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Guerre judiciaire contre Airbnb à Paris : les hôteliers saluent la stratégie d'Hidalgo

Airbnb fait l'objet d'une nouvelle procédure judiciaire

Airbnb fait l'objet d'une nouvelle procédure judiciaire - AFP

Deux organisations représentant les professionnels du tourisme et de l'hôtellerie se réjouissent du nouveau front judiciaire ouvert par la mairie de Paris contre Airbnb.

La mairie de Paris ne lâche rien face à Airbnb et les hôteliers apprécient. La ville, dirigée par Anne Hidalgo, vient de lancer une nouvelle procédure judiciaire contre le géant de la location saisonnière, comme l'a révélé le JDD. En cause : un peu plus de 1.000 annonces dans la capitale qui ont été mises en ligne sans numéro d'enregistrement. Ce qui est illégal et est passible de 12.500 euros pour chaque annonce non conforme. Airbnb risque donc jusqu'à 12,5 millions d'euros d'amende.

"La Mairie de Paris a pris une décision courageuse et nécessaire. La loi Elan doit être respectée dans l’intérêt de tous et notamment des habitants", a estimé dans un communiqué commun avec le GNI Serge Cachan, président de l’AhTop, l'Association pour l'hébergement et un tourisme professionnels. "Nous remercions la Maire de Paris qui prends ce sujet des annonces illégales à bras le corps et joint les actes à la parole", a également salué Didier Chenet, président du Groupement National des Indépendants de l'hôtellerie et de la restauration (GNI).

"Grâce à l’action des agents municipaux, un premier travail – qui demeure incomplet – a permis de repérer 1.010 annonces sans numéro d’enregistrement et donc illégales dans les arrondissements les plus durement touchés par la location touristique (du 1er au 7ème arrondissement, ainsi que le 18ème)", souligne le communiqué. "Cette "première salve d’annonces illégales" met en lumière une nouvelle dérive des plateformes qui ne respectent pas la loi. En réclamant aujourd’hui à Airbnb le paiement d’une amende de 12.650.000 euros, la Mairie de Paris réaffirme sa volonté de poursuivre la lutte contre les effets pervers des plateformes. Elle envoie un signal fort aux Parisiens qui subissent de plein fouet les conséquences de leurs activités : raréfaction de l’offre de logements, hausse de leurs loyers, nuisances en tout genre", ajoutent l’AhTop et le GNI.

Sanctions renforcées avec la loi Elan

La loi Elan, votée en fin d'année dernière, est venue renforcer les sanctions contre les locations illégales sur les plateformes de type Airbnb. En effet, les communes de plus de 200.000 habitants ou celles appartenant à une zone urbaine de plus de 50.000 habitants ont le droit de mettre en place des restrictions pour la location saisonnière (déclaration préalable, numéro d'enregistrement, obligation de changement d'usage pour les résidences secondaires...). Dans ces villes, "toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme qui est déclaré comme sa résidence principale ne peut le faire au-delà de cent vingt jours au cours d'une même année civile, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure", précise l'article 145 de la loi Elan.

Par ailleurs, dans les villes qui ont mis en place un enregistrement préalable, toutes les annonces doivent comporter le numéro d'enregistrement du logement auprès de la mairie, sous peine d'une amende de 12.500 euros par annonce illégale pour la plateforme.

L'assignation en justice d'Airbnb par la mairie de Paris sur ce point est le dernier volet d'une longue bataille judiciaire entre la ville, la plateforme de location de courte durée et ses utilisateurs qui ne respectent pas la réglementation. En novembre, la Cour de cassation a ordonné le renvoi à la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) afin de savoir si le droit français est bien conforme à la législation européenne et à sa directive "services". La CJUE a 12 à 18 mois pour se prononcer pour savoir si le droit français n'est pas contraire au principe européen de libre prestation de services dans le cas des locations de courte durée.

Multiplication des procédures judiciaires

D'ailleurs, alors que 2,1 millions d'euros d'amendes avaient été prononcées contre des propriétaires pour locations saisonnières illégales dans la capitale en 2018, le Tribunal de grande instance (TGI) de Paris a ordonné la suspension des amendes dans l'attente de la décision de la CJUE.

Par ailleurs, trois professionnels de l'hébergement (Hôtelière Turenne, l'AhTOP et Valhotel) ont également ouvert un front judiciaire contre Airbnb. Là encore, ce sera à la CJUE de se prononcer pour savoir si le géant américain peut être considéré comme un simple service ou comme un agent immobilier en France, avec toutes les obligations afférentes.

Enfin, dans une autre affaire, le Conseil constitutionnel a été saisi afin de savoir si les agents municipaux ont bien le droit de pénétrer dans un logement, en l'absence des propriétaires, dans le cadre d'une location touristique de courte durée. Les propriétaires d'un local à usage d'habitation à Paris estiment en effet que cela contrevient aux principes de protection de la liberté individuelle et d'inviolabilité du domicile garantis par la Constitution.

Jean Louis Dell'Oro