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Prix immobilier

Le scénario d'une bulle immobilière, écarté en France ?

La pénurie d'offre pointée du doigt par l'Insee

La pénurie d'offre pointée du doigt par l'Insee - dr

La hausse des prix des logements anciens a atteint +141 % entre 1998 et 2010 en France, selon la dernière étude de l’Insee. Une situation qui pourrait ne pas tant témoigner de la formation d’une bulle immobilière que de la pénurie de logements ou de la politique monétaire, explique Jean-Philippe Cotis, directeur général de l’Insee.

A deux semaines d’intervalles, deux experts de taille, le Centre d’analyse stratégique (CAS) - qui dépend du gouvernement - et l’Insee, ont livré deux conclusions qui peuvent sembler fort différentes sur l’état du marché immobilier en France. Si les deux institutions font état d’une flambée des prix déconnectée de la hausse des loyers, c’est sur la formation éventuelle d’une bulle spéculative que le doute demeure. Et ce, même si l’Insee fait part mardi d’une nouvelle hausse des prix de l’immobilier ancien, de 6,3 % en 2010, qui fait suite aux -7,1 % enregistrés en 2009, période de « baisse significative mais de courte durée ».

Une tendance qui témoigne d’un risque de bulle, faisait valoir en début de mois le CAS : « si la première phase de hausse [des prix de l’immobilier] pouvait paraître cohérente avec la baisse des taux d’intérêt, il semble aujourd’hui probable que celle-ci ait biaisé les anticipations à la hausse, créant une bulle sur le marché immobilier français ».

La pénurie de biens responsable ?

Ce scénario n'est pourtant pas certain, et ne doit pas éclipser l'existence d'autres phénomènes, ce qu'expose le directeur général de l'Insee, Jean-Philippe Cotis : « En France, on ne voit pas une envolée de l'investissement, un excès d'investissement dans l'immobilier qui aurait pu justifier une embardée comme celle qu'on a vue dans les pays anglo-saxons ou en Espagne », selon ses propos, tenus en conférence de presse et rapportés par Le Monde. Selon lui, il faut davantage chercher dans « la rareté physique » des biens - pour ne pas dire la pénurie - donc du côté de la sphère réelle, « que du côté de complications financières », rapporte le quotidien. Pour autant, on ne peut pas exclure tout risque de bulle immobilière en France, clarifie-t-il.

La France n'est ni l'Espagne, ni les Etats-Unis

Ce qui pourrait expliquer la flambée des prix de 185 % entre 1998 et 2010 à Paris, de 156 % pour la petite couronne et de 142 % pour la grande couronne. Mais si des mouvements haussiers ont été observés dans d’autres capitales gagnées par la bulle à l’échelle mondiale, « il y a une différence avec ce qui a été observé aux États-Unis et en Espagne, où la dimension spéculative était clairement établie », selon M. Cotis. En effet, certains ont connu un pic dans l'investissement résidentiel, allant jusqu'à représenter 9 % du PIB en Espagne, 6 % aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni, alors qu'en France celui-ci n'a pas dépassé les 4 % depuis 2000. Qui plus est, «en France, l'endettement des ménages est beaucoup moins important que dans ces pays », poursuit-il.

Des ratios prix / loyers élevés

Par ailleurs, « les ratios de type prix immobiliers sur loyers restent très élevés en France. Ces ratios reflètent, sans doute, à la fois une relative modestie des loyers, qui sont encadrés dans notre pays et peut-être une pénurie d’offre immobilière qui fait monter les prix des immeubles (ratio prix/revenus) », fait valoir l’expert. De même qu'une importante composante macro-économique, la politique monétaire, dont l'expansionnisme a pu favoriser le développement de la demande, soutenue par la bassesse des taux d'intérêt observée jusqu'à la fin 2010.

Enfin, la prise en considération par les indices de prix et de loyers, d’ « évolutions à qualité constante » est évoquée par l'Insee. Ceux-ci ne tiennent pas compte « des changements de la structure du parc des logements loués ou vendus : amélioration du confort, évolution du nombre de pièces ou de la surface par personne, etc. Autant d’éléments qui peuvent concourir à une hausse des prix ou des loyers effectifs », conclut l’Insee.

Léo Monégier