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Près de Nice, le "trou" d'une ancienne cimenterie va laisser 70 hectares de réserve foncière

Près de Nice, le "trou" laissé par une cimenterie plus que centenaire

Près de Nice, le "trou" laissé par une cimenterie plus que centenaire - Valery Hache - AFP

La cimenterie Lafarge de Contes va fermer 2021. Une perte pour l'emploi, mais une aubaine pour le terrain.

Sur la Côte d'Azur, la cimenterie Lafarge a accompagné le développement de la ville de Contes depuis plus de 100 ans: sa fermeture prochaine est un choc pour la commune, qui pourrait toutefois profiter d'une "aubaine" en récupérant les 70 hectares du site. "Lafarge, c'est ce trou": sur une carte dans son bureau en mairie, Francis Tujague, un des derniers élus communistes de la région, désigne la carrière de marne où s'alimente la cimenterie condamnée.

Sa fermeture fin 2021 va entraîner la perte d'une soixantaine d'emplois directs sur 72, et environ 200 autres indirects dans cette vallée proche de Nice dont le cimentier a façonné l'identité industrielle. "Tout Contes s'est développé avec Lafarge. C'est triste pour mes collègues", soupire Gilbert Camous, ancien ouvrier passé responsable des procédés et bientôt à la retraite après 40 ans à la cimenterie.

Des promoteurs se sont manifestés

Une assemblée générale du personnel est prévue vendredi, au lendemain de nouvelles négociations. Le groupe suisse LafargeHolcim, qui veut s'orienter sur des ciments propres, compte garder une activité logistique et de remblai de la carrière. Arrivant à extinction, cette dernière était autorisée encore pour 15 ans et l'activité "devait s'arrêter dans le meilleur des cas en 2032", indique Francis Tujague qui aurait voulu une fermeture moins "brutale", étalée au moins sur cinq ans.

Sans tarder cependant, en quinze jours, il a fait voter le recours à un bureau d'étude pour réfléchir "sur le devenir possible des espaces libérés" et demande la restitution gracieuse du site à LafargeHolcim. "On ne se met pas à pleurnicher. Dans trois mois, on aura l'esquisse d'un projet. Je n'ai pas du tout l'âme d'un promoteur immobilier, mais c'est une aubaine pour reconstruire un projet de développement de la vallée", dit-il.

Sur la Côte d'Azur, disposer de 70 hectares de réserve foncière adossés à 60 hectares d'espaces naturels, n'arrive pas tous les jours. Des promoteurs, et même des élus de la région, ont d'ailleurs immédiatement sauté sur leur téléphone pour se manifester. "Il y a des trous qui valent le coup!", résume l'élu de 73 ans, adjoint depuis 1977, maire depuis 1996 et réélu en 2020 avec un score plébiscite de 81,5% dans cette "ville à la campagne" de 7.500 habitants où hors des municipales, le vote majoritaire va au Rassemblement national. "Il y a ceux qui disent 'chouette, on respirera mieux!' et ceux qui disent 'ça va faire des dégâts et du chômage'. Ma hantise à moi, c'est la reconversion des terrains", reconnaît aussi Kareen Woignier, sa principale opposante LR. "Concernant le foncier, il est beaucoup trop tôt pour aborder le sujet", précise de son côté LafargeHolcim à l'AFP: "La priorité de l'entreprise est avant tout l'accompagnement des salariés du site".

Lafarge et Contes, une histoire commune

Lafarge et Contes, ça a longtemps été un destin commun. En 1906, l'industriel, en plein essor, fournit les ports en construction sur la Méditerranée et acquiert une activité préexistante de chaux et de ciment, générée par les deux carrières toutes proches. Adieu vignes et olives, chanvre et châtaigniers, forge et élevage dont on vivait chichement, le cimentier va prospérer, notamment avec l'édification des palaces du littoral puis des ponts et viaducs, et sortir de la misère les paysans et les immigrés italiens de Contes.

À l'apogée de ses effectifs à Contes, Lafarge compte jusqu'à 300 salariés avant l'automatisation de nombreuses tâches. Les œuvres sociales se multiplient: une école ménagère, une fanfare, une coopérative, un centre social, une piscine, des tennis, et le traditionnel "festin" de Pentecôte, ses trois jours de bal, son concours de boule.

Originalité locale, le musée des arts et traditions populaires abrite des sacs de ciment cousus à la main par des femmes. Jusque dans les années 1960, Lafarge est premier employeur de la ville. À la clé aussi, une pollution qui a été en se réduisant. À une époque, les toits se couvraient de poussière grise. La cimenterie a aussi enraciné dans la vallée tout un tissu industriel fort de 2.000 entreprises aujourd'hui, gage d'une possibilité de rebondir.

Avec AFP

D. L.