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Sans plafonnement, les loyers à Paris ont augmenté plus rapidement

Sans plafonnement, les loyers parisiens ont plus augmenté.

Sans plafonnement, les loyers parisiens ont plus augmenté. - Franck Fife - AFP

Les propriétaires bailleurs ont profité de l'arrêt du plafonnement pour augmenter davantage les loyers. Le dispositif a été remis en place depuis l'été dernier. Mais il a aussi des effets pervers.

Le logement sera l'un des principaux enjeux des élections municipales en Ile-de-France. Plusieurs villes pourraient dans les prochains mois mettre en place un plafonnement des loyers, comme à Paris. Les classes populaires et les classes moyennes ont effectivement de plus en plus de mal à se loger dans la capitale et sa proche banlieue. En particulier les familles. Il y a un an, 26 villes de la région avaient d'ailleurs annoncé leur intention de plafonner les loyers, comme dans la capitale. Mais pour l'instant, seule la mairie de Paris a mis en place ce dispositif.

Alors, est-ce que ça marche ? L'Olap, l'observatoire des loyers de l'agglomération parisienne, vient de publier une nouvelle étude sur ce qu'il s'est passé en 2018 dans la capitale pour le parc privé non meublé, lorsque les loyers n'étaient plus plafonnés. Pour rappel, ce dispositif de plafonnement était en place de mi-2015 à fin 2017 mais il a ensuite été annulé en justice. Dans un second temps, son expérimentation pour 5 ans est redevenue possible grâce à la loi Elan. Et les loyers sont de nouveau plafonnés pour les Parisiens depuis le 1er juillet 2019. Néanmoins, seuls les locataires d'appartement meublé ou non meublé qui ont signé leur bail depuis le 1er juillet 2019 peuvent y prétendre. Les autres doivent attendre leur renouvellement de bail pour le faire valoir.

Des loyers qui ont progressé de 1,7% en 2018

Il est donc particulièrement intéressant de savoir ce qu'il s'est passé en 2018, lorsque les loyers n'étaient plus plafonnés. Selon les données de l'Olap, les propriétaires en ont effectivement profité pour augmenter les loyers: +1,7% pour tous les loyers en moyenne en 2018, contre +0,8% en 2017 et +0,4% en 2016. On reste néanmoins encore loin du début des années 2010, où les loyers augmentaient plutôt de 2,5 à 3% par an.

Reste que c'est bien dans la capitale que se concentre le problème, avec des loyers qui augmentent toujours plus rapidement que l'inflation. De 2010 à 2018, le loyer moyen a augmenté de 16,2% à Paris, passant de 19,7 à 22,9 euros par mètre carré et par mois. C'est beaucoup plus qu'en petite couronne (+11,3% à 16,7 euros) et en grande couronne (+9,5% à 13,8 euros du mètre). Concrètement, un 60 m2 se loue ainsi (hors charges) près de 1.375 euros à Paris, contre environ 1.000 euros en petite couronne et 830 euros en grande couronne. A titre de comparaison, l'inflation était d'environ 11% sur la période.

Les petites surfaces explosent les plafonds

Plus spécifiquement, sur l'année 2018, l'Olap constate une augmentation de la part des appartements où les loyers auraient dépassé les plafonds s'ils avaient été maintenus en place. Cette proportion est remontée à 28% des logements du parc locatif privé (toujours non meublé), alors que la part des appartements hors des clous reculait progressivement depuis 2015. Le rebond n'est pas spectaculaire mais il est indéniable.

Et c'est d'autant plus vrai que les surfaces sont petites. En 2018, 7 logements sur 10 de moins de 20 m2 auraient dépassé les plafonds si ces derniers avaient été toujours en place.

150 euros par mois de différence

Combien cela représente-t-il pour un locataire en moyenne? C'est loin d'être négligeable. Lorsqu'un loyer dépassait le plafond "virtuel" en 2018, c'est d'environ 10% en moyenne. Ce qui représente de l'ordre de 150 euros par mois. Ce qui fait tout de même 1.800 euros par an.

Certes, le plafonnement permet bien de limiter les hausses de loyer. D'autant qu'il s'ajoute aux autres dispositifs d'encadrement des loyers en cours de bail, lors de son renouvellement ou en cas de relocation (voir ici). Mais les propriétaires s'adaptent et il peut y avoir des effets pervers.

Déjà, ils rognent sur le montant des travaux. Ensuite, il y a de moins en moins de logements dans le parc locatif privé non meublé. L'offre a baissé de près de 11% entre 2006 et 2016.

Comment l'expliquer? Il y a plusieurs éléments qui jouent. Certains propriétaires revendent à des acheteurs qui vont se servir du logement comme résidence principale. D'ailleurs, sur longue période, le nombre de Parisiens propriétaires de leur logement progresse légèrement. Les propriétaires peuvent également passer d'une location nue à une location meublée. Les plafonds de loyers sont plus élevés et la fiscalité qui s'applique peut être beaucoup plus avantageuse.

Trop peu de constructions à Paris

Bien sûr, Il y a aussi le phénomène Airbnb. Des logements passent de la location classique à la location saisonnière, qui rapporte bien plus. Normalement, celle-ci est limitée à 120 jours par an dans la capitale. Il est possible de louer toute l'année sur Airbnb pour une résidence secondaire mais les règles sont très strictes. Des règles que de nombreux bailleurs ne respectent pas Enfin, la mairie de Paris rachète des immeubles du parc privé pour les transformer en logements sociaux. Car il y a très peu de constructions à Paris. Entre 400 et 700 logements construits par an en moyenne. Et c'est sans doute le principal problème. Peu de chantiers, c'est l'assurance d'avoir des problèmes de logements à l'avenir.

>> Pour savoir si votre loyer dépasse les plafonds autorisés (les loyers de référence majorés), vous pouvez consulter une carte interactive ici.

Jean Louis Dell'Oro