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Avis d Experts

Bailleurs, soyez diligents !

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L’engagement de caution ou acte de cautionnement constitue un acte unilatéral qui a priori n’engage que celui qui le souscrit.

Toutefois, le législateur comme les tribunaux se sont toujours méfiés des dangers qu’un engagement unilatéral présentait pour celui qui le souscrit.

Ainsi, afin de s’assurer que l’engagement unilatéral se fait de manière réfléchie, le législateur le soumet à des règles de forme plus ou moins lourdes. C’est notamment le cas en matière de baux d’habitation où l’article 22 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 impose un lourd formalisme à peine de nullité du cautionnement.

Mais cette méfiance vise également à limiter l’inertie du créancier, en mettant à sa charge une obligation d’information variable selon les régimes.

En matière de baux d’habitation, le bailleur n’est en principe tenu d’informer la caution que s’il met en jeu la clause résolutoire (article 24 de la loi du 6 juillet 1989).

Cependant, selon un arrêt rendu par la Cour d’appel de Caen le 26 septembre 2013, le bailleur serait également tenu, en vertu de son devoir de loyauté vis-à-vis de la caution, d’une obligation de diligence dans le recouvrement de sa créance.

En l’espèce, une mère s’était porté caution du paiement de loyers par sa fille. Cette dernière, après avoir accumulé des arriérés de plus en plus importants sur trois ans, avait cessé tout paiement. Le bailleur avait attendu un an avant de mettre en jeu la clause résolutoire et d’en informer la caution, à qui la locataire avait dissimulé la situation.

Devant la Cour, la caution avait fait valoir que, si le bailleur n’était tenu à aucune obligation d’information envers elle, il était en revanche soumis à un devoir de loyauté en vertu duquel il devait s’abstenir de tout comportement de nature à lui porter préjudice.

Or, en engageant des poursuites tardives sans l’informer plus tôt de la défaillance de la locataire, le bailleur l’avait empêchée d’intervenir auprès de cette dernière et de limiter les impayés.

Faisant droit à cette argumentation, la Cour a jugé que le bailleur avait commis une faute génératrice pour la caution d’un préjudice consistant dans la perte d’une chance d’empêcher la créance de loyers de s’accroître.

Elle a, en conséquence, condamné le bailleur à payer à la caution des dommages intérêts équivalents à 50% de la dette locative constituée depuis la cessation des paiements.

Cette obligation de diligence est comparable à celle mise à la charge des banques par la Cour de cassation (Cass. com 30 mai 2006, pourvoi n°05-14323).

Dès lors qu’elle repose sur le droit commun, elle concerne tous les bailleurs.

Cour d’appel de Caen, 2ème Chambre civile et commerciale, 26 septembre 2013, n°11/03078.

Sophie Erignac-Godefroy