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Le marché des bureaux tente de prospérer loin de Paris

Les bureaux en région, un marché qui sort de sa niche

Les bureaux en région, un marché qui sort de sa niche - Joel Saget - AFP

Sur les 19 milliards d'euros investis l'an dernier dans les bureaux, 16,4 milliards concernent l'Île-de-France. Mais peu à peu, les investissements progressent dans certaines métropoles régionales.

Le marché des bureaux veut aussi évoluer loin de la capitale. Les investissements progressent peu à peu en régions mais restent largement dominés par l'Île-de-France: par contraste avec des pays comme l'Allemagne, ils reflètent la domination historique de la capitale sur la France. "On a eu des regards condescendants", reconnaît auprès de l'AFP Philippe Rosio, PDG de Foncière Inea qui, depuis sa création en 2006, privilégie des achats de bureaux hors de la capitale.

À quelque 750 millions d'euros, son groupe détient un portefeuille modeste par rapport aux géants français: Gecina et Icade possèdent respectivement 16 et 8,5 milliards d'euros de bureaux. Inea fait de la décentralisation un choix stratégique, quand ses deux grands concurrents concentrent leur patrimoine de bureaux à Paris et ses alentours, à l'image du marché.

"Ce n'est plus un marché de niche"

Sur presque 19 milliards d'euros investis l'an dernier dans les bureaux, 16,4 milliards concernent l'Île-de-France, selon des chiffres du cabinet immobilier JLL. Pourtant, les bureaux provinciaux, "ce n'est plus un marché de niche", assure Philippe Rosio. "Une petite dizaine de métropoles régionales ont une croissance supérieure à Paris ou l'Île-de-France, tandis que les loyers de bureaux sont trois ou quatre fois moins chers."

De fait, les bureaux régionaux attirent de plus en plus les investissements: selon JLL, la part de l'Île-de-France a baissé à 86% l'an dernier, contre 94% en 2010. Ce report s'explique par une "valorisation relativement attractive", avance auprès de l'AFP Mahdi Mokrane, directeur de la recherche chez le fonds immobilier LaSalle, composante de JLL.

"Ces dernières années, à Paris, on a vu des prix très élevés et des taux de rendements qui se sont compressés très fortement", détaille-t-il. Autrement dit, le niveau des loyers devient moins intéressant par rapport aux montants investis dans le site. "Les métropoles régionales ont également vu une compression mais moins importante, donc elles ont retrouvé un attrait en terme de valorisation pour un investisseur", ajoute-t-il.

Un marché francilien proche de la surchauffe

Jusqu'où cette dynamique peut-elle aller ? Soit il ne s'agit que d'une opportunité ponctuelle face à un marché francilien proche de la surchauffe. Soit c'est la promesse d'un changement structurel après des décennies de politiques de décentralisation.

Entamées par Gaston Defferre, sous la présidence de François Mitterrand, relancées au début du deuxième quinquennat de Jacques Chirac, elles se retrouvent aujourd'hui dans la "cohésion des territoires" qui se voit dédier un grand ministère dans l'actuel gouvernement. "Le déséquilibre, ne serait-ce qu'en termes de taille, est tellement important que le rééquilibrage va prendre du temps", admet Mahdi Mokrane, opposant la France à une Allemagne "polycentrique".

Les bureaux germaniques se partagent assez équitablement entre sept villes: Munich, Berlin, Francfort, Hambourg, Düsseldorf, Cologne et Stuttgart. "Aucune n'a un marché de la taille de Londres ou Paris mais elles sont toutes assez dynamiques, avec chacune des sièges sociaux", souligne Mahdi Mokrane.

En France, les récents mouvements des grandes foncières, marqués par une simplification du paysage, ne donnent pas de réponse simple sur l'avenir de l'équilibre entre Île-de-France et le reste du territoire. L'an dernier, Icade a racheté ANF, une foncière plus petite et surtout présente hors de Paris. L'opération lui permet de régionaliser un peu - 5% - de son patrimoine de bureaux.

"Etre présent(e) dans les grandes métropoles régionales"

En revanche, à l'issue de l'autre grande opération récente chez les foncières, le rachat en 2017 d'Eurosic par Gecina, celle-ci s'est empressée d'afficher un recentrage "autour des zones les plus dynamiques de la région parisienne". Elle a notamment annoncé cet été la vente de près de 800 millions d'euros d'immeubles en régions.

De son côté, la foncière Covivio "a conservé l'idée d'être présent(e) dans les grandes métropoles régionales", explique à l'AFP son directeur général, Christophe Kullmann. "Ça représente 900 millions d'euros sur 6,5 milliards de bureaux en France. On est assez heureux avec cette proportion-là."

Covivio portait historiquement dans son nom une vocation décentralisatrice: c'est l'ancienne Foncière des Régions. Reste qu'elle a changé de nom cette année, prenant acte d'une expansion internationale ainsi que d'une diversification hors des bureaux. Pour ces derniers, "on a arbitré l'essentiel de nos actifs dans les petites villes, dont nous sommes sortis, mais nous resterons présents dans les grandes métropoles", résume Christophe Kullmann, reconnaissant que le portefeuille français de bureaux s'inscrit aujourd'hui dans le "prisme" d'une domination francilienne.

Avec AFP

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