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Et si la maison de l'avenir était en paille ?

La maison en paille sous la neige

La maison en paille sous la neige - Vincent Bouteilly

Vincent Bouteilly, habitant de Cuzorn dans le Lot-et-Garonne, a construit sa maison en paille pour seulement 32 000 euros ! Ce paysagiste de formation, très préoccupé par la nature, imagine un nouveau mode de vie pérenne, agréable, et économique.

Pour se faire construire une grande et solide maison sans se mettre « sur la paille », peut-être faudrait-il justement la construire dans ce matériau ! Ce n’est pas Vincent Bouteilly qui dira le contraire. Cet amoureux de la nature, qui donne l’exemple et espère bien généraliser la pratique, a une conscience écologique nourrie par de nombreux voyages dans des pays où la construction soucieuse de l’environnement est monnaie courante. En Allemagne surtout, mais aussi au Danemark, en Suède, en Finlande ou en Suisse, une maison en paille n’a rien d’étonnant. En France, « l’administration a du retard et nous sommes plus frileux », déplore-t-il. Mais cela devrait changer sous peu, puisque depuis janvier 2012, la paille est reconnue comme matériau adapté au bâtiment. Le Réseau français des constructeurs en paille (RFCP), dont Vincent Bouteilly est délégué régional, a établi récemment avec le ministère du Développement durable les règles professionnelles pour ce type de construction. Il y aura désormais des normes techniques à respecter pour ériger une maison pérenne qui ne fera pas « feu de paille » ! En effet, « il est tout à fait possible de bâtir une demeure solide en paille, que l’on puisse conserver sur plusieurs générations ». Le cahier des charges et les règles sont bien précis. « L’initiative commence à intéresser beaucoup d’architectes, à Toulouse, Bordeaux ou Montauban », se réjouit-il.

Quand confort et écologie se rencontrent

Loin d’être l’humble chaumière que l’imaginaire collectif pourrait se représenter, la maison est un lieu de vie agréable et spacieux. Elle est par ailleurs solide et fiable, puisque faite de paille si fortement compressée que son aspect combustible disparaît, et d’une étanchéité parfaite. D’une superficie de 150 m², la bâtisse située à Cuzorn dans le Lot-et-Garonne est dotée d’une salle de bain, d’une buanderie et d’une véranda, où poussent de nombreuses plantes. De grandes fenêtres laissent passer la lumière au cœur de cet espace voulu ouvert, « les pièces communiquent et ne sont pas fermées, le but de cette maison est de pouvoir recevoir du monde, car beaucoup de gens viennent la visiter ». L’étage comporte quant à lui plusieurs chambres et une mezzanine.

Une demeure doublement économique

Pour le vaste espace de vie dont il dispose, le pionnier du Sud Ouest de la France a déboursé 32 000 euros. « Et il est possible de construire une maison de paille pour bien moins cher », précise-t-il, car il s’est offert le luxe -superflu- de charpentes en bois. Le matériel est très peu coûteux, et la main d’œuvre représente la majeure partie du coût de revient total. « D’habitude, c’est le contraire », explique Vincent Bouteilly, « mais dans ma manière de concevoir la construction, l’humain prime sur le matériel. Ce sont les artisans qui doivent être payés !» L’économie n’est pas seulement liée à la construction, mais également à la dépense énergétique. « Le mélange de la paille avec la terre argileuse est un excellent isolant », explique-t-il. L’isolation que permet la paille, alliée à l’inertie provoquée par la terre, crée une matière « éponge » qui emmagasine la chaleur et la restitue même après extinction du poêle. De ce fait, sans l’aide de chauffage ou de climatiseurs, « il y a très peu de variations thermiques dans une maison en paille, et ce quelle que soit la saison. La maison stagne à une température moyenne de 14°C en hiver, et de 21°C en été ».

Un système autosuffisant

Le mode de vie dans la demeure de paille est profondément marqué par les enjeux écologiques. La famille vit en faisant des choix respectueux de l’environnement, encore trop peu pratiqués en France. Par exemple, les toilettes sont sèches et non à l’eau, parce que « 80 % de la pollution des eaux grises vient de cet usage, c’est impensable ! » Et pour les 20 % restants ? « Nous mettons en place un système de phyto-épuration pour filtrer nous-mêmes nos eaux usées et les rendre propres à la nature ». Vincent Bouteilly prône le retour aux sources, en indiquant que la récupération de l’eau de pluie « pourrait suffire ». Il est en train de créer un jardin fonctionnant en permaculture, grâce au procédé du mulchage. Cela consiste à laisser les débris végétaux protéger la terre, en attendant que s’établisse une biomasse qui pourra s’autosuffire et diminuer considérablement l’irrigation. Harmonie et respect du cycle naturel, tels sont donc les maîtres mots de ce paysagiste, qui déclare avoir « toujours voulu une maison qui devienne comme le paysage ».

Marielle Davoudian