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Les notaires remontés contre Bercy et l'Autorité de la concurrence

La proposition de l'Autorité de la concurrence suscite de vives réactions

La proposition de l'Autorité de la concurrence suscite de vives réactions - Pascal Guyot - AFP

Le gendarme de la concurrence propose d'augmenter de 20% d'ici à 2018 le nombre de notaires en France, en fonction des besoins de la population. Une proposition qui passe mal auprès de la profession...

C'est la goute d'eau qui fait déborder le vase. Alors que Bercy vient d'abaisser les honoraires des notaires, on veut désormais toucher au modèle de la profession, qui s'exporte pourtant très bien en Europe. Deux contraintes qui risquent de peser sur l’activité de plusieurs centaines d’études notariales, notamment les plus fragiles. L'Autorité de la concurrence a proposé une carte des zones dans lesquelles les nouveaux offices notariaux pourront s’installer. Elle préconise d’augmenter de 20% d’ici à 2018 le nombre de notaires libéraux, pour le porter à 10.250 contre 8.600 actuellement.

"Au lieu de résoudre les problèmes d’accès au droit des Français, la libre installation des notaires (si elle est adoptée) risque de mettre en difficulté 300 études implantées en zone rurale", s’inquiète le Conseil supérieur du notariat (CSN). Certaines pourront en effet se retrouver dans une situation délicate: faire face à la baisse de leurs tarifs, tout en étant affaiblies par un concurrent qui pourra décider de s'installer dans le même quartier... voire sur le trottoir d'en face, avec les conséquences économiques que l'on connaît. Pour éviter de mettre les clés sous la porte, elles devront peut-être s'associer avec d'autres qui arrivent sur le marché. L’organisme reste en outre dubitatif sur cette carte émise par l’Autorité, "qui ne prend pas en compte les besoins réels de la population".

Difficulté juridique

"De plus, augmenter les effectifs des notaires ne va pas forcément faire grimper les actes. Il n’y aura pas plus de mariages ou de transactions immobilières", ajoute le CSN. De son côté, le ministère de la Justice fait ce qu’il peut pour défendre les intérêts de la profession. La Chancellerie a récemment averti sur l’existence d’une difficulté juridique, évoquant une confusion entre le nombre de notaires et le nombre d’études, que l’Autorité réfute. Reste que seuls les ministres de la Justice et de l’Économie sont compétents pour arrêter la carte des futures installations. Ils devraient trancher dans les prochains jours.

D'après les données du ministère de l'Économie, on compte 89 notaires pour 1,5 million d'habitants (soit un notaire pour 17.000 habitants) dans le département de Seine-Saint-Denis contre 60 notaires pour 275.000 habitants (soit un notaire pour 4.500 habitants) dans un département rural comme celui de l'Aveyron. Parmi les endroits où le potentiel de création d'offices est important figurent Paris et sa région (159) ainsi que des zones comprenant les agglomérations de Lille (22), Rouen (23), Rennes (35), Nantes (39), Bordeaux (42), Toulouse (51), Lyon (61), Montpellier (23) et Marseille-Aubagne (35).

Dans 247 zones dites "vertes", d'installation libre, les demandes des candidats auront vocation à être acceptées, dans un "rythme de création recommandé". Dans 60 zones oranges, d'installation contrôlée, le ministère de la Justice pourra refuser une nomination dans un nouvel office si elle est susceptible de "porter atteinte à la continuité de l'exploitation des offices existants et à compromettre la qualité du service rendu".

Julien Mouret