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L'Unef sème le trouble sur le logement étudiant

L'Unef demande un encadrement des loyers des petites surfaces

L'Unef demande un encadrement des loyers des petites surfaces - dr

Le syndicat dénonce la hausse des coûts de logement, devenue « l’un des principaux facteurs de la paupérisation du milieu étudiant ». Le syndicat demande une revalorisation des aides au logement, et reproche au gouvernement de ne pas construire suffisamment de résidences universitaires. Seul hic, ses chiffres semblent un peu approximatifs…

Le pouvoir d’achat des étudiants est en berne, et ce pour la onzième année consécutive. Le dernier rapport d’enquête de l’Union nationale des étudiants de France (Unef) évoque une augmentation de 4,1 % du coût de la vie des étudiants français – deux fois plus importante que l’inflation (2,1 %). Outre l’augmentation des divers postes de dépenses obligatoires décidée par le gouvernement (frais d’inscription, restauration universitaire…), le premier syndicat étudiant pointe du doigt « la flambée des loyers » à la relocation dans le parc privé. Une hausse dont « les étudiants souffrent particulièrement, […] car ils occupent des logements de petite surface, dont les loyers augmentent plus vite à la relocation », explique le document.

S’appuyant sur des chiffres de l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne (Olap), l’Unef évoque ainsi une hausse de 8,9 % des loyers à l’emménagement à Paris, qui atteindraient 772 euros, et de 1,9 % en province, à 611 euros. Soit « en moyenne près de la moitié du budget de l’étudiant », poursuit le rapport. Selon le syndicat étudiant, la situation est d’autant plus difficile à supporter que les aides au logement, qui « ont augmenté de 1,1 % entre 2010 et 2011 […], restent insuffisantes ».

APL, loyers encadrés et construction

Partant de ce constat, l’Unef « exige », entre autres « mesures immédiates », une revalorisation de 20 % de l’Aide personnalisée au logement (APL), ainsi que la suppression du mois de carence pour le versement de cette dernière. Elle demande également la suspension de la taxe d’habitation pour les étudiants, ainsi que l’encadrement des loyers des petites surfaces dans le parc locatif privé. On se souvient que le secrétaire d’Etat au Logement, Benoist Apparu, s’en était pris à la fin de l’hiver aux loyers « totalement abusifs » pratiqués par certains bailleurs, menaçant d’une surtaxe ceux qui feraient payer plus de 40 euros du m² pour une chambre de bonne (moins de 13m²). La mesure - jugée insuffisante par le Parti socialiste, favorable à un encadrement global des loyers - doit entrer en vigueur dès le mois de janvier prochain.

Plus généralement, l’Unef, dénonce le manque de logements étudiants disponibles et demande leur doublement d’ici à 2020 (soit 195 327 constructions), dans le cadre d’« un plan de rattrapage ambitieux qui fixe un engagement financier du gouvernement. Il est clair que sans les crédits nécessaires à la réalisation de tels objectifs, le retard ne pourra être rattrapé et la politique du gouvernement concernant le logement étudiant n’aura été qu’une annonce de plus », conclut le syndicat.

Des chiffres approximatifs ?

Mais après cet exposé, trois précisions semblent nécessaires. Tout d’abord, s’ils sont bien extraits du dernier rapport annuel de l’Olap, publié au mois de mai dernier, les taux de croissance de 8,9 et 1,9 % respectivement évoqués par l’Unef pour Paris et la province, ne correspondent pas à des augmentations moyennes de loyer, mais à des hausses de loyers à la relocation. Ce que l’Olap appelle le « saut à la relocation ». Une différence importante, puisque tous les étudiants ne déménagent pas à chaque rentrée universitaire, et ne sont donc pas soumis, le cas échéants, à cette revalorisation. Dans un communiqué publié dans le courant de l’après-midi, le ministère de l’Enseignement supérieur évalue à environ 12 % le pourcentage d’étudiants qui déménagent effectivement à la rentrée.

Deuxième précision, ces mêmes hausses correspondent à l’ensemble du parc locatif, des studios aux logements de cinq pièces et plus. Or, les grandes surfaces sont peu fréquemmment occupées par les étudiants, comme le pointe d’ailleurs l’enquête de l’Unef. Ainsi, toujours selon l’Olap, les hausses de loyer à la relocation constatées en 2011 sont de 7,7 % « seulement » pour les appartements d’une pièce, et de 8 % pour les T2. Curieusement, ce sont les plus grandes surfaces qui enregistrent les « sauts à la relocation » les plus élevés, de 12,4 % pour les quatre pièces, et 11,5 % pour les cinq pièces et plus, à Paris. A l’Olap, on explique ce phénomène par le fait que « les locataires qui occupent des surfaces plus importantes ont tendance à déménager moins souvent que les autres. Quand ils déménagent effectivement, le rattrapage que le bailleur effectue est automatiquement plus important ».

Dernier point, plus surprenant peut-être : à aucun moment l’Olap ne fournit de loyer moyen, tout juste des loyers au mètre carré par type d’appartement. Nous avons tenté de contacter l’Unef pour en savoir plus sur les 772 et 611 euros qu’elle avance dans son rapport, mais personne n’était disponible pour nous répondre. A noter que la Fédération des associations générales étudiantes (Fage), deuxième syndicat étudiant de France, s’en remet, elle aux chiffres de l’Observatoire de la vie étudiante (OVE), et évoque des moyennes de 646,6 euros en Île-de-France, et 455,75 euros en province.

Wauquiez se range derrière l’Insee

Les précisions apportées par le ministère de l’Enseignement supérieur en réponse à l’enquête de l’Unef ne sont guère plus convaincantes : Laurent Wauquiez s’appuie sur les chiffres de l’Insee et note que les loyers en résidence principale s’affichent en hausse de 1,2 % à la rentrée 2011, contre des progressions de 1,3 % en 2010 et 2,3 % en 2009. Mais s’il note que les 12 % et quelque d’étudiants qui déménagent « peuvent être confrontés à des hausses supérieures liées aux revalorisations éventuelles en cas de changement de bail », le communiqué du ministère ne mesure pas cette différence…

Emmanuel Salbayre