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Immobilier

Il se fait déposséder de son garage par... sa copropriété

Un garage acquis par une copropriété grâce à la prescription acquisitive

Un garage acquis par une copropriété grâce à la prescription acquisitive - dr

Une décision de justice autorise des copropriétaires à acquérir un lot privatif laissé durant trente ans à la disposition de tous. Par le simple jeu de la prescription. Explications.

Tout le monde utilisait son garage, ouvert à toute la copropriété depuis plus de trente ans. Et cela a suffi à déposséder un copropriétaire de son bien. Dans un arrêt rendu le 8 octobre 2015, la cour de cassation a en effet transféré la propriété du garage aux copropriétaires qui l'utilisaient pendant toutes ces années. Et ce, même si le lot était privatif comme en attestait le règlement de copropriété, et alors qu'aucune décision de la copropriété n'en avait décidé autrement.

Pour quelle raison ? "Aucune disposition ne s'oppose à ce qu'un syndicat de copropriétaires acquière par prescription la propriété d'un lot", selon les juges. Le syndicat peut donc se prévaloir des dispositions du code civil, qui prévoit en effet que toute personne se comportant aux yeux de tous comme un propriétaire, durant trente ans au moins, peut être considérée juridiquement comme tel.

La prescription acquisitive peut jouer

Ce mécanisme, spécifique à l'immobilier, est appelé prescription acquisitive ou usucapion. Il faut néanmoins pour cela que le véritable propriétaire ne se soit pas manifesté, durant toute cette période, et que les occupants aient agi de manière continue, et non pas clandestinement ou de manière équivoque. A priori discutable, cette règle poursuit aussi l'objectif de "moraliser" le droit de propriété. C'est-à-dire de faire en sorte que le véritable propriétaire d'un bien fasse tout ce qui est en son pouvoir pour le rester, au besoin en faisant valoir ses droits en temps utile.

La Cour a ainsi écarté les arguments du copropriétaire, qui observait qu'un syndicat de copropriétaires existe pour conserver et administrer un immeuble, et non pour "porter atteinte aux droits fondamentaux des copropriétaires". En l'occurrence, le droit de propriété. L'homme observait aussi que le texte encadrant le régime de la copropriété, la loi du 10 juillet 1965, interdit à l'assemblée générale d'imposer à un copropriétaire une modification de la destination de ses parties privatives, ou des modalités de leur jouissance prévues au règlement de copropriété. Un autre argument rejeté par les juges.

Avec AFP

Léo Monégier