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Une forte dégradation de la note de la dette ferait chuter l'immobilier

L'immobilier français intimement lié à la notation de la dette

L'immobilier français intimement lié à la notation de la dette - Fotolia

L’économiste Marc Touati minimise les effets d’une perte probable du triple A sur le marché immobilier, mais met en garde contre les conséquences d’une nouvelle dégradation de la note de la dette française, qui pourrait selon lui avoir lieu après l’élection présidentielle.

Marc Touati n’a pas attendu le changement de ton de Notaires pour prédire un retournement de l’immobilier français. Dès le mois de novembre 2010, dans un entretien à LaVieimmo.com (disponible ici), le responsable de la recherche économique d’Assya Compagnie Financière estimait, au vu de l’écart croissant entre les prix des logements et le revenu des ménages, que « la bulle immobilière française [s’était] reformée ». Le secteur, alors « surévalué d’environ 20 % », ne devait pas tarder à connaître, à plus ou moins courte échéance, un mouvement de correction salvateur. Un peu plus tard, alors que les prix ont continué de progresser en moyenne nationale, atteignant de nouveaux records dans certaines grandes agglomérations, Paris en tête, le constat n’a guère changé, mais les prévisions se font plus précises.

-5 à -10 % d’ici aux élections

L’économiste confirme le scénario qu’il dressait déjà au mois de septembre, d’une baisse de 5 à 10 % des prix d’ici à l’élection présidentielle, conforté par la mise sous surveillance de la note de la dette française par l’agence Standard & Poor’s. « L’OAT 10 ans est actuellement de 3,20/ 3,50 %. Elle grimperait automatiquement vers les 4,50 % si, dans trois mois, S&P décidait effectivement d’abaisser sa note de deux crans ». Les taux des prêts immobiliers, indexés sur les variations de l’OAT, suivraient assez rapidement (lire l’analyse de Maël Bernier, porte-parole du courtier Empruntis.com), pesant sur la capacité des ménages à emprunter et, partant, sur le niveau des prix.

Une baisse de 25 %, un scénario catastrophe à ne pas exclure

Mais selon Marc Touati, le « vrai enjeu » est pour plus tard. « Une dégradation de la note de la dette dans trois mois, même si elle atteint deux points, n’aura finalement que des effets limités en termes de taux. Le risque, ce serait que S&P et les autres agences de notation - Moody’s et Fitch, qui maintient sa note pour le moment mais ne devrait pas tarder à suivre ses deux consœurs - se montrent plus fermes. Il n’y a vraisemblablement rien à craindre jusqu’à l’élection, mais si le candidat qui remporte le scrutin ne met pas rapidement en œuvre une politique de réduction des dépenses publiques et se contente d’augmenter les impôts, alors les agences ne tarderont pas à réagir. Et dans ce cas, il faudra payer la facture ». L’économiste estime qu’une dette notée d’un simple A (scénario qui peut sembler extrême mais « n’est pas à écarter totalement ») tirerait l’OAT vers les 7 %, soit le double d’aujourd’hui. « En termes de prix, cela équivaudrait à une baisse très marquée, de l’ordre de 25 %, au moins par rapport aux niveaux actuels, poursuit-il. En d’autres termes, la question n’est plus de savoir si les cours de l’immobilier français vont baisser, mais, plus que jamais peut-être, de combien ils vont baisser ».

Au passage, l’économiste écorche l’idée selon laquelle l’immobilier, valeur refuge, continue de s’apprécier en période de crise. « Si cet argument peut être valable lorsque les prix sont relativement peu élevés et que les taux d’intérêt sont bas, il devient caduc en période de bulle et de remontée des taux d’intérêt », tranche-t-il.

Emmanuel Salbayre