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"Loi Lefebvre : Protection du consommateur ou… des réseaux de mandataires ?"

ERA s'interroge sur l'abrogation d'une fraction de la loi Hoguet

ERA s'interroge sur l'abrogation d'une fraction de la loi Hoguet - ERA

Après l’adoption du projet de loi Lefebvre, visant à renforcer les droits des consommateurs, les professionnels de l’immobilier ont dénoncé « une loi de réaction, ni mûrie ni concertée », commentait mi-octobre à LaVieImmo.com Eric Allouche, directeur exécutif ERA immobilier. Alors que les agents immobiliers demandaient plus d’encadrement, ces derniers doivent composer, in fine, avec une mesure dans laquelle « non seulement aucune disposition ne se rattache à la formation, mais de surcroît, l’agent immobilier ne sort pas de son rôle de ‘méchant’ », expliquait-il alors.

Aujourd’hui, le réseau revient à la charge, en déplorant une discrimination entre les agents immobiliers professionnels et les réseaux de mandataires. L’explication par François Gagnon, président d’ERA France et Europe.

« Le projet de loi « renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs » adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 11 octobre, actuellement en cours d’examen par le Sénat, prévoit dans le paragraphe 7bis A de l’article 2 que : « le b de l’article 14 de la loi Hoguet du 2 janvier 1970 est supprimé ».

Cette abrogation, passée inaperçue, concerne une sanction encourue en cas de création « sans déclaration préalable d’activité » d’un établissement secondaire d’agence immobilière par une même entité juridique sous la forme d’un établissement, d’une succursale, d’une agence ou d’un bureau.

Le législateur avait imposé que toutes les extensions, par une même structure, d’agences immobilières soient soumises à un formalisme imposant une déclaration préalable obligatoire assortie de sanctions dissuasives lourdes (six mois d’emprisonnement et 7 500 € d’amende).

« L'abrogation ne profite pas au consommateur, bien au contraire »

Ce texte avait pour but d’éviter la multiplication d’ouvertures « sauvages » d’agences immobilières sans aucun formalisme, ni demande préalable. Il pouvait notamment trouver application en cas de création de bureaux d’agences immobilières « non déclarés » et gérés par des agents commerciaux éloignés de l’agence principale faisant partie de réseaux de mandataires.

Or, il est pour le moins curieux que cette sanction soit supprimée à l’occasion d’un texte dont la raison d’être affichée est la « protection du consommateur » tant il est manifeste que l'abrogation ne profite pas au consommateur, bien au contraire.

Alors, pourquoi cette sanction a-t-elle été supprimée ? A qui cela profite-t-il ?

« Est-il juste que les agents immobiliers professionnels soient sanctionnés ? »

On ne peut s’empêcher de constater une curieuse coïncidence entre cette mesure, qui passe inaperçue et n’a pas logiquement sa place dans un texte visant à protéger le consommateur, et l’acquisition par François Pinault des deux principaux réseaux de mandataires (Capifrance et Optimhome). Ceux-ci pourront, si ce texte est voté en l’état, échapper à toute sanction pénale dans le cas où il serait jugé que l’activité d’un mandataire s’apparente à celle d’une agence secondaire.

Tout aussi curieux : non seulement la sanction a été supprimée mais aucune autre mesure coercitive (pas même une amende) n’est prévue en l'absence de déclaration préalable d’activité.

D'où notre question : est-il juste que les agents immobiliers professionnels soient sanctionnés par un texte dont de nouvelles dispositions restreignent et sanctionnent brutalement et sans aucune concertation leurs activités, notamment concernant le mandat exclusif, alors que, dans le même temps, d'autres dispositions permettent aux réseaux de mandataires de s’épanouir librement au détriment du droit des consommateurs ? »

André Figeard