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Immobilier

"L'ampleur de la baisse des mises en chantier de logements est inouïe"

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Alexandre Mirlicourtois, directeur des études économiques du cabinet Xerfi, commente pour Lavieimmo.com les chiffres de la construction neuve publiés hier par le ministère de l’Ecologie.

S’il n’est guère étonné par la baisse des mises en chantier, dont la publication avait été interrompue au mois de mai, l’économiste abaisse sa prévision pour l’ensemble de l’année. Et se montre moins optimiste que les promoteurs constructeurs...

Lavieimmo.com : L’ampleur de la baisse des mises en chantier vous a-t-elle surpris ?

Alexandre Mirlicourtois : Absolument pas. S’il ne publiait plus les chiffres des mises en chantier depuis le printemps, le ministère de l’Ecologie n’a jamais arrêté de communiquer sur les permis de construire, dont les variations précèdent celles des mises en chantier de quelques mois. Or, la contraction des demandes de permis est suffisamment marquée et dure depuis suffisamment longtemps pour qu’il n’y ait eu de doute possible ni sur l’orientation des mises en chantier ni sur l’ampleur du mouvement. Je ne vois rien d’étonnant dans cette baisse.

Lavieimmo.com : Maintenez-vous votre prévision de 300 000 à 320 000 mises en chantiers cette année ?

Alexandre Mirlicourtois : La borne haute de cette fourchette était un peu optimiste, il ne fait désormais plus de doute qu’elle est hors de portée. Au cours des douze derniers mois*, un peu plus de 340 000 logements ont été mis en chantier en France. Fin décembre, on devrait être proche des 300 000, légèrement au-dessus. Bien sûr, on peut essayer de se rassurer en se disant que ce niveau reste, historiquement, relativement élevé. Néanmoins l’ampleur de la baisse qui se profile, de l’ordre de 17 % sur un an et d’environ 30 % par rapport au record de 2007, est d’une violence inouïe pour les promoteur et les constructeurs en place… Sans parler des besoins en logements qui sont loin d’être satisfaits.

Lavieimmo.com : Quel est l’effet du dispositif de défiscalisation Scellier sur le marché ?

Alexandre Mirlicourtois : Les derniers chiffres de la Fédération des promoteurs constructeurs (FPC) montrent que plus de la moitié des ventes de logements neufs réalisées au premier semestre correspondent à des opérations de défiscalisation. L’impact du Scellier est donc positif. Cependant il convient de ne pas en exagérer la portée. Tout d’abord parce que les ménages qui disposent des fonds pour réaliser un investissement immobilier ont toujours la possibilité d’arbitrer en faveur d’autres supports, notamment des marchés d’action. Or, après un début d’année chaotique, le CAC 40 a repris plus de 50 % depuis le mois de mars, attirant à nouveau les investisseurs vers la Bourse de Paris – au détriment de l’immobilier. Ensuite, il ne faut pas oublier que ce ne sont pas les opérations d’investissement locatif qui font le marché : sans redémarrage de la primo-accession, il n’y aura pas de reprise de l’immobilier. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que le contexte économique actuel, entre hausse des défaillances d’entreprises et montée du chômage, n’est pas favorable aux primo-accédants – le plus souvent des jeunes sans beaucoup d’apport. Plutôt que sur celui du Scellier, c’est donc sur l’impact du doublement du prêt à taux zéro, destiné à la primo-accession, qu’il convient d’insister. Cela dit, ces dispositifs ne sont que des soutiens. Sans amélioration sur le front de l’emploi, on ne voit pas comment l’immobilier pourrait se redresser prochainement.

Lavieimmo.com : A quand datez-vous cette reprise ?

Alexandre Mirlicourtois : Sans nouvelle dégradation de la conjoncture, on peut s’attendre à ce que les mises en chantiers de logements neufs repartent de l’avant au deuxième semestre de l’année prochaine, pas avant.

Propos recueillis par Emmanuel Salbayre

*de septembre 2008 à août 2009

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