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Interview de Gérard Brémond, président-directeur général et fondateur de Pierre & Vacances

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Gérard Brémond est président-directeur général et fondateur de Pierre & Vacances

La Vie Immobilière : Comment se porte le marché de l'immobilier de loisirs ?

Gérard Brémond : Très bien. C'est un marché qui s'inscrit dans le sillage de l'immobilier d'habitation, dans un contexte général qui reste porteur. D'abord parce que les taux d'intérêt, même s'ils remontent légèrement, sont toujours à des niveaux attrayants. Ensuite, et surtout, parce que la demande est très forte. D'un côté, l'explosion de la famille traditionnelle et l'allongement de la durée de vie accentuent la nécessité d'un lieu où se retrouver pendant les vacances ; de l'autre, le développement des compagnies aériennes raccourcit les distances intra-européennes. Indiscutablement, ces éléments soutiennent de façon durable l'activité. Le problème, c'est que l'offre en face fait cruellement défaut. La principale difficulté aujourd'hui est de trouver des terrains dans les meilleurs sites touristiques français, à la montagne et sur le littoral.

La Vie Immobilière : Où se situent actuellement les gisements de valorisation ?

Gérard Brémond : Les flux touristiques mondiaux sont censés doubler d'ici à 2020. Or, 80 % des flux touristiques français sont concentrés sur 20 % du territoire. Le potentiel se situe donc aujourd'hui dans la France du terroir. Au sud de la Loire, bien sûr, mais également au nord. Les sites les plus prometteurs bénéficieront d'une desserte par une autoroute, d'une gare TGV et d'un aéroport low-cost. Regardez la région de Brive, par exemple : qui aurait pensé il y a cinq ans qu'elle allait être si prisée ? A l'étranger, l'Espagne et le Maroc offrent des opportunités d'investissement considérables.

La Vie Immobilière : Qui sont les acquéreurs de vos résidences de tourisme ?

Gérard Brémond : A 80 %, ce sont des investisseurs français qui achètent de la pierre assortie d'un bail de neuf ans, assurant une rentabilité comprise entre 2,25 et 3,75 % s'ils choisissent d'occuper leur bien deux à six semaines, entre 3,75 et 4,5 % dans le cas contraire. Outre le remboursement de la TVA, ils peuvent également bénéficier d'un crédit d'impôt lorsque le bien est situé dans une zone de revitalisation rurale (ZRR) (lire page 72). Après une première période de neuf ans, ils peuvent renouveler le bail. Et pour optimiser la valorisation du patrimoine, nous leur proposons des travaux de décoration que nous préfinançons pour leur compte. Le cas échéant, nous prenons à notre charge une partie des frais. Dans la même logique, nous achetons aussi des immeubles entiers à des institutionnels, les rénovons puis les revendons à la découpe à nos clients.

La Vie Immobilière : Les mesures qui soutiennent l'investissement immobilier de loisirs sont-elles pérennes ?

Gérard Brémond : Celles concernant la récupération de la TVA ne peuvent être remises en cause. Celles sur les ZRR sont sécurisées jusqu'à fin décembre 2010. Ensuite, je ne suis pas inquiet. Les enjeux en termes d'aménagement du territoire et de tourisme sont tels que les pouvoirs politiques ne les remettront pas en cause. Ils devront considérer le tourisme comme un secteur prioritaire de l'industrie française et y apporter les soutiens nécessaires. Le plafond ouvrant droit au crédit d'impôt doit être relevé. Les besoins portent désormais davantage sur les grands appartements et les maisons que sur les studios et deux-pièces. Le droit de l'urbanisme devrait aussi être sécurisé. En France, des projets peuvent être bloqués pendant des années pour des raisons non fondées, or les recours contre les permis de construire sont peu coûteux. Ils exposent insuffisamment à des indemnités ceux qui les ont engagés de façon abusive. Pourquoi ne pas s'inspirer du modèle américain ? Les discussions préliminaires approfondies réduisent les risques de recours. Il faut une meilleure concertation, plus de délai en amont, plus de sécurité après.

La Vie Immobilière : A Avoriaz, en 1967, vous conceviez la première station sans voitures. Comment intégrer aujourd'hui l'environnement ?

Gérard Brémond : Avec le film d'Al Gore, la conférence sur le réchauffement climatique et la percée fantastique de Nicolas Hulot, l'opinion publique est à présent sensibilisée. En quelques mois, le scepticisme français s'est transformé en certitude qu'il y avait une réelle menace. Malgré cette prise de conscience, le respect de l'environnement, qu'il s'agisse d'un chantier HQE* ou d'installation de chauffage solaire, n'est pas encore un argument de vente. Le marketing doit avant tout rassurer. Les clients sont prêts à inscrire leurs investissements immobiliers dans une démarche de développement durable, à condition de ne pas prendre les risques de l'expérimentation. Les industriels commencent seulement à prendre conscience que c'est un secteur au potentiel fantastique. Les innovations technologiques majeures restent à venir * Haute qualité environnementale.

Propos recueillis par Ariane Artinian

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