BFM Immo
Immobilier

La France à l'abri de la crise américaine

BFM Immo
Les conséquences de la crise immobilière aux Etats-Unis sur les marchés financiers ont surpris par leur ampleur. Vu la manière dont, cet été, la crise du marché américain des crédits immobiliers à risque (les fameux subprimes) s'est propagée aux quatre coins du monde comme le feu dans la garrigue grecque, on peut se demander si la prétendue « bulle immobilière » européenne n'est pas sur le point de crever.

Des observateurs français n'hésitent d'ailleurs pas à affirmer que notre immobilier est surévalué - de 15 à 25 % selon le degré de pessimisme de la source. Il faut raison garder. Autant les marchés financiers sont de plus en plus interconnectés (les dettes à long terme des Américains ayant été recyclées auprès des porteurs de sicav monétaires dynamiques français ou espagnols), autant les marchés immobiliers restent profondément locaux. Il n'y a donc aucun effet domino à attendre de la langueur du marché immobilier américain. D'ailleurs, en dépit de la forte chute des ventes de logements neufs outre-Atlantique, les prix ont très faiblement baissé (3 % environ dans l'ancien sur un an). Les stocks augmentent, certes dans le neuf, mais le niveau encore bas des taux d'intérêt permet aux promoteurs d'attendre des jours meilleurs sans trop y perdre. Rien ne les oblige à brader. Et si M. Bernanke, président de la banque centrale américaine (Fed), a la bonne idée de baisser le loyer de l'argent, comme l'absence d'inflation l'y autorise, eh bien les promoteurs comme les emprunteurs étranglés ne peuvent que lui en être reconnaissants. L'ampleur des effets induits de la correction américaine l'a surdimensionnée. Que les habitants de Bordeaux ou de Lille ne s'alarment pas : elle n'aura aucun impact sur le prix du mètre carré chez eux ! Les prix français évoluent encore au rythme de notre activité. Quant au crédit, il faut d'abord tenter de cerner l'ampleur du sinistre... américain. Le montant total des subprimes ne dépasse sans doute pas 600 milliards de dollars. Que 50 % des emprunteurs fassent défaut représente une perte théorique de 300 milliards pour les banques, dont il faut tout de même ôter le prix de vente des gages. Si cette vente se fait avec un tiers de pertes, le trou total ressort à 100 milliards de dollars, soit le montant du sinistre argentin de 2001. Et encore, une bonne partie de ces dollars évaporés a déjà été épongée... par les marchés financiers. Quant à savoir si un tel sinistre pourrait affecter notre marché du crédit, la réponse est clairement négative. Il n'y a aucun risque pour que 400 000 ménages (soit l'équivalent français des 2 millions d'Américains pris au piège du subprime) relèvent demain du surendettement. Dans un pays de culture libérale comme les Etats-Unis ou le Royaume-Uni, l'« égalité face au crédit » signifie qu'on peut toujours en trouver. Simplement, les mauvais risques se paient plus cher que les bons. Alors que dans un pays protecteur comme le nôtre cette égalité signifie que les taux sont à peu de choses près les mêmes. Aussi, le plus mauvais risque français ne se paiera-t-il pas plus de 6,4 %, soit le taux de l'usure pour acheter sa maison. Or, 6,4 %, c'est un excellent taux outre-Atlantique ! Cette approche a le mérite évident de limiter la casse. A la protection par les taux s'ajoute un garde-fou juridique : protecteurs eux aussi, nos tribunaux ont vite fait d'accuser une banque trop prompte à prêter d'avoir manqué à son « devoir de mise en garde », un concept ignoré dans les pays libéraux. Les taux et le droit (les saisies ne sont pas faciles...) ont leur contrepartie ; en France, on ne prête qu'aux riches ou aux aidés. Bref, on n'est pas plus égaux que les autres... Il n'empêche que le nombre des exclus du crédit augmente avec la précarité professionnelle et sentimentale. Bonne nouvelle : ils auront droit bientôt à un prêt sécurisé à l'accession à la propriété. Toute ressemblance avec un subprime serait carrément injurieuse. Encore va-t-il falloir trouver des prêteurs. François de Witt

BFM Immo