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Le droit de préemption urbain (DPU)

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En France, le droit de préemption urbain est l'un des droits de préemption prévus par le droit public. Il est attribué aux communes dotées d'un plan local d'urbanisme, d'un plan d'occupation des sols ou d'une carte communale.

Il ne peut s'appliquer que dans les zones urbaines ou d'urbanisation future, ainsi que dans les secteurs sauvegardés.

Ce droit, qui est une simple faculté, permet à la commune d'acquérir prioritairement un bien foncier ou immobilier lorsque celui-ci est sur le point d'être vendu. Ainsi, lorsqu'un propriétaire vend un terrain ou une maison à un acheteur, avant que la vente ne soit conclue, la commune doit s'exprimer sur sa volonté d'user de son droit de préemption. Si elle choisit de le faire, elle devient prioritaire pour l'acquisition du bien. Sinon, la vente suit son cours normal.

La décision d'instituer un DPU relève de la compétence du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'EPCI (établissement public de coopération intercommunale).

Grâce au droit de préemption urbain, une commune peut ainsi acquérir des biens dont elle a besoin pour mener à bien ses projets d'aménagement (exemple : maison située sur le tracé d'un projet de voirie), sans avoir recours à l'expropriation, et son caractère brutal.

Le titulaire de ce droit est en principe soit la commune, soit l'EPCI, sachant que ces derniers ont la possibilité de le déléguer au profit de l'Etat, d'une collectivité locale, d'un établissement public... Il existe certains cas d'exclusion du DPU, soit à l'initiative de la commune, par exemple lorsqu'un lotissement a été autorisé ou une zone d'aménagement concertée créée, soit d'origine légale, savoir:

  • lors de la vente d'un ou plusieurs lots de copropriété constitués par seul local à usage d'habitation, professionnel ou mixte, lorsque le Règlement de copropriété de l'immeuble a plus de dix ans,
  • lors de la vente d'un immeuble bâti, quelle que soit sa destination, pendant un délai de 10 ans à compter de son achèvement,

l

  • ors de la cession de parts ou d'actions de sociétés d'attribution ou coopératives de construction donnant vocation à l'attribution d'un local d'habitation, professionnel ou mixte, et lors de la cession de la majorité des parts d'une SCI.

Toutefois, ces exclusions peuvent être supprimées lorsque la commune a institué ce que l'on appelle un "droit de préemption renforcé" sur son territoire.

Précisons également que tout propriétaire d'un bien soumis au DPU peut en demander l'acquisition au titulaire du droit, c'est ce que l'on appelle le "droit de délaissement". Si la mairie, qui dispose d'un délai de deux mois pour répondre, refuse ou s'abstient de répondre, le propriétaire pourra réaliser la vente sans avoir à nouveau à proposer la vente au titulaire du DPU.

Si la commune décide d'acquérir le bien, elle devra régler le prix au plus tard 6 mois après sa décision.

En l'absence de paiement à l'issue de ce délai, le bien est rétrocédé à son propriétaire, qui pourra à nouveau le vendre sans avoir à purger le droit de préemption.

S'agissant des biens soumis au droit de préemption, sont en principe visés les immeubles ou parties d'immeubles, tels que : terrains nus, maisons individuelles, immeubles de rapport. A contrario sont donc exclus tous les biens et droits mobiliers autres que les droits sociaux donnant vocation à l'attribution d'un immeuble. Existe en outre des exclusions expresses, telles que par exemple les immeubles faisant l'objet d'une vente d'immeuble à construire, ou encore ceux faisant l'objet d'une mise en demeure d'acquérir.

Quant aux mutations soumise au DPU, il s'agit de toutes les cessions à titre onéreux telles que ventes amiables, échanges, adjudications volontaires, apports en société, cessions de droits indivis sur un immeuble, sauf lorsqu'elles sont consenties à l'un des coindivisaires, licitations faisant cesser l'indivision, et contrats de location-accession à la propriété immobilière. Sont en revanche exclues toutes les mutations à titre gratuit, les apports sans contrepartie, les transferts de jouissance, les opérations de fusion, scission ou apport partiel d'actif, les cessions de droits indivis à un coindivisaire, les partages de communauté et de succession, les cessions au bénéficiaire d'une déclaration d'utilité publique et les cessions de biens compris dans le cadre d'un plan de cession de l'entreprise.

S'agissant de la procédure, celle-ci débute par l'envoi à la mairie d'une "déclaration d'intention d'aliéner" (DIA), généralement établie par le Notaire.

La mairie dispose alors d'un délai de 2 mois pour y répondre, étant précisé que l'absence de réponse dans ce délai vaut renonciation.

Sa décision peut être soit de refuser d'acquérir le bien, soit de l'acquérir au prix indiqué, soit offrir d'acquérir à un autre prix, sachant que dans ce cas, le propriétaire dispose également d'un délai de deux mois pour répondre, en indiquant qu'il accepte le prix, ou qu'il maintient celui fixé dans la DIA, ou qu'il renonce. A défaut d'accord sur le prix, le juge de l'expropriation peut être saisi pour le fixer.

Le droit de préemption peut être utilisé afin de réaliser une ou des actions ou opérations d'aménagement visées par l'article L300-1 du code de l'urbanisme, en vue de mettre en œuvre :

  • un projet urbain,
  • une politique locale de l'habitat,
  • d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques,
  • de favoriser le développement des loisirs et du tourisme,
  • de réaliser des équipements collectifs,
  • de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain,
  • de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti.

Ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation de ces actions ou opérations d'aménagement.

Depuis la Loi no 2006-685 du 13 juin 2006, le DPU peut également être utilisé pour assurer le maintien des locataires dans un immeuble d'habitation, afin de permettre une réaction contre les ventes d'immeubles dites "à la découpe".

Un DPU particulier est instauré de plein droit par l'article L 616 du code de la Construction et de l'habitation, afin de permettre le maintien dans les lieux d'une personne dont l'habitation principale fait l'objet d'une saisie immobilière.

Enfin, il est utile de préciser que la sanction de l'absence de DIA est la nullité relative de l'aliénation.

L'action en nullité se prescrit par 5 ans à compter de la publication de l'acte authentique. Une action en responsabilité peut également être intentée contre le vendeur et contre le Notaire.

Nicolas Fouchérand