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Cécile Duflot, ministre du Logement pour tous ou du Logement écologique ?

François Gagnon, président d'Era pour la France et l'Europe

François Gagnon, président d'Era pour la France et l'Europe - dr

Jean-François Gagnon, le président du réseau immobilier Era France, se demande quelle ministre sera l'ancienne Secrétaire nationale d'Europe Écologie Les Verts, nommée la semaine dernière à l’Egalité des territoires et au Logement.

Je pense dire tout haut ce que la profession immobilière pense tout bas : que nous réserve la nomination de Cécile Duflot, patronne des verts ? Faut-il s'attendre à un intégrisme écologique, ou la ministre, dans son nouveau rôle, sera-t-elle plus modérée que l'était la responsable de parti politique ?

Il faut admettre qu'il y a une part de civisme à vouloir un logement conforme au respect de l’environnement mais dans la construction, le surcoût généré par des installations ou des modifications pour économiser l'énergie ne sera pas absorbé par les économies réalisées. A l'époque du protocole de Kyoto qui s'est voulue exemplaire en matière de développement durable, les économies mondiales et nationales n'étaient pas en dépression. Avec la crise de 2008 et la désolvabilisation des ménages accédants, investisseurs ou locataires, le sujet du financement du surcoût, en soi important, est devenu crucial. Le problème se pose certes dans le neuf, mais il est lancinant dans l'ancien : l'ancien est la cible naturelle des acquéreurs modestes, et il le sera plus encore avec la baisse prévisible des aides en direction du neuf. Dans ce contexte, il sera essentiel que le gouvernement et le parlement gardent les pieds sur terre. Oui à une action puissante contre la précarité énergétique qui frappe les familles les plus fragiles, et les fragilise plus encore. Oui à la poursuite de l'effort de rénovation énergétique du parc existant et à un accompagnement par les fonds publics. Non à l'intégrisme, qui conduirait par exemple à conditionner désormais toute aide à un classement énergétique entre les lettres A et C.

L'Etat doit discerner les priorités et choisir la modération dans cette période : on sait que 2012, 2013 et sans doute 2014 seront des années difficiles pour les projets immobiliers des Français, avec un accès au crédit beaucoup plus restreint et une situation de l'emploi délicate. Tout alourdissement du coût de l'acquisition privera des milliers de ménages de la réalisation de leur souhait. Il ne faudrait pas, en somme, que notre pays meure guéri, c'est-à-dire que tous les logements obéissent à des critères énergétiques exigeants, et que dans le même temps ils ne trouvent preneurs que parmi les plus riches.

Le risque de l'intégrisme écologique réside aussi dans la fameuse valeur verte. Même si les spécialistes avouent ne pas savoir précisément dire quelle survaleur prend un logement plus vertueux en termes d'énergie, on n'ignore pas en tout cas quelle dévalorisation l'affecte si le discours du moment le disqualifie... Veut-on appauvrir par ce mécanisme des millions de propriétaires, qui ont besoin pour la suite de leur parcours résidentiel de recycler à bonne hauteur le prix de leur bien ?

Que notre ministre, à qui je présente des voeux de plein succès dans sa mission, ne s'y trompe pas : les agents immobiliers et les administrateurs de biens ne sont pas de dangereux réactionnaires, indifférents au destin de la planète, mais ils sont des observateurs avisés des équilibres de marché. A ce titre, je voulais contribuer un peu à éveiller la conscience publique pour que le logement pour tous soit l'objectif obsessionnel, prioritaire sur tous les autres sans les faire oublier.

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