BFM Immo
Rénovation Et Travaux

La fin du chauffage collectif, une fausse bonne idée ?

Une mesure plébiscitée, mais qui comporte des effets pervers

Une mesure plébiscitée, mais qui comporte des effets pervers - dr

Si vous résidez dans un immeuble doté du chauffage central, le changement c'est pour bientôt. Dans un an très exactement, c'est votre consommation réelle qui définira le montant des charges qui vous seront facturées. Cette mesure est plébiscitée par les Français, mais elle comporte des effets pervers.

9 Français sur 10 ne veulent plus du chauffage collectif. L'individualisation des frais de chauffage dans les immeubles chauffés collectivement, qui doit entrer en vigueur dans en mars 2017, est l'une des rares mesures décidées par le gouvernement que les Français plébiscitent. Selon un sondage OpinionWay publié lundi, ils estiment que la mesure va inciter chaque consommateur à faire davantage attention et qu'elle mène vers plus d'équité.

Mais cette large approbation doit être tempérée. Si l'on ne prend en compte que les Français qui bénéficient actuellement du chauffage collectif, l'entrain est légèrement moindre. Ils ne sont plus que 84% à se réjouir de payer uniquement pour leur propre consommation. Il faut dire que cette révolution ne fait pas que des gagnants.

Le prix des boîtiers va-t-il flamber?

Le décret d'application de cette mesure de la loi sur la Transition énergétique devrait paraître dans les tous prochains jours. Mais des informations sur sa mise en œuvre circulent déjà. Actuellement, les habitants d'un immeuble chauffé collectivement paient la facture de façon solidaire, au prorata de la surface de leur logement, sans tenir compte de la consommation de chacun. En 2017, chaque logement devra s'équiper d'un boîtier qui mesurera sa consommation individuelle. L'appareil, proposé à la location, devrait leur coûter 4 euros par mois et par foyer. S'ils n'en sont pas équipés, ils s’exposeront à des amendes pouvant atteindre 1.500 euros par logement et par an.

C'est un des éléments du cadre d'application qui inquiète Sabine Dray, fondatrice des établissements Dray, spécialisée dans les métiers du chauffage, de l'électricité et de la plomberie. Parce que le délai est court: les ménages ont l'obligation d'être équipé en mars 2017. "Des installateurs vont être très sollicités, or les prix ne sont pas encadrés, est-ce que la demande ne va pas faire augmenter les tarifs d'intervention?", se demande-t-elle.

Mauvaise pioche pour les appartements mal exposés

Cette société spécialisée dans les services d'électricien et de chauffagiste convient que l'idée, en soi, n'est pas mauvaise puisqu'elle favorise les économies d'énergie. "Mais cette mesure est faite à la va-vite". En fait d'équité, Sabine Dray considère qu'elle est en réalité "inégalitaire". Parce que "des appartements situés plein nord ou sous les toits ne bénéficient pas de la même isolation qu'un logement qui est chauffé par ses voisins". Pour leurs habitants, les frais de chauffage augmenteraient jusqu'à 44%, a calculé l'Association nationale de défense des consommateurs et des usagers, la CLCV.

En outre, en termes d'économie d'énergie, la mesure ne serait pas forcément efficace. La CLCV recense ainsi différentes projections de réduction du gaspillage. Les chiffres varient de 7 à 20% selon les études, souligne l'association. L'Ademe, établissement public favorable à la mesure, convient elle-même que les économies ne seraient pas si importantes que cela.

Par Nina Godart

Qualite-Logement.org