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L'encadrement des loyers, une vraie mesure anti-locataires !

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Il y a encore quelques mois, l’investissement locatif était une option de placement attractive, boostée par un ensemble d’avantages fiscaux consentis par l’Etat. Parallèlement, l'épargne financière rapportant peu, l'immobilier locatif constituait, plus que jamais, la valeur refuge de nombreux Français.

L’année 2012 marque la fin de plusieurs avantages liés à l’investissement immobilier : suppression du prêt à taux zéro pour l'achat de logements anciens, réduction des avantages fiscaux du dispositif Scellier, hausse de la TVA sur les travaux de 5,5 % à 7 %... Et pour couronner le tout, risque d’un encadrement des loyers envisagé par un candidat à l’élection présidentielle.

Une telle mesure, destinée à contenir l’augmentation excessive - reconnaissons-le ! - de certains loyers, améliorerait-elle réellement la condition des locataires ?

Soyons clairs ; La réponse est NON ! Un encadrement des loyers risquerait d’ajouter un frein à l’investissement immobilier, au moment même où la suppression de nombreux avantages, comme vu plus haut, détourne déjà un certain nombre d’investisseurs de l’actif immobilier. Or, malgré ce que certains oublient, l’intérêt de la majorité des locataires dépend d’une offre privée abondante…

Les bailleurs privés ne sont pas de « riches profiteurs » !

Contrairement aux idées reçues, le parc locatif privé qui concerne 20% des logements loués en France, n’est pas détenu par des familles « riches » qui n’auraient d’autre but que de profiter de « pauvres » locataires, en leur faisant payer des loyers exorbitants… dont ils n’auraient d’ailleurs pas réellement besoin… Un « plus » en quelque sorte dans un océan de rentrées financières…

Evidemment, la réalité est bien loin de ce schéma simpliste.

Le parc locatif privé est détenu par des épargnants désireux de se constituer un patrimoine, souvent en vue de se procurer des revenus complémentaires lors de leur retraite. Ces derniers ne sont pas tous des « riches » ! ; La majorité d’entre eux sont même des foyers « relativement » modestes, préparant l’avenir de leur famille en empruntant avec nécessité de rembourser le crédit avec les revenus fonciers. Priver un petit investisseur du fruit de son investissement, serait très injuste.

L’encadrement des loyers, une vraie mesure anti-locataires !

La majorité des loyers est déjà conforme au marché, sans excès ! Paris n’est pas la France. Les excès observés dans la capitale et dans quelques villes cotées de la Côte d’Azur sont, au regard du nombre de logements loués dans l’hexagone, une « goutte d’eau ». Certes, une goutte d’eau voyante et véritablement problématique, évidemment, pour les locataires recherchant sur ces marchés, mais remettons les choses à leur juste place. Dans toutes les grandes métropoles françaises, hors Paris, et, a fortiori, dans les villes de taille moyenne, les loyers sont loin d’être excessifs. Malgré tout, ils sont calculés sur la base d’un équilibre que connaissent bien les investisseurs : le prix d’achat doit correspondre à un rendement attendu, compris entre 3% et 6% selon la localisation. Logique : aurait-on l’idée de reprocher aux investisseurs financiers de réclamer un rendement attractif pour se décider à investir ? Idem dans l’immobilier : un loyer correspondant à un rendement correct est une condition sine qua non pour investir… Si les loyers sont encadrés demain, ce rendement, en chute libre, détournera irrémédiablement les investisseurs de la pierre avec comme conséquence néfaste « boomerang » de cette baisse du parc locatif, une hausse des prix des loyers…

Les mesures contraignantes ont un impact « psychologique » dévastateur !

Enfin, on le voit à chaque nouvelle mesure, toute contrainte supplémentaire entraîne des conséquences proportionnellement plus graves que celles attendues. Pourquoi pénaliser les bailleurs dans leur ensemble pour quelques propriétaires peu scrupuleux et risquer un détournement en masse des investisseurs vers d’autres actifs que la pierre ? Alors que l’intérêt général est que le parc locatif augmente ?

A l’opposé de ces mesures « anti-locataires », il serait donc plus judicieux de favoriser l’investissement immobilier pour réguler les prix du marché. Plus le nombre de logements augmente, plus les prix des loyers diminuent. Il s’agit du simple mécanisme de libre concurrence du marché. Pour inciter les investisseurs à réduire les loyers, il serait donc plus pertinent de leur accorder, en contrepartie, des avantages fiscaux plus ou moins importants, en fonction des efforts qu’ils auraient consentis auprès de leurs locataires.

Avantages fiscaux équivalents dans l’ancien comme dans le neuf

Par exemple, en contrepartie de l'obligation de pratiquer des loyers plafonnés, tout investisseur, qu’il achète dans l’ancien ou dans le neuf, aurait droit aux mêmes avantages fiscaux. Cela pourrait inciter un nombre important d’épargnants à investir dans l’immobilier ancien, souvent plus accessible… Avec pour heureuse conséquence l’augmentation du parc locatif, qui, devenant plus concurrentiel, pratiquerait des prix plus bas.

Déduction des intérêts d’emprunts pour les investisseurs acceptant de pratiquer des loyers plafonnés

Les investisseurs acceptant de pratiquer des loyers plafonnés continueraient à bénéficier d’une déduction des intérêts d'emprunt et pourraient, en plus, déduire de leurs revenus la réduction des loyers octroyée à leurs locataires. Ceci pendant une durée minimum de 9 ans. Par exemple, un propriétaire bailleur qui s'engagerait à pratiquer pendant 9 ans des loyers inférieurs de 20 à 30% à ceux du marché, pourrait déduire cette somme de ses revenus imposables.

Exemple : pour un loyer normal de 1.000 € par mois ramené à 700 € dans le cadre d'un loyer plafonné, le propriétaire pourrait déduire annuellement 3.600 € de ses revenus imposables.

Déduction des travaux d’agrandissement de ses revenus fonciers

Ne plus limiter la déductibilité des revenus fonciers qu'aux travaux d'aménagement ou d'embellissement, mais y ajouter les travaux d'agrandissement.

Rétablissement de la taxation des plus-values à 15 ans si réinvestissement dans la pierre Pour les particuliers qui investissent dans la pierre, secteurs neufs ou anciens, il serait bon de rétablir - sous condition - l’exonération des plus-values à partir de 15 ans de détention. La condition serait leur engagement à réinvestir au minimum 50% du prix de vente dans l’achat d’un autre bien immobilier. Ceux qui ne réinvestiraient pas dans la pierre seraient taxés sur les bases de la plus-value actuelle. Cela redonnerait, comme auparavant, de l’intérêt à l’investissement pierre, tout en incitant les épargnants à continuer à privilégier cet actif.

Patrick Chappey