecevable. Le loyer à prendre en considération pour l’action en révision de l’article L.145-39 du Code de commerce, était en l’espèce le loyer initial … du bail renouvelé (valant nouveau bail).

La seconde espèce (n°15-27.148) portait sur une demande de révision de loyer concernant un bail assorti d’une clause d’échelle mobile dont la surface avait été modifiée en cours de bail et formalisée par la conclusion d’un avenant.

Le preneur se prévalait d’une augmentation de loyer de plus du quart et demandait sa révision. Sa demande ayant été écartée par la Cour d’appel, le preneur forme également un pourvoi en cassation.

La Cour de cassation rejette le pourvoir et énonce notamment que : « pour vérifier les conditions d’application de l’article L. 145-39 du code de commerce, [la Cour d’Appel] devait comparer au prix précédemment fixé par l’accord des parties, hors indexation, (…), le loyer obtenu par le jeu de la clause d’indexation ».

La Haute juridiction a ainsi rappelé que la comparaison devait être effectuée par rapport au loyer obtenu par le jeu de la clause d’échelle mobile et non par rapport au loyer effectivement payé par le locataire.

En outre, la Cour a relevé qu’au résultat de l’indexation du loyer, ce dernier avait varié de moins de 25%.

Ainsi, les conditions n’étaient pas réunies en l’espèce pour prévoir une révision du loyer.

Les avenants aux baux portant sur des variations de surfaces ont différentes incidences (notamment modification de la consistance des lieux loués à envisager dans le cadre du renouvellement du bail) mais pour le sujet plus spécifiquement abordé ici, ces avenants doivent faire l’objet d’une rédaction attentive afin de traiter correctement les variations sur le loyer, les incidences en matière d’indexation ainsi que celles touchant le dépôt de garantie.

Pour le preneur, il conviendra donc d’être très attentif …

Chronique co-rédigée avec Franck-Olivier Klein, Avocat, Eversheds Sutherland (France) LLP

Christophe Sciot-Siegrist