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Romain Rossi-Landi

Défiscalisation immobilière : les pièges à éviter

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La pénurie de logements dans les grandes agglomérations, conduit le gouvernement à imaginer des dispositifs favorables à leur production. Ces dernières années, plusieurs dispositifs ont ainsi vu le jour, parmi lesquels ceux instaurés par la loi SELLIER de 2012, à laquelle succède la loi DUFLOT de 2014, puis la loi PINEL de la même année.

Les dispositifs de la défiscalisation immobilière consistent à l’incitation de l’investissement dans l’immobilier locatif, par l’octroi d’une réduction d’impôts en fonction de l’investissement engagé et du type de logement projeté, ainsi qu’une capitalisation de son patrimoine à terme. Dès lors, trois préconisations s’imposent :

1) Il ne faut pas perdre de vue qu’il s’agit avant toute chose d’un investissement immobilier 2) Il faut mesurer l’équilibre des avantages de la défiscalisation et de l’investissement 3) Il ne faut pas hésiter à contester la validité de l’opération devant les juridictions

1/ Ne pas perdre de vue qu’il s’agit avant toute chose d’un investissement immobilier

L’augmentation incessante des charges fiscales stimule la tentation des contribuables à recourir à la défiscalisation par l’investissement immobilier. Or, dans cette obsession de défiscalisation, on a très souvent tendance à oublier qu’il s’agit avant toute chose d’une opération d’investissement immobilier, qui nécessite dès lors pour l’acquéreur, une attention tout aussi particulière sur l’opportunité de l’acquisition projetée.

En effet, à trop se focaliser sur la défiscalisation, nombreux sont ceux qui se trouvent parfois pris au piège des sociétés de courtage ou de conseil en fiscalité peu scrupuleuses, les conduisant souvent à des opérations non rentables.

C’est notamment le cas lorsqu’on ne prend pas suffisamment en considération le facteur « rendement locatif ». Or, en ce qui concerne le dispositif de la loi PINEL par exemple, qui s’applique exclusivement à l’investissement locatif, l’opération ne devient intéressante que si le bien acquis présente les atouts d’une exploitation locative.

En conséquence, avant de s’engager, plusieurs facteurs favorables à la rentabilité locative doivent être examinés.

En particulier, l’emplacement doit être déterminant dans le choix du bien à acquérir. De même que son taux d’occupation doit être analysé en fonction du marché local de la zone géographique du bien, afin de cerner les risques de la vacance locative. Les loyers pratiqués et les charges de la gestion locative doivent être intégrés dans le projet d’investissement.

C’est un conseil de bon sens mais on constate souvent que la plupart des investisseurs ne se rendent même pas sur place pour visiter l’appartement avant son acquisition…

2/ Mesurer l’équilibre des avantages de la défiscalisation et de l’investissement

Une opération de défiscalisation mal préparée peut très rapidement conduire à la ruine. S’il est difficile d’avancer avec certitude des statistiques relatives aux victimes de la défiscalisation immobilière, il est plus certain de reconnaître que leur nombre est aujourd’hui très important. Au point où depuis 2008, une association dédiée à la défense des investisseurs abusés a vu le jour : il s’agit de l’association ADIM, dont les conseils pratiques diffusés sur son site internet, visent à mettre en garde les candidats à la défiscalisation.

En soit, la défiscalisation immobilière n’est pas une opération particulièrement risquée, loin s’en faut. Toutefois, si l’équilibre entre les avantages de la défiscalisation et les inconvénients inhérents à l’investissement immobilier est mal apprécié, cela peut conduire l’investisseur à la ruine. En particulier, le bien acquis peut s’avérer non rentable, du fait de l’inoccupation prolongée (ou d’un locataire mauvaise payeur) et donc de la vacance locative.

Dans ce cas de figure, très fréquent, la défiscalisation peut devenir illusoire lorsque le bien placé en location ne produit pas régulièrement de loyers, alors même que dans le même temps, on doit rembourser le crédit ayant servi au financement de l’acquisition.

Cette absence de rentabilité absorbe l’avantage fiscal obtenu et peut dès lors altérer l’effet de la défiscalisation, sans pour autant que l’investisseur soit libéré du remboursement de son crédit immobilier.

Une telle mésaventure est très souvent le fait d’un défaut de conseils en amont. En effet, il arrive fréquemment malheureusement que des professionnels peu scrupuleux (Promoteurs, Conseillers en patrimoine, Agences de courtage, Banques ou Sociétés de Conseil en défiscalisation) démarchent les potentiels acquéreurs, en masquant les réalités que comporte le risque locatif. Le recours au dispositif de la loi Scellier par exemple a pu s’avérer plus vicieux encore.

En effet, la défiscalisation étant conditionnée par le placement du bien acquis en location dans les 12 premiers mois de l’achèvement de sa construction, des investisseurs se sont retrouvés propriétaires de biens inoccupés au-delà des 12 premiers mois exigés, et ont ainsi perdu le bénéfice de la défiscalisation, tout en étant contraint à supporter les charges financières liées à la gestion du bien, et au remboursement du crédit immobilier.

Au regard de ce qui précède, la présente analyse vise à présenter les quelques moyens d’action en justice, lorsqu’une opération de défiscalisation tourne à la tromperie.

3/ Les voies de recours ouvertes aux victimes d’une opération de défiscalisation trompeuse

Dans diverses hypothèses, l’opération peut conduire à la ruine de l’investisseur : - Le bien acquis est surévalué ou comporte de nombreuses malfaçons ; - Le bien acquis est resté inoccupé pour défaut de locataire ; - Le bien acquis a été loué à un locataire mauvais-payeur ; - L’investisseur est contraint à un redressement fiscal (remboursement de TVA et/ou d’économies d’impôts) ; - Le loyer est revu considérablement à la baisse à la demande du gestionnaire ou de l’exploitant du bien. A cela peuvent être ajoutées d’autres circonstances plus spécifiquement liées au crédit immobilier : - La réalisation du risque lié à un prêt à taux variable ; - La souscription d’un prêt dit « toxique » dont le capital restant dû est supérieur au capital emprunté après plusieurs années de remboursement ; - La déchéance du terme et la saisie du bien par la banque. Les hypothèses ainsi énumérées ne sont pas exhaustives. S’il est vrai qu’elles n’ouvrent pas systématiquement droit à la voie d’une contestation judiciaire, il demeure aussi vrai que si elles reposent sur une opération dolosive, l’action en contestation de la validité de l’acquisition est envisageable.

A défaut, la responsabilité des différents intervenants peut être recherchée. Entendu qu’il y aura dol, lorsque les agissements de l’un ou des intervenants dans la mise en œuvre de l’opération se sont révélés trompeurs, en ayant entraîné le consentement de l’investisseur à l’opération, consentement qu’il n’aurait pas donné s’il n'avait pas été l'objet de ces agissements. Plus concrètement, il peut s’agir des conseils malveillants des professionnels, ou plus simplement de leur silence délibéré sur un des aspects risqués de l’opération.

Dès lors, plusieurs procédures judiciaires sont accessibles. La plus radicale mais aussi la plus difficile à obtenir reste l’annulation de la vente pour vice du consentement de l’acquéreur. Il est cependant plus facile d’obtenir en toutes hypothèses la mise en cause de la responsabilité contractuelle ou même délictuelle du professionnel avec lequel l’opération est contractée. Parallèlement, il peut être engagé une procédure en suspension des mensualités de l’emprunt La mise en œuvre de l’une ou l’autre de ces procédures exigent une bonne préparation en amont afin de stimuler les chances de succès devant les juridictions. Le recours à un avocat apparaît dès lors plus que judicieux.pendant deux années sans que cette suspension ne produise des intérêts.

Romain Rossi-Landi