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Prix immobilier

Tribune - "Conseils aux vendeurs en période de conjoncture baissière"

Anthony Perrat, fondateur d'Unemaisonbleue.com

Anthony Perrat, fondateur d'Unemaisonbleue.com - dr

Une tribune d'Anthony Perrat, fondateur d'Unemaisonbleue.com.

En période de conjoncture baissière, le meilleur conseil à donner aux vendeurs, est de faire preuve de réalisme en matière de prix ou de faire le choix de garder leur bien et de le louer en attendant une inversion de la courbe…

Les intermédiaires que nous sommes rencontrent, sur le terrain, des vendeurs qui ne peuvent se résoudre à l’évolution actuelle du marché immobilier.

Il est frappant de constater, en effet, que les vendeurs acceptent généralement facilement, voire anticipent, l’évolution du marché lorsqu’elle est à la hausse - comme cela fut le cas pendant la période 1998-2011 – mais peinent à accepter toute évolution à la baisse ! Ce qui peut leur être préjudiciable …

De nombreux agents sont ainsi confrontés à des vendeurs qui refusent d’abaisser leur prix de vente, car ils ne souhaitent pas brader leur bien ou, tout simplement, parce qu’ils estiment que le bien qu’ils ont acheté doit pouvoir se revendre au moins aussi cher.

Ces réactions sont liées à un phénomène bien connu sur les marchés financiers : l’aversion à la perte. L’acheteur se montre réticent à se séparer d'un actif qui vaut moins, sur le marché, que le prix auquel il a été acheté, ou auquel il aurait pu être vendu à un instant T passé.

Cette attitude est, de plus, accompagnée d’un autre phénomène extrêmement fréquent en matière d’immobilier et qui s’observe indépendamment du niveau du prix offert par le marché, et qui est l’aversion à la dépossession.

En économie comportementale, ce biais cognitif et émotionnel assez courant consiste, pour le propriétaire d'un actif, à s'être attaché psychologiquement à sa possession. Cela fonctionne, évidemment, particulièrement bien dans le domaine immobilier où l’investissement d’ordre personnel (travaux, fondation du foyer, événements familiaux…) nourrit à plein le moteur d’attachement psychologique. Cela provoque un phénomène selon lequel les vendeurs considèrent que leur bien vaut plus, voire bien plus, que ce que le marché leur en offre.

Ces comportements peu rationnels (aversion à la perte et à la dépossession) sont préjudiciables et peuvent entrainer les vendeurs, à force de résister, à connaître une perte encore plus importante que s’ils accompagnaient l’évolution du marché.

En effet lorsque le vendeur résiste, sur un marché à tendance baissière, son prix ne fait que s’éloigner du prix que lui offre ce marché. Lorsqu’il décide, enfin, d’effectuer une baisse, il positionne souvent son prix encore au-dessus du marché, voulant anticiper une négociation, et continuant donc à « courir après le marché » sans jamais le rejoindre. On comprend, aisément, que cela peut durer longtemps et qu’il peut donc perdre de plus en plus !

De leur côté, les acheteurs anticipent de manière beaucoup plus rationnelle la baisse du marché et sont, donc, mus par un esprit de prudence. Ils pensent à la revente, surtout si celle-ci devait être contrainte (mutation, perte d’emploi, changement de situation familiale…). Cela les incite, soit à n’acheter que des biens « sans inconvénients majeurs » qui leur paraissent liquides et vendables rapidement en cas de vente contrainte, soit à négocier beaucoup plus fortement le prix pour des biens qui leur paraissent moins liquides.

S’installe ainsi, dans un premier temps, « un marché à deux vitesses » : celui des biens de qualité, sans inconvénients majeurs qui, présentés à un prix concordant avec le marché, se vendent vite et sans trop de négociation. Avec, en face : un marché de biens pouvant présenter des défauts rédhibitoires, qui ne se vendent pas ou alors seulement avec un effort conséquent du vendeur sur le prix affiché. C’est le marché tel que nous l’avons connu entre l’automne 2012 et l’été 2013.

Dans un deuxième temps, si la tendance baissière se confirme, on observe alors la conjonction des deux phénomènes : la négociation du prix quelles que soient les qualités du bien proposé, ce qui entraine inévitablement la baisse continue des prix sur la globalité de ce marché.

C’est, semble-t-il, l’évolution du marché actuel et à venir, selon les prospectives de la plupart des analystes économiques.

C’est donc dans ce contexte, qu’en tant qu’intermédiaires, nous nous devons d’accompagner des vendeurs qui doivent faire face à l’inacceptable : pour quelques-uns, vendre à un prix inférieur au prix d’achat, et, pour les autres, vendre à un prix inférieur au maximum atteint en 2011, à Paris.

Si ces derniers sont encore peu nombreux, leur nombre semble cependant devoir croître, au vu des perspectives du marché immobilier.

Il est donc nécessaire de faire preuve de pédagogie, pour accompagner, au mieux, les vendeurs dans cette phase baissière du marché.

Il existe cependant quelques consolations :

- La baisse des prix conjuguée à des taux d’emprunts très bas, peut être une aubaine, pour ceux qui entrent sur le marché en tant que primo-accédants ;

- La baisse étant proportionnellement plus importante pour les biens plus grands, ceux qui vendent dans la perspective d’un achat plus important dans le même secteur devraient en tirer aussi des bénéfices ;

Enfin ceux qui ne vendent pas ne perdent pas ! En revanche, il faudra accompagner ceux qui subiront une vente contrainte due aux aléas de la vie, et les accompagner sur le chemin de la raison. Il faudra, d’abord, leur rappeler qu’ils ne peuvent pas - en tout cas pas individuellement - agir sur l’évolution des prix du marché.

En fonction de leur situation personnelle, il sera peut-être judicieux de leur conseiller, si c’est possible, de conserver leur actif immobilier, et de le louer. Cela pourra leur permettre d’en tirer un revenu complémentaire, et/ou de capitaliser en vue de la retraite.

Ou bien encore on pourra conseiller à ceux qui le peuvent, d’agrandir l’existant plutôt que d’acheter plus grand !

La France a la chance, à la différence des exemples douloureux des marchés américains, islandais, ou espagnols…, non pas de faire face à l’éclatement brutal de la bulle immobilière, mais plutôt à son dégonflement progressif, et cela nous donne, pour le moment, un peu plus de visibilité.

Par conséquence, les vendeurs qui sauront bénéficier du travail et du conseil d’un tiers de confiance, pourront mettre en place une stratégie de vente optimale minimisant au maximum les risques : ce qui peut être salutaire pour éviter des erreurs de commercialisation pouvant se révéler, au final, encore plus douloureuses financièrement.

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