BFM Immo
Crédit

Le PTZ+ présente-t-il plus de risques que d'avantages ?

Le PTZ + pénaliserait notamment les classes moyennes

Le PTZ + pénaliserait notamment les classes moyennes - dr

Le prêt à taux zéro nouvelle formule aurait-il été accueilli trop chaleureusement ? Selon Immo Group Consulting, le dispositif, bien que « plus simple » et potentiellement plus efficace que les aides qu’il remplace, n’est pas dénué de risques. Il pourrait notamment être « générateur de nouveaux déséquilibres et d’injustice ».

Plat de résistance de la réforme des aides à l’accession à la propriété immobilière présentée la semaine dernière, le nouveau dispositif se substituera le 1er janvier prochain à l’actuel PTZ, au Pass-Foncier et à la déduction des intérêts d’emprunt immobilier. Réservé aux primo-accédants, il tiendra compte de la localisation du bien qu’il aidera à acheter, de sa performance énergétique ainsi que de son statut - neuf ou ancien.

Pour Jean-Michel Ciuch et Evelyne Colombani, respectivement directeur général et directrice adjointe d’Immo Group Consulting, les aménagements apportés au système d’aide sont « louables, tant dans la construction de l’outil que dans les critères d’attribution ». Ainsi, le PTZ+ présente le premier avantage de sembler « plus simple » à piloter que la conjonction des diverses aides qu’il est appelé à remplacer. « Son efficacité potentielle n’en sera qu’accrue, et son coût budgétaire mieux maîtrisé », poursuivent les deux économistes. Un bon point également en matière de réaménagement des territoires, « la volonté gouvernementale de favoriser les acquisitions en zones tendues [où le besoin en logements est fort et le foncier rare, NDLR] induisant de facto celle de limiter l’étalement urbain et d’inciter le retour en zones urbaines des ménages ».

Caractère micro-local des marchés

Mais c’est à peu près tout… Car le PTZ+ présente également des risques, et pas des moindres, puisque il semble prendre « insuffisamment en compte […] des réalités immobilières, économiques et sociales », poursuit Immo Group Consulting. Dans le viseur des deux économistes, notamment, le découpage de la France en quatre grandes zones géographiques (A, B1, B2 et C), selon la taille des agglomérations. Ce découpage, le même que celui appliqué dans le cadre des dispositifs Robien et Scellier, « méconnaît le caractère profondément micro-local des marchés [immobiliers], et en conséquence, la très grande diversité des situations », dénonce l’étude. Par exemple, dans les zones B2 et C, qualifiées de « non tendues », le découpage « fait abstraction des quartiers proches d’un moyen de transport ou du centre ville, recherchés par les ménages mais aussi plus coûteux ». Le risque est de voir le PTZ+ pénaliser de larges territoires porteurs aujourd’hui d’une très forte demande en primo-accession – les zones C et B2 attirent plus de la moitié des premiers acheteurs.

Un autre problème pourrait provenir du fait que l’offre neuve disponible à l’accession, « lourdement ponctionnée par le Scellier […], reste très insuffisante et mal répartie ». Ainsi, l’offre de logements affiche des niveaux très bas dans les zones tendues, et s’élargit dans les zones non tendues, où le foncier est disponible, mais où la demande s’effrite. « Le manque structurel d’offre neuve ne résulte donc pas d’une insuffisance de demande solvable, mais d’une pénurie de foncier et de contraintes urbanistiques fortes, facteurs de hausse des prix et de contingentement de la production ». La politique de relance de la demande ne serait donc pas adaptée à la question que le PTZ+ entend résoudre. ImmoGroup Consulting recommande d'agir également sur l'offre, via « une réforme audacieuse du Code de l'Urbanisme », l'idée étant d'« exploiter les gisements existants de droits à construire en zones urbaines, ainsi que dans les secteurs semi-ruraux ou ruraux ».

Des classes moyennes pas assez solvabilisées

Les dirigeants d'Immo Group Consulting craignent en outre que le nouveau PTZ ne pénalise plus encore les classes moyennes, dont le gouvernement a pourtant affirmé qu’elles étaient le principal destinataire de la réforme. Selon les deux économistes, le problème est que celle-ci ne prend pas suffisamment en considération les écarts entre les prix de l’ancien et du neuf – moins énergivore mais également plus cher, et donc hors de portée pour la plupart des acquéreurs. « 70 % des ménages disposent d’un revenu brut mensuel inférieur ou égal à 2 700 euros », explique Jean-Michel Ciuch. Ainsi, hors Paris et sa première couronne ouest, les trois quarts environ des familles candidates à l’acquisition ne peuvent investir plus de 1 500 euros à 3 000 euros le mètre carré, ce qui correspond peu ou prou à l’essentiel du marché de l’ancien. Or les prix du neuf s’inscrivent quant à eux, très généralement entre 2 500 euros et plus de 4 500 euros le mètre carré habitable ». Des différences considérables que le nouveau PTZ, pourtant destiné à orienter les ménages vers les zones urbaines et les logements neufs, ne réduirait pas suffisamment, malgré la revalorisation des plafonds de prêts. « L’augmentation du PTZ ne devrait pas être un outil suffisant de resolvabilisation des classes moyennes et modestes, leur capacité réelle d’achat ne devant être que marginalement améliorée ». A contrario, la réforme devrait plutôt favoriser les classes supérieures.

François Alexandre