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Troubles anormaux du voisinage : Qui peut agir ?

Les locataires peuvent aussi agir en troubles du voisinage

Les locataires peuvent aussi agir en troubles du voisinage - dr

Quatrième et dernier volet de notre dossier sur les troubles du voisinage. Après avoir répertorié la multitude de nuisances qui entourent le voisinage à travers notre typologie (non-exhaustive) des dommages, nous allons nous intéresser à la question de savoir qui peut agir en justice, et contre qui on peut le faire.

Le copropriétaire peut-il se plaindre d’un locataire qui fait trop de bruit ? Le locataire peut-il agir contre un autre locataire ? Ces questions se posent trop fréquemment, sans pour autant, nous semble-t-il, que les victimes de troubles anormaux du voisinage, sachent exactement quels sont leurs droits.

Afin de savoir quels sont les prétendants au droit d’agir, le droit a consacré les notions suivantes : l’intérêt et la qualité pour agir.

> L’intérêt doit être direct et personnel, selon l’article 31 du Code de procédure civile.
> La qualité est le titre pour agir, cette dénomination recouvre la question « qui peut agir ? ». Les acteurs sont nombreux à avoir à la fois la qualité et l’intérêt pour agir.

Le propriétaire

Les propriétaires entre eux peuvent agir. Cela est indirectement établi par l’article 544 du Code civil : « La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue qui soit, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ». Mais quid du propriétaire qui n’occupe pas son habitation ? La réponse est donnée par la jurisprudence : « Un propriétaire, même s’il ne réside pas sur son fonds, est recevable à demander qu’il soit mis fin aux troubles anormaux de voisinage provenant d’un fonds voisin », indique un arrêt de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation du 28 juin 1995.

Le locataire

Le locataire peut agir, mais il est aussi responsable : il encourt même la résiliation du bail en cas de non-respect du règlement de copropriété par un excès de nuisances. Le propriétaire bailleur est également responsable de son locataire, par le truchement de la responsabilité du fait d’autrui issue du Code civil.

Le copropriétaire

Pour la copropriété, la loi du 10 juillet 1965 qui régit ce domaine, permet dans son article 15 un intérêt collectif à agir. Le copropriétaire comme le syndic sont ainsi recevables à agir contre les nuisances occasionnées par un tiers. En cas de trouble avec un locataire, le copropriétaire qui loue le bien à ce dernier est donc également responsable de ses actes, et peut donc être lui-même assigné. Un arrêt très global indique que « tous les occupants d’un immeuble en copropriété, quel que soit leur titre d’occupation », peuvent agir en justice sur ce fondement. (civ. 2ème, 17 mars 2005). De par un arrêt de la troisième chambre civile du 20 février 1973, « Le règlement de copropriété ne peut pas exonérer un copropriétaire de sa responsabilité à l’égard d’un autre pour trouble du voisinage ». Les copropriétaires peuvent donc agir les uns contre les autres.

La question des tiers : Les entrepreneurs

L’entrepreneur qui effectue des travaux dans un fonds voisin échappe-t-il aux sanctions ? Le juge a énoncé clairement les choses dans un arrêt de la 1ère chambre civile de la Haute cour, rendu le 18 mars 2003 : « l’entrepreneur auteur des travaux est responsable de plein droit (sans contestation possible, NDLR) des troubles du voisinage constatés dans le fonds voisin ». Un seul tempérament : si les travaux sont réalisés par un sous-traitant, l’entrepreneur principal n’est pas considéré comme auteur du trouble, et ne peut pas être poursuivi en justice à ce titre (Décision rendue dans un arrêt du 21 mai 2008).

Notre conseil : Si un copropriétaire reçoit des plaintes à l'encontre de son locataire, il doit l'en informer sans délai. Pour plus de sécurité, il doit porter à sa connaissance le règlement de copropriété qui mentionne la destination de l'immeuble (portant sur l'usage d'habitation, ou l'usage commercial, ou l'usage mixte de l'immeuble). En dernier recours, il peut lui donner congé, mais en mentionnant un motif légitime et sérieux : soit une explication des troubles qu'il cause et de son absence de réactivité pour arrêter ses nuisances.

Léo Monégier