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Baisse du prix des logements : A quel Saint se vouer ?

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Les discours sur l'évolution du marché des logements depuis quelques deux ou trois ans manquent de netteté. Ils ajoutent au trouble des ménages face à l'investissement immobilier résidentiel, dans une période économique difficile.

Après le choix du déni de la baisse, fait par nombre de voix autorisées du monde professionnel depuis 2008 et l'onde de choc la crise des subprimes, les lectures du marché ont été discordantes depuis 2011...avant que les constats de toutes origines aient enfin semblé converger. Qu'en est-il vraiment ? Pourquoi ces diagnostics si peu clairs ?

Il faut d'abord reconnaître que la communauté des agents immobiliers a toujours eu un problème avec l'aveu du besoin de la baisse des prix, et par conséquent avec la reconnaissance de cette baisse. On se rappelle encore quel tollé avait soulevé Jacques Friggit, économiste membre du Conseil général de l'environnement et du développement durable, lorsqu'il a confronté en 2011 sa théorie du tunnel et l'évolution des prix des logements depuis 2000.

Il postulait que le prix des logements en France devrait baisser, après avoir évolué au même rythme que les revenus au cours des quarante années précédents, s'était décroché de cette référence au cours de la décennie 2000-2010. Il estimait qu'un scénario vertueux consistait à faire baisser les prix de 35 % entre 5 à 8 ans pour se rapprocher de la solvabilité des familles.

Correction tendancielle

Que n'a-t-il entendu ! On a commencé par critiquer sans lire : il n'annonçait pas un effondrement, mais une correction tendancielle sur plusieurs années. On lui a opposé la pénurie - le mot a été prononcé - de logements dans notre pays. On lui a objecté que la France n'était pas les Etats-Unis et que notre marché était sain, loin de la spéculation dont les anglo-saxons seraient familiers.

En fait, comment nier que les hausses moyennes de 150 % entre 1999 et 2012 aient eu raison des capacités financières des Français, alors que sur la même période leurs revenus progressaient à peine ? Le nombre d'années de revenus nets nécessaire à l'achat d'un logement est passé, lui, de 4 à 6 dans le même temps...

D'ailleurs, dès 2011, certains marchés ont commencé à corriger leurs prix. Il s'est agi des territoires ruraux et des villes les moins dynamiques au plan économique, bientôt suivis par plusieurs grandes agglomérations de région. Il y a encore un an, des patrons d'enseignes nationales ou de syndicats, en dépit de cette vague, niaient que Paris et ses couronnes puissent être touchées par la baisse : à l'inverse, ils prévoyaient que le déséquilibre structurel entre l'offre et la demande allaient encore faire augmenter les prix. Voilà que les mêmes oracles voient les prix baisser au cœur de la capitale, certes dans des proportions plus faibles que les autres marchés.

Erreurs d’interprétation ?

En fait, la plupart des analystes ont commis jusqu'à ce jour plusieurs erreurs. Ils ont d'abord péché en pensant que le logement était un produit à part, échappant à l'impérieuse nécessité d'ajuster ses prix aux moyens des ménages. Sans cela, la sanction est simple : les volumes de vente se réduisent. Ils ont aussi un peu trop cru, avec un certain cynisme, que l'amortisseur des crédits aux taux bas suffisait à faire absorber les hausses. Ils ont sans doute aussi confondu discours économique et discours politique, croyant que l'Etat créerait des aides. Là encore, cynisme : le passé récent, en particulier avec le plan de relance de 2009, a montré que les aides publiques, loin d'alléger la facture des acquéreurs, favorisaient l'inflation des prix. Le problème est d'ailleurs que les discours sur l'impossibilité ou la faible probabilité des baisses ont retardé les baisses ! Les cédants ont fini par croire qu'ils pouvaient prétendre à tout et que le marché s'alignerait.

Pourtant, les femmes et les hommes de terrain ressentaient, eux, avec lucidité ce décalage entre les prix et la solvabilité des Français. Sans conteste, les acteurs de proximité sentaient le besoin impérieux que les prix baissent, et ils ont contribué à convaincre les vendeurs de consentir à ajuster les prix. Les mandataires, qui interviennent partout sur le territoire, agissent avec réalisme et éclairent propriétaires et acheteurs sur les prix d'équilibre. Ils savent notamment rappeler aux premiers qu'ils ont engrangé une plus-value qui leur permet d'accepter une baisse, et que cette baisse est la condition d'une opération rapide. Ils ne sont pas guidés par une idéologie ou des dogmes économiques, mais par une connaissance fine du patrimoine local et de la situation des ménages auprès desquels ils vivent eux-mêmes.

Il reste maintenant que la tendance baissière est généralement admise, qu'il est difficile pour un vendeur ou pour un acquéreur de savoir quelle est son ampleur pour un bien déterminé: seuls des experts de chaque micro-marché, dans l'indépendance, est en mesure d'apporter cette précision et de fixer le prix d'échange actualisé. A cet égard, le recours à des conseillers ancrés sur leur territoire commercial est le seul rempart contre l'approximation et l'erreur.

Les discours titrés et les anticipations nationales, pour utiles qu'ils soient, n'apportent pas l'éclairage opérationnel suffisant...quand ils ne présentent pas la réalité sous un jour excessivement subjectif. L'avis de valeur d'un professionnel de proximité est la réponse la plus adaptée pour les vendeurs comme pour les acquéreurs : là est la vraie valeur ajoutée des agents immobiliers et une grande partie de la justification des honoraires qui leur seront acquittés.

Henry Buzy-Cazaux