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Après 9 mois de squat, ces propriétaires récupèrent leur maison près de Rennes en piteux état

La procédure d'expulsion est particulièrement complexe en France (photo d'illustration).

La procédure d'expulsion est particulièrement complexe en France (photo d'illustration). - Bohed / Pixabay

Les propriétaires affirment qu'ils vont devoir débourser plusieurs milliers d'euros pour le déblaiement de la demeure squattée.

C'est la hantise de nombreux propriétaires : voir sa maison squattée pendant des mois voire des années et la récupérer dans un état déplorable. Cette mésaventure est arrivée à une fratrie d'héritiers pour une maison située au lieu-dit la Besnerais à La Chapelle-des-Fougeretz près de Rennes, comme le rapporte Ouest-France dans son édition de lundi.

A la mort de leurs parents en 2016, les enfants héritent de cette maison familiale de 110 m2 construite dans les années 1970. Mais avant d'avoir pu décider de ce qu'ils allaient faire exactement de la maison, qui est alors inoccupée, "trois femmes, de nationalité roumaine, et leurs enfants" y élisent domicile, selon les informations du quotidien. Le squat commence ainsi en août 2018.

Les propriétaires se lancent alors dans une procédure d'expulsion mais celle-ci n'aboutit pas. "Personne n'est jamais venu voir comment les squatteurs vivaient, mais les juges leur donnaient raison puisque la maison n'était pas habitée", explique ainsi l'un des propriétaires au quotidien breton.

Carcasses de voitures et caravanes abandonnées

Les squatteurs viennent finalement de quitter l'habitation, près de 9 mois après leur entrée dans les lieux. Mais les propriétaires ont retrouvé la demeure dans un état lamentable. Ouest France évoque une dizaine de carcasses de véhicules abandonnées dans le jardin, ainsi que quatre camionnettes pleines de matelas et trois caravanes. Par ailleurs, de nombreux détritus et gravats jonchent le sol et des toilettes sèches ont été improvisées à l'extérieur. Il y en aurait pour plusieurs milliers d'euros de déblaiement, selon les propriétaires.

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Pendant l'occupation illégale des lieux, les familles de squatteurs auraient mentionné explicitement les textes de loi les protégeant en les affichant sur la porte de la maison, menaçant les personnes entrant dans les lieux de poursuites judiciaires. La loi Elan a certes facilité les expulsions de squatteurs dans certains cas. Mais la procédure reste bien souvent très complexe et longue.

Une procédure d'expulsion toujours très longue et complexe

L'article 226-4 du Code pénal indique ainsi que "l'introduction dans le domicile d'autrui à l'aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende". "Le maintien dans le domicile d'autrui à la suite de l'introduction mentionnée au premier alinéa, hors les cas où la loi le permet, est puni des mêmes peines", ajoute-t-il. Mais il s'agit des cas où le lieu est considéré comme un domicile.

Par ailleurs, l'article L412-6 du Code des procédures civiles d'exécution précise qu'en matière d'expulsion, une fois tous les délais et les recours purgés, "il est sursis à toute mesure d'expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu'au 31 mars de l'année suivante". Autrement dit, la trêve hivernale s'applique aux squatteurs par principe. Cependant, depuis la loi Elan, "par dérogation (…), ce sursis ne s'applique pas lorsque la mesure d'expulsion a été prononcée en raison d'une introduction sans droit ni titre dans le domicile d'autrui par voies de fait", détaille le même article du Code des procédures civiles d'exécution. De même, le délai de deux mois pour quitter les lieux après la délivrance du commandement est supprimé dans ce cas. Mais là encore, il s'agit des biens squattés qui faisaient office de domicile (pour un locataire ou un propriétaire).

Dans tous les autres cas, c'est la procédure d'expulsion "classique" qui s'applique, avec une trêve hivernale qui s'applique aux squatteurs. Cette procédure, détaillée notamment par les articles L411-1 et L412-1 (et suivants) du Code des procédures civiles d'exécution, est extrêmement complexe à mettre en œuvre. Il peut alors s'écouler jusqu'à deux ans avant que les forces de l'ordre ne soient autorisées à déloger effectivement les squatteurs. Tout propriétaire qui voudrait se faire justice lui-même en récupérant par ses propres moyens les locaux risque alors des poursuites judiciaires. Ce qui donne régulièrement lieu à des situations ubuesques.

Jean Louis Dell'Oro