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Aides au logement: la Cour des comptes démonte les mesures du gouvernement sur les APL

Le système des aides au logement serait pas assez lisible

Le système des aides au logement serait pas assez lisible - Thomas Coex - AFP

La Cour des comptes publie son rapport annuel avec tout un chapitre dédié aux aides personnelles au logement. Gel, sous-indexation, baisse de 5 euros pour tout le monde et baisse spécifique dans le parc social, la Cour multiplie les critiques contre l’ensemble des mesures porté par l’exécutif.

"Problème d’équité" ou "absence de vision précise", les mots de la Cour des comptes sont durs. 6,6 millions de ménages bénéficient des aides au logement. Pourtant la Cour des comptes émet des critiques à leur encontre. Ces aides - les allocations de logement familiales (ALF), les allocations de logement sociale (ALS) et les aides personnalisées au logement (APL) – ont pour but de diminuer la charge des dépenses de logement des locataires qui en bénéficient. La Cour des comptes, dans son rapport annuel publié ce mardi, rappelle que leur mode de financement a été clarifié et simplifié entre 2015 et 2016. "L’État a repris sur son budget la contribution auparavant apportée par le fonds national des prestations familiales, qui relève de la sécurité sociale. Depuis 2016, il apporte la plus grande part du financement, soit un montant de plus de 15 milliards d'euros en 2016, qui devrait être ramené en 2020 à 12 milliards d'euros selon le PLF (projet de loi de finances, NDLR) pour 2020".

Pour limiter ces dépenses, plusieurs mesures ont été prises. Il y a eu la sous-indexation des APL par rapport à l'inflation mais aussi et surtout la fameuse baisse généralisée de 5 euros pour tous les bénéficiaires. Cette dernière mesure représente 400 millions d'euros d'économies en année pleine. Mais la Cour des comptes note aussi que ces baisses d’APL "soulèvent surtout des interrogations, notamment en termes d’équité" puisqu'elles "se sont appliquées uniformément, quelle que soit la situation sociale et financière des bénéficiaires, y compris les ménages les plus modestes".

La Cour des comptes ajoute : "En ce qui concerne la prise en compte du patrimoine, le choix a été fait, a posteriori, de n’appliquer cette mesure qu’aux nouveaux entrants, en raison des difficultés rencontrées pour collecter les informations nécessaires auprès des allocataires. Mais ce choix apparaît contraire aux dispositions législatives et réglementaires et met en lumière l’insuffisante préparation de cette mesure. Cette pratique irrégulière présente un risque juridique pour l’État et les organismes prestataires".

Baisse des aides dans le parc social

L'autre grande mesure sur les APL qui fait elle aussi l'objet de critiques de la Cour des comptes concerne le parc social. Il s'agit de la baisse des aides pour les locataires HLM que le gouvernement a décidé de compenser pour les bénéficiaires en forçant les bailleurs sociaux à baisser d'autant le niveau des loyers. La fameuse Réduction du Loyer de Solidarité (RLS). La Cour pointe du doigt les "tensions qui en ont résulté avec le monde du logement social, sur lequel se répercute finalement la charge". "En l’absence de vision précise à moyen terme" écrit la Cour des comptes, cette mesure oblige et obligera encore le gouvernement à renégocier avec le monde HLM pour ajuster le dispositif. Ce qui réduit la fiabilité des projections budgétaires pour l’État et surtout indique la Cour "complexifie la stratégie d’investissement des bailleurs sociaux".

La Cour des comptes dénonce également la source d’inégalités de traitement. "La Cour a constaté que l’aide au logement continue d’avoir un effet moins favorable, à montant global de ressources comparable, sur la situation des personnes en activité que sur celle de personnes recevant des revenus de transfert".

Elle pointe également du doigt la situation des étudiants. Beaucoup des étudiants qui bénéficient des APL étudiantes sont encore rattachés au foyer fiscal de leur parent. La Cour estime donc qu'il faut obliger les parents des étudiants en question à choisir l'un ou l'autre. Recommandation qui avait déjà était formulée par la Cour en 2015 mais qui n'a donc toujours pas été suivie.

Complexité des dispositifs

La Cour dénonce le fait que la complexité des aides continue d’engendrer des indus et des risques de fraude ainsi que des coûts de gestion élevés. "Le barème des aides n’a été ni simplifié ni refondu. Aucune des évolutions des modalités précédemment recommandées par la Cour n’est intervenue en dehors de la réforme de la base des ressources prises en considération pour les APL, qui interviendra en 2020. Le barème a seulement été modifié pour prendre en compte les différentes mesures budgétaires adoptées ces dernières années". Cette complexité persistante est à l’origine d’indus importants. En 2018, les indus concernant les aides au logement représentaient plus d'un milliard d'euros.

Une mesure portée par l’actuel gouvernement trouve tout de même grâce aux yeux de la Cour des comptes. Il s'agit de la prise en compte des revenus en temps réel pour le calcul des APL, qui devait rapporter près d'1,2 milliard d'euros d'économies en 2019. Le problème, ce sont les retards de mise en œuvre de cette réforme prévue désormais pour avril de cette année, rappelle la Cour, qui met aussi en garde sur l'enjeu de cette mesure : "Il s'agit bien d'améliorer l'équité du système", insiste-t-elle évoquant notamment une prise en compte "plus rapide et plus juste des situations de perte d’emploi ou de reprise d’activité".

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Par Diane Lacaze et Marie Coeurderoy

Qualite-Logement.org