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Avis d Experts

Bail commercial : Fixation du loyer en renouvellement pour une activité de bar-restaurant-hôtel

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En l'absence de monovalence, les conditions du déplafonnement et modalités de calcul du loyer selon la branche d'activité doivent être appliquées.

La configuration des locaux permettant l'exploitation de deux activités autonomes d'hôtel (ancien hôtel préfecture) d'une part, et de restaurant - bar d'autre part, ayant chacune une clientèle distincte, la monovalence a été écartée par le premier juge.

La fixation du loyer du bail renouvelé relève alors des dispositions de droit commun, en l'occurrence les articles L. 145-33 et L 145-34 du Code de commerce.

La Cour s'est interrogée sur le motif de déplafonnement invoqué par le bailleur (modification notable des facteurs locaux de commercialité), en relevant successivement :

- L'expert a indiqué que les locaux sont situés à Boulogne-Billancourt (92) dans un quartier d'habitation ordinaire avec une petite commercialité de quartier d'intérêt purement local,

- Les données recueillies en cours d'expertise pour la période allant du 1er janvier 1993 au 30 septembre 1993 concernent une évolution (peu conséquente) de la population et une augmentation des constructions, les nouveaux immeubles venant relayer un habitat ancien moins dense, les nouvelles constructions ou le remplacement d'immeubles anciens, voire vétustes, n'ayant pu que contribuer à améliorer l'environnement du commerce « ce qui ne peut qu'être profitable à un commerce de restaurant - bar, même si le quartier reste modeste par rapport à d'autres quartiers de Boulogne... ».

- Cependant, la modification notable des facteurs locaux de commercialité est écartée pour cette branche d'activité, dès lors que l'expert a relevé que l'activité de bar - restaurant avait chuté de façon sensible pendant le bail à renouveler, la clientèle ouvrière qui était celle du restaurant étant partie.

- Ni l'évolution de la population, ni l'augmentation des constructions nouvelles, qu'elle soit notable ou non, ne peuvent selon la Cour avoir une incidence sur l'activité d'hôtel exploité dans les lieux loués, la clientèle étant composée pour partie de personnes envoyées par les mairies de Boulogne et les communes avoisinantes, ainsi que par la DDASS, une autre partie constituée de personnes en attente d'un logement social et une troisième partie minoritaire étant une clientèle de passage.

- Dès lors le jugement est réformé en ce qu'il a calculé le loyer applicable à la partie hôtel en considération de la valeur locative, et non par référence au loyer devant résulter de la seule indexation.

Cette décision appellent les observations suivantes :

*D'une part, le fait que le loyer soit plafonné en renouvellement n'est pas de nature à exclure la recherche nécessaire de la valeur locative pour le cas où il serait allégué par le preneur qu'elle s'avère inférieure au loyer-plafond découlant de la variation indicielle : dans cette hypothèse, la valeur locative de la partie hôtelière doit logiquement être déterminée par la méthode hôtelière qui n'est pas nécessairement tributaire de la monovalence, mais découle de l'activité effectivement exercée dans cette partie des lieux loués.

La référence faite aux indices dont la variation permet le calcul du loyer-plafond selon l'article L. 145-34 du Code de commerce ne constitue donc en aucun cas une indexation.

* D'autre part, en présence de plusieurs activités exploitées séparément dans les mêmes locaux en conformité avec le bail, l'incidence des facteurs locaux de commercialité, de même que le caractère notable de leur évolution doivent être examinés au regard de chacune d'entre elles : c'est ce qui résulte implicitement mais nécessairement d'un récent arrêt de la Cour de cassation (Cass. 3e civ., 8 déc. 2010 : Rev. Administrer févr. 2011, p. 25, obs. D. Lipman-Boccara), faisant grief à la Cour d'appel de n'avoir pas pris en compte chacune des activités exercées dans l'ensemble des lieux loués tant par la locataire principale que son sous-locataire.

CA Versailles, 12e ch., sect. 2, 13 janv. 2011, n°09/07180 Belkacemi c/ SCI Mikado et Sté Sofiam

Gabriel Neu-Janicki