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Prix immobilier

Les prix de l'immobilier marquent le pas

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Délais de vente plus longs, resserrement des conditions de crédit, recul du pouvoir d'achat...

Après dix années de flambée, le marché du logement entre désormais dans une phase de ralentissement.

C'est la fin d'une époque. Le logement résidentiel, qui vient d'enregistrer un boom ininterrompu depuis 1996, cherche de nouveaux repères. Selon l'expression de Me Pierre Bazaille, président de l'Institut du droit immobilier, le secteur est passé « de la béatitude à la vigilance ». Une vigilance teintée d'inquiétude : si les acheteurs commencent à revenir à la raison, les banques, elles, semblent avoir perdu le nord. La crise financière internationale, aggravée par les errements de la Société générale, laisse augurer un resserrement des conditions d'emprunt pour les particuliers. « Un vent de risque zéro souffle sur les établissements bancaires. Les dossiers de crédit sont examinés à la loupe », expliquent Patrick-Michel Khider et Bernard de Crémiers, coprésidents fondateurs de Laforêt Immobilier. Mais, comme le pire n'est pas toujours sûr, l'onde de choc provoquée par la catastrophe américaine des subprimes a malgré tout des retombées positives : elle a mis un frein à la hausse des taux d'intérêt car la Banque centrale européenne a dû se résoudre à infléchir sa politique de l'argent cher. « Le taux fixe d'un emprunt immobilier se situe actuellement à 4,75 % pour vingt ans, 4,85 % pour vingt-cinq ans et devrait rester proche de ce niveau jusqu'à fin 2008 », estime le courtier Meilleurtaux.

Cependant, les délais de vente s'allongent et les négociations traînent. Résultat : les métiers de l'immobilier souffrent. « L'année 2008 verra sans doute la fermeture de nombreuses agences, et ce ne sera que justice, estime Bernard Cadeau, président d'Orpi, premier réseau de France. Un marché plus difficile ne peut que valoriser les professionnels aguerris, qui affichent notre label. »

Jusqu'à présent, les statistiques ne traduisent pas une baisse des prix du mètre carré, même si elles accusent un très net ralentissement de la hausse. Selon les notaires, les prix des appartements anciens arrêtés au troisième trimestre 2007 n'ont augmenté que de 5,7 % en rythme annuel, après des hausses de 12,2 et 16,2 % les deux années précédentes. Les chiffres de la Fnaim, qui portent sur l'ensemble de 2007 mais ne reposent que sur un tiers des transactions, témoignent aussi d'une accalmie, avec une hausse limitée cette fois à 3,8 % dans l'ancien, contre 7,1 % en 2006. Pour 2008, ces professionnels prévoient une progression modeste, au mieux de 2 à 3 %, en ligne avec l'inflation. D'autres sont plus pessimistes : - 3 % pour Mathilde Lemoine, directeur des études économiques d'HSBC France, - 5 % pour Olivier Eluère, économiste au Crédit agricole. Mais, comme tous les experts, ce dernier écarte le scénario d'un retournement brutal du marché : « Le cycle actuel est beaucoup moins périlleux que la bulle spéculative qui s'était formée en Ile-de-France entre 1985 et 1991 et que les cycles à l'oeuvre actuellement aux Etats-Unis (récession immobilière en cours), au Royaume-Uni et en Espagne (risques de correction sensible). »

L'exception française

Ce sont les spécificités du marché français qui expliquent cette relative résistance aux vents mauvais. Tout d'abord, une exposition moindre aux taux variables. Moindre, mais pas tout à fait négligeable. Le Crédit foncier a ainsi dû prendre des mesures pour alléger les mensualités de ses clients qui avaient souscrit des emprunts de cette nature. Autre facteur qui soutient les prix : le déséquilibre de l'offre et de la demande. Pour la troisième année consécutive, le nombre des mises en chantier de logements a dépassé 400 000 en 2007, en hausse de 0,3 % par rapport à 2006. Mais il faudrait en construire 500 000 par an jusqu'en 2020 pour répondre aux besoins, d'autant que le troisième trimestre fait déjà état d'un repli de 0,8 %. Une forte diminution du nombre des permis de construire (- 4,7 %) a aussi été enregistrée, mais, selon le gouvernement, elle s'expliquerait surtout par la réforme du Code de l'urbanisme. Quant aux promoteurs, s'ils voient se raréfier les ventes de logements neufs (29 100 transactions au troisième trimestre, soit un repli de 7,8 %), ils continuent d'augmenter leurs tarifs. Selon la Fédération des promoteurs-constructeurs, la hausse des prix des appartements a atteint 9 % en rythme annuel au troisième trimestre 2007, contre 6,5 % pour la même période en 2006.

Les disparités régionales restent fortes. Paris et l'Ile-de-France continuent leur course en tête. A moindre allure puisque la progression des prix est passée en variation annuelle, selon les notaires, de 11,1 à 7,1 %. Dans la capitale, le prix moyen ressort à 8 181 euros, avec quatre arrondissements qui enregistrent une hausse supérieure à 10 % en un an. Il s'agit des Ve, VIIe et XVIe, qui accueillent une clientèle aisée et étrangère, ainsi que, pour des raisons inverses, le XIXe, seul quartier où le prix moyen reste inférieur à 5 000 euros le mètre carré. En banlieue, les prix flambent à Pontoise, dans le Val-d'Oise (+ 17,6 %), et à Grigny, dans l'Essonne (+ 14,7 %). Mais dans ces mêmes départements, des communes accusent des baisses : Viry-Châtillon (Essonne, - 5,7 %) et Domont (Val-d'Oise, - 5,1 %).

En province, le mètre carré évolue aussi de manière disparate. Toulon, Cannes et Lille sont les grandes villes de province à avoir enregistré les plus fortes hausses en 2007, avec respectivement 8,5 %, 7,7 % et 6,7 % selon la Fnaim. Si Aix-en-Provence et Nice sont restées au fil de la décennie les villes les plus chères, la flambée de ces dernières années a bouleversé le classement des communes de plus de 200 000 habitants (lire encadré ci-contre). Les cartes ont été redistribuées, mais personne ne connaît encore les nouvelles règles du jeu qui vont s'imposer en 2008.

Françoise Rey

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