Les loyers baissent pour la première fois depuis les années 1990
« Un ralentissement d’une ampleur inédite. ». Les loyers du marché locatif privé ont reculé de 0,8 % au cours des huit premiers mois de l’année. Cette baisse, la première depuis la crise des années 1990, contraste avec la progression de 2,1 % observée au 31 août 2008. Sans surprise, ce retournement fait écho à l’inquiétude des ménages face à l’incertitude économique générale. « Le marché locatif ne se soucie pas des variations des taux d’intérêt ni de l’offre de crédit. En revanche il est très sensible à la situation sur le front de l’emploi et aux variations du revenu des ménages », explique Michel Mouillart, professeur d’économie à l’Université de Paris X et auteur de l’Observatoire Clameur, publié deux fois par an. « Le marché était sur le fil du rasoir en février, cette dernière édition de l’étude montre bien qu’il a flanché ». Sur l’ensemble de l’année, l’économiste prédit désormais une baisse comprise de 1 et 1,5 % des loyers en moyenne nationale, après une progression de 1,5 % en 2008.
Par types de logements, seules les petites surfaces échappent encore à la correction. Les loyers des studios et appartements d’une pièce ont progressé de 0,1 % sur les huit premiers mois de l’année, tandis que ceux des deux pièces ont reculé de 0,5 %. La dégradation est en revanche manifeste pour les maisons et les appartements de cinq pièces et plus, qui affichent une baisse de 2 %, contre une progression annuelle moyenne de 2,5 % sur la période 1998-2009. « Le marché se bloque avant tout sur les beaux produits », reprend Michel Mouillart. « Les segments qui sont traditionnellement soumis à de fortes pressions, comme celui des petites surfaces, résistent mieux que les autres ».
Des loyers en baisse dans les ¾ du marché
Le loyer de marché dans la France entière était de 11,9 €/m² au 31 août, dans une fourchette comprise entre 8,1 €/m² dans le Limousin, la région la moins chère, et 17,3 €/m² en Île-de-France. Clameur observe désormais des baisses de loyers dans 50,4 % des 1 300 villes qu’il étudie, contre moins de 30 % en 2008. « La moitié des villes sont concernées, mais ce sont les trois quarts du marché locatif privé qui sont touchés, soit plus de 70 % de la population. » Parmi les villes concernées, on trouve en effet plusieurs « poids lourds », comme Toulouse (-0,4 %), Montpellier (-1,2 %), Marseille (-2,2 %), Strasbourg (-2,4 %), ou Bordeaux (-4,2 %). Grande première, Paris n’échappe plus au mouvement et connaît une baisse de loyers de 0,5 %. Avec, toujours, de grandes disparités entre les arrondissements du centre (+1,7 % dans le 6ème) et de l’ouest (+2,2 % dans le 16ème), et ceux, plus populaires, du nord (-2,5 % dans le 18ème) et de l’est (-7,4 % dans le 19ème). Quelques villes hausses, comme Lyon (+0,7 %), Lille (+1,1 %) ou Nice (+1,5 %).
Cette tendance à la baisse s’accompagne d’une poursuite du tassement de l’activité : sur les huit premiers mois de l’année, le taux de mobilité résidentielle des locataires au sein du parc privé est tombé à 25,7 %, son niveau le plus bas depuis le lancement de l’enquête, en 1998. « On n’a probablement pas encore vu le creux de la vague », prédit Michel Mouillart. « Le marché locatif privé suit les tendances économiques générales avec un retard de six à neuf mois. Dans la mesure où rien ne permet d’entrevoir une amélioration rapide sur le marché du travail, le retournement du locatif n’est pas pour tout de suite… ».
*Connaître les Loyers et Analyser les Marchés sur les Espaces Urbains et Ruraux