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L'acquisition d'un droit de jouissance privative par usucapion

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Le titre de cet article ne manquera pas de plonger dans la perplexité le lecteur non juriste.

Le mot usucapion mérite d'être défini, pour bien comprendre de quoi il est question : il s'agit du terme juridique correspondant à la prescription acquisitive d'un droit immobilier, c'est-à-dire au fait que si un particulier a la possession d'un bien immobilier pendant une période de 30 ans, il peut prétendre être devenu par le simple écoulement du temps propriétaire de ce bien. Voici une autre définition donnée par Wikipédia : « l'usucapion ou prescription acquisitive, est le fait d'acquérir juridiquement un droit réel, après l'écoulement d'un certain délai durant lequel on a exercé de fait ce droit ».

Dans le cas particulier d'une copropriété, la question pouvait se poser de savoir si un copropriétaire pouvait acquérir un droit de jouissance privative sur une partie commune, si par exemple il utilisait pendant 30 ans, exclusivement, une terrasse commune.

Dans le cas qui a donné lieu à un arrêt jugé par la Cour de Cassation, la cour d'appel n'avait pas estimé que cela était possible.

La Cour de Cassation considère pour sa part que, bien au contraire, ce droit de jouissance privative sur une partie commune est un droit réel et perpétuel qui peut s'acquérir par usucapion.

Voici cet arrêt :

« Vu les articles 2229 et 2262 du code civil ; Attendu que pour prescrire, il faut une possession continue et non-interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire. Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 avril 2006), que M. X..., propriétaire d'un appartement dans un immeuble en copropriété, a assigné le syndicat des copropriétaires "Villa Horizon" en annulation de la décision n° 5 de l'assemblée générale du 2 juillet 1998 relative à l'autorisation donnée à Mme X... d'effectuer à ses frais un renforcement de la clôture Nord ; Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que c'est à tort que le premier juge relevant qu'il ressortait des documents produits que depuis plus de trente ans les propriétaires de certains lots du rez-de-chaussée ont utilisé une partie du terrain, partie commune, en a déduit que cette fraction des parties communes ainsi utilisée était devenue à usage privatif par usucapion, alors que le droit que constitue l'usage privatif de certaines parties communes n'étant pas un droit réel, ne saurait s'acquérir par usucapion ; Qu'en statuant ainsi, alors qu'un droit de jouissance privatif sur des parties communes est un droit réel et perpétuel qui peut s'acquérir par usucapion, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».

Christophe Buffet