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Fiscalité immobilier

Plus-values immobilières : Le Sénat dit non à la réforme du gouvernement

Le vote du Sénat remet en question les abattements en vigueur depuis le 1er juin

Le vote du Sénat remet en question les abattements en vigueur depuis le 1er juin - dr

La décision des sénateurs de supprimer l'article 18 du projet de loi de finances pour 2014 n'a, pour le moment, aucune conséquence pratique. Si elle était validée par l'Assemblée nationale, elle pourrait cependant présenter un risque pour les vendeurs.

Le Sénat a voté contre la réforme de la fiscalité des plus-values immobilières, estimant, selon les termes d’un amendement au projet de loi de finances pour 2014 adopté dans la nuit de lundi à mardi, qu’elle représente un « cadeau fiscal en direction des détenteurs de patrimoine ».

L’amendement validé, qui avait été déposé par le groupe communiste républicain et citoyen (CRC), supprime purement et simplement l’article 18 du PLF. Celui-là même qui entérine la réforme de la fiscalité des plus-values immobilières, entrée en vigueur le 1er septembre (système d'abattements aboutissant à une exonération d'impôt sur le revenu au bout de 22 ans et de prélèvements sociaux au bout de 30; abattement exceptionnel de 25 %).

Peu sensibles à l’argument, développé dans le PLF, selon lequel ces abattements, en « contribu[ant] immédiatement au « choc d’offre » immobilier » souhaité par le gouvernement, permettraient de « relancer le marché », les sénateurs CRC ont fait valoir que la mesure représentait « une dépense fiscale supplémentaire évaluée à millions d’euros ». Elle apparait de surcroît « contraire à la poursuite de l’objectif de mise en œuvre d’une fiscalité plus juste ».

A noter que les sénateurs UMP et UDI ont également voté l’amendement. Interrogé par Les Echos, Philippe Marini, le président (UMP) de la commission des finances au Sénat, a mis l’accent sur une complexité du texte, qui instaure une « suppression du taux d'abattement pour les terrains à bâtir » en même temps qu’un « assouplissement du régime sur les autres biens immobiliers ».

« Situation ubuesque »

Autre complexité à venir : que risquent les particuliers qui ont vendu leur bien depuis le 1er septembre, et bénéficient donc des abattements prévus par le PLF 2014 ? Pour l’instant pas grand-chose, dans la mesure où la navette parlementaire n’est pas terminée. Mais « si l’Assemblée nationale venait à donner raison au Sénat sur ce point, la question se poserait », explique Caroline Couzineau, avocate en fiscalité immobilière chez SBKG & Associés. « La plus-value est déclarée et calculée par le notaire au moment de l’acte de vente, poursuit la juriste. Il semble très compliqué, voire impossible, de revenir sur les transactions déjà signées. Pour les autres, celles qui ont fait l’objet d’une promesse de vente mais n’ont pas encore été actées, il est plus difficile d’imaginer les conséquences possibles d’une suppression de l’article 18. »

Pour l’heure, l’instruction fiscale publiée au Bulletin officiel des Finances publiques (BoFip) le 9 août dernier continue de s’appliquer. « Il s’agit d’une doctrine administrative, sur laquelle les services de Bercy s’appuient en interne et qui est opposable, mais qui se retrouve privée de base légale. C'est-à-dire qu'elle applique un texte qui n'existe pas, explique Me Couzineau. On est dans une situation ubuesque ».

Mais dans le pire des cas, les contribuables pourront toujours invoquer le bénéfice de l’article L80 A du Code général des impôts (CGI). Un texte protecteur des contribuables de bonne foi qui ont interprété un texte fiscal en lequel ils pouvaient légitimement croire.

Emmanuel Salbayre et Léo Monégier