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L'arrivée des GAFA sur le marché immobilier opportunité ou menace ?

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L’arrivée des GAFA sur le marché de l’immobilier est une réalité. Opportunité ou menace ? Cela va dépendre de la stratégie que ces mastodontes vont mettre en place. Avec les milliards à leur disposition, les GAFA pourraient en effet disrupter le marché, obligeant les acteurs de l’immobilier à revoir leur modèle économique.

Le marché immobilier a déjà bien évolué ces dernières années, cependant, nous sommes restés sur le même modèle : un acquéreur est mis en relation avec un propriétaire le plus souvent par l’intermédiaire d’un professionnel de l’immobilier.

Alors comment ces géants pourraient transformer l’immobilier ?

Les GAFA, les nouveaux portails de demain ?

Une première stratégie pourrait être de devenir un intermédiaire de mise en relation entre un acheteur et un vendeur ou encore entre locataire et propriétaire, avec notamment le partage d’annonces immobilières. Ce positionnement viendrait donc directement concurrencer l’ensemble des portails immobiliers.

Aucun portail immobilier actuel ne pourrait lutter contre l’arrivée des GAFA car ils ont une connaissance client inégalable. En effet, Google et Facebook connaissent tout de nous (en atteste les dernières actualités concernant Facebook) ! Notre capacité d’achat, le nombre d’enfants que nous avons, nos restaurants préférés, nos loisirs, nos centres d’intérêt, nos goûts, les villes appréciées, la décoration recherchée… Cette connaissance permettrait un ciblage ultra précis pour les professionnels de l’immobilier afin de promouvoir leurs annonces. Ils pourraient ainsi sélectionner une audience très ciblée définie en fonction de critères multiples et montrer une annonce dédiée à cette catégorie de clients potentiels.

Cette première possibilité serait donc une opportunité pour les professionnels de l’immobilier, qui disposeraient simplement d’un nouvel outil pour valoriser leurs annonces immobilières auprès de prospects extrêmement bien ciblés.

En ce sens, Facebook a déjà mis un pied à l’étrier avec le lancement de sa Marketplace dès octobre 2016 en Amérique du Nord et en août 2017 en France. Cette nouvelle fonctionnalité propose de mettre en relation des acheteurs et des vendeurs via des petites annonces en ligne. 18 millions d’objets auraient déjà été vendus via Marketplace aux Etats-Unis, dont… des biens immobiliers !

Google, de son côté, a carrément racheté ou investi majoritairement dans des portails immobiliers ces dernières années (Commonfloor en Inde ou Auction.com aux Etats-Unis. Certes les portails immobiliers représentent une manne de données sur les utilisateurs mais Google compte-t-il s’arrêter ici ou s’immiscer jusque dans la conclusion des actes de vente ou de location.

Les GAFA, acteur de la transaction et de la location ?

La seconde stratégie envisageable serait, que les GAFA deviennent des acteurs à part entière de la transaction ou de la location immobilière. Cela en gérant, en plus de la mise en relation, le transfert de fonds. Une inquiétude qui se durcit, car Facebook a lancé, en novembre 2017, en France sa fonctionnalité de « transfert d’argent » via Messenger.

Autre fait notable, Google a largement investi dans l’entreprise TenX (propriétaire du portail Auction.com) qui est un acteur majeur de la dématérialisation de la transaction immobilière. On imagine alors la métamorphose du marché si Google se met à utiliser pleinement les capacités de ces 2 sociétés : un portail d’annonce leader et une société qui permet d’acheter un bien en ligne…

Cette deuxième hypothèse pourrait amener à une réelle disruption du marché immobilier et concurrencer les agences immobilières.

Cependant, la France a sans le savoir ou à dessein mis des bâtons dans les roues des GAFA. En effet, ils vont être confrontés aux difficultés administratives et juridiques de notre bon vieux pays. Ces dernières sont tellement évolutives et lourdes, que les agences immobilières ont finalement moins de soucis à se faire. Ce qui les contraint et les ralenti dans leur quotidien, assure en fait une certaine protection du métier. De la même manière, la complexité de la fiscalité française préserve la profession et lui confère un véritable savoir-faire que les particuliers eux-mêmes reconnaissent.

Le bouleversement du marché a déjà été amorcé à travers l’émergence de nouveaux acteurs américains. C’est le cas par exemple d’Opendoor qui achète, en seulement quelques jours, des biens immobiliers pour ensuite les revendre directement (délai minimum en France : 3 mois). Le succès d’Opendoor repose sur l’analyse de données agrégées et d’un formulaire très détaillé rempli par les propriétaires.

Si Opendoor a réussi à générer 50 millions de dollars de chiffre d’affaires en seulement 4 ans avec une valorisation à 1,1 milliards de dollars, on imagine ce qu’un GAFA pourrait faire s’il se lance sur ce modèle !

En France, certaines start-up tentent elles aussi de transformer le marché comme par exemple la société Homeloop, copie française d’Opendoor.

Les français sont-ils cependant prêts à confier leur bien, leur projet de vie à une entité dématérialisée ? Sont-ils prêts à vendre leur bien légèrement en dessous du prix du marché ?

Olivier Bugette