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L'UFC dénonce le "scandale" du cautionnement bancaire

Les emprunteurs sont les grands perdants de ce marché "sclérosé"

Les emprunteurs sont les grands perdants de ce marché "sclérosé" - dr

L'association de défense des consommateurs décrit un « marché sclérosé », « tenu à 95 % par les banques ». Une meilleure mise en concurrence des acteurs permettrait aux emprunteurs de réaliser d'importantes économies.

L’UFC-Que Choisir s’attaque à un « nouveau scandale » dans le domaine du crédit immobilier : celui du cautionnement bancaire. « On a des emprunteurs qui sont captifs, victimes d’un marché fait par les banques, pour les banques », a expliqué lundi Alain Bazot, président de l’association, lors d’une conférence téléphonique. Des banques accusées de mener des « pratiques douteuses », dans un « marché sclérosé ».

Explication. Lorsqu’un ménage souscrit un emprunt immobilier, il a le choix, principalement, entre deux types de garantie : l’hypothèque et le cautionnement bancaire. « Or non seulement les banques dirigent les clients vers le cautionnement, mais pire, elles imposent leur(s) organismes(s) de cautionnement aux clients emprunteurs », a expliqué l’UFC. Il peut s’agir d’organismes détenus en propre (CEGC pour les Caisses d’épargne, CMH pour le Crédit mutuel, CAMCA pour le Crédit agricole…) ou du Crédit logement, société spécialisée dans le cautionnement, filiale possédée en commun par les banques*

Jusqu’à 720 € d’économie par emprunteur

Résultat : non seulement le marché est « tenu à 95 % par les banques », mais « cette pratique de concurrence en silo empêche les clients de tirer parti du grand écart tarifaire constaté entre organismes ». L’UFC note en effet que « la caution CMH du Crédit Mutuel est 2,5 fois moins chère que celle de la CAMCA du Crédit Agricole » ; l’instauration d’« une véritable concurrence » entre les organismes de cautionnement « permettrait de dégager 210 millions d’euros par an, soit une réduction de près de 41% de la facture globale… et 560 € d’économies par dossier de crédit ».

Mieux, « en poussant plus loin la concurrence et en réduisant les marges », l’organisme estime que l’économie réalisable passerait à 270 millions d’euros par an en moyenne, soit l’équivalent de près de 720 € par emprunteur. Une économie non négligeable « dans la période de stress budgétaire qu’est celle de la constitution d’un dossier de crédit et l’achat d’un bien immobilier », a estimé Maxime Chipoy, responsable des études de l'association de consommateurs.

L’Autorité de la concurrence saisie, Bercy alerté

Déterminée à « assainir » le marché, l’UFC s’apprête à saisir pour avis l’Autorité de la concurrence. M. Bazot a rendez-vous avec le ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, dans le courant de la semaine, pour lui exposer la situation. « Nous travaillerons avec les parlementaires si le gouvernement ne nous entend pas », a indiqué le président. L’association demande « l’officialisation d’une liberté effective de choix pour les consommateurs de leur organisme de cautionnement bancaire », avec « interdiction de frais ou de hausse du taux de crédit immobilier en cas de délégation ».

Doutes sur le Crédit logement

Elle milite en outre pour une plus grande transparence dans le fonctionnement du fonds mutuel de garantie, sur lequel le Crédit logement dépose les sommes reçues des clients dont il garantit les prêts immobiliers. « Ce fonds est présenté comme avantageux pour le consommateur, puisque la majorité des sommes versées lui sont restituées à la fin de son crédit », explique l’association. Cependant, il présente « plusieurs caractéristiques qui nous amènent à penser qu’il sert en réalité à privatiser les bénéfices – à l’avantage du Crédit Logement – et à mutualiser les pertes – au détriment des consommateurs. Ainsi, en privant le Fonds des montants colossaux d’intérêts qu’il produit, le Crédit Logement accentue artificiellement les pertes de ce Fonds, et réduit par conséquent les sommes restituées aux consommateurs ».

De même, l’UFC dénonce « l’absence de transparence sur les modalités de fonctionnement » du fonds et « l’absence d’automaticité du remboursement des consommateurs en fin de crédit », les deux contribuant à « entretenir le doute sur l’intérêt du fonds mutuel de garantie pour les clients ».

*Une troisième possibilité existe : l’inscription du privilège de prêteurs de deniers (IPPD), qui est assez peu utilisée

**à 16,50 % par BNP Paribas, le Crédit agricole, LCL et Société générale, 9,5 % par Crédit Mutuel – CIC, 8,5 % par BPCE, 7 % par le Crédit Foncier, 6 % par la Banque postale et 3 % par HSBC

Emmanuel Salbayre