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La titrisation, une menace pour les taux immobiliers ?

La Banque de France préparerait l'opinion publique à un durcissement de la politique

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Le courtier en crédit Cafpi estime que le feu vert de la Banque de France à cette technique de refinancement des banques présente un risque non négligeable.

Alors qu’un consensus semble se dessiner sur une hausse lente et progressive des taux d’emprunt immobiliers, le courtier en crédit Cafpi alerte sur un fait nouveau : l’appel de Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, à développer la titrisation des crédits immobiliers pourrait peser dans la balance, et accélérer l’ampleur du mouvement.

Cafpi rappelle que l’objectif poursuivi par la titrisation - technique de refinancement bancaire qui consiste en un placement d’une partie des crédits à l’habitat accordés auprès d’investisseurs, institutionnels pour l’essentiel - est d’« alléger le poids de la dette dans le bilan des banques ».

« Mais il faut aller plus loin », prévient Philippe Taboret, directeur général adjoint du groupe. Ainsi, « une titrisation, même très partielle – il est question de 20 % à 25 % des crédits accordés – aurait des conséquences sur les taux », dans la mesure où elle obligerait les banques à restaurer leurs marges. « En effet, poursuit le dirigeant, les taux actuels, particulièrement bas, ne permettront pas de dégager une rémunération suffisante pour rendre les titres attractifs. La Banque de France a donc appelé les établissements prêteurs à restaurer leurs marges, quitte à ne plus utiliser le crédit immobilier comme un produit d’appel pour conquérir de nouveaux clients. Cette restauration des marges se traduira par un relèvement des taux d’intérêts ».

Politique moins accommodante

Un relèvement qui semble d’autant plus inévitable que, la titrisation constituant un moyen pour les banques de se procurer des ressources sans passer par le marché du refinancement classique, l’appel à une relance de la pratique pourrait bien être interprété comme un signe avant-coureur d’un durcissement de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE).

« On peut s’interroger sur les raisons qui ont poussé la Banque de France à faire cette annonce en public, reprend Philippe Taboret. N’est-ce pas une manière de préparer l’opinion publique à un futur désengagement ? ». Celui-ci semble « logique, dans le sillage de celui amorcé outre-Atlantique par la Réserve fédérale (Fed) », dont Cafpi avait déjà estimé en début de mois qu’il promettait de tirer les taux d’emprunt immobilier vers le haut.

Pas de risque à ce stade ?

Un peu moins alarmiste, Pascal Beuvelet, président du courtier In&Fi Crédits, note pour sa part que seul un recours massif à la titrisation présenterait un risque réel de remontée des taux. « A ce jour seul le Crédit Foncier, filiale de BPCE, a annoncé sa volonté de réaliser un programme annuel de 2 à 3 milliards d’euros de titrisations, indique-t-il. Il s’agit d’un très faible volume de l’ordre de 1,5 % de la production nationale de crédits à l’habitat. Si la titrisation devait prendre de l’ampleur et dépasser 30% des volumes alors il y aurait une remontée des taux. Mais gageons qu’elle sera très faible et contenue afin de ne pas casser la mécanique de reprise elle-même très ténue. »

Emmanuel Salbayre