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Un rapport propose d'injecter des fonds privés dans les HLM, le gouvernement prend ses distances

Un rapport étudie la piste de fonds privés pour les HLM

Un rapport étudie la piste de fonds privés pour les HLM - AFP

L'ouverture du monde du logement social à des fonds privés est envisagée par un rapport de l'Inspection générale des finances. Ce qui a suscité l'agacement d'une partie des représentants des HLM.

Comment ouvrir le logement social aux financements privés? Publié après une longue attente, un rapport public apporte des réponses prudentes, mais le gouvernement s'en est vite distancié tandis que le monde HLM marquait son énervement.

"Plusieurs options (...) sont envisageables pour apporter des fonds propres privés au secteur du logement social", juge ce rapport, publié jeudi par l'Inspection générale des finances (IGF), instance qui dépend de Bercy, et réalisé à la demande du gouvernement.

Cette publication, relayée la veille par Le Figaro, était attendue depuis longtemps, en premier lieu par le monde HLM. Elle avait fait l'objet de multiples spéculations lors du congrès annuel du secteur, fin septembre. A cette occasion, les bailleurs sociaux avaient unanimement exprimé leur opposition à une "financiarisation" du logement social, même si, derrière l'unité de façade, certains de ses acteurs ne sont pas défavorables à une relative ouverture à des fonds privés.

Un attrait "passager" ?

Une partie du logement social est d'ailleurs déjà de droit privé: un tiers des quelque 700 bailleurs du secteur. Ils ont des actionnaires, mais la loi limite drastiquement les dividendes sur les bénéfices et les acteurs privés y sont, de fait, rares, à part quelques exceptions comme l'assureur Axa.

Le rapport publié jeudi reste, en tout cas, prudent. Il exprime d'abord de forts doutes sur l'intérêt réel, à long terme, des investisseurs privés pour le logement social. "Il s'agit d'un intérêt par défaut, lié à la baisse de la rentabilité des autres classes d'actifs dans l'immobilier, dans un contexte d'abondantes liquidités à investir", relève-t-il, prévenant que cet attrait risque de n'être "que passager". Il estime aussi illusoire d'attirer des fonds privés vers la part la plus sociale des HLM, aux loyers particulièrement bas pour les plus modestes, ou vers le logement social en zone détendue, c'est-à-dire essentiellement hors des grandes agglomérations.

Une fois ces réserves établies, le rapport présente plusieurs pistes, parmi lesquelles des règles moins strictes quant à l'entrée d'acteurs privés au capital de bailleurs HLM: il serait par exemple question de lâcher un peu de lest sur l'encadrement des dividendes. Une autre piste suggère de créer un nouveau type de bailleur social, au statut plus souple, qui serait voué à vendre régulièrement ses HLM à condition de reconstituer aussi fréquemment son parc.

L'exécutif contraint de prendre ses distances

Enfin, plus radicale, une dernière proposition envisage de ne plus considérer le logement social comme l'apanage d'un secteur spécialisé, mais de l'ouvrir à tout acteur - public ou privé, entreprise ou particulier - qui respecte des règles préétablies, dont notamment des plafonds de loyers.

Pour chacune de ces suggestions, le rapport détaille néanmoins de multiples inconvénients: difficultés juridiques à mettre en place de nouveaux statuts, incapacité à planifier une politique d'ensemble en matière de logement social... Malgré ce ton prudent, l'exécutif s'est empressé de minimiser le rapport, soulignant qu'il ne s'agissait "pas d'une position du gouvernement", selon les termes de Julien Denormandie, ministre du Logement. "Nous ne modifierons pas les règles qui préservent le capital des HLM", a-t-il déclaré sur Twitter. "Je m'y suis toujours opposé."

Mais ces propos n'ont pas suffi à rassurer le monde HLM sur les intentions du gouvernement. Sa confédération, l'Union sociale pour l'habitat (USH), a dénoncé un "double jeu" de l'exécutif en rappelant que celui-ci demandait d'importantes économies au secteur depuis le début du quinquennat d'Emmanuel Macron. "Le choix de la privatisation du logement social, d'autres pays l'ont fait et cela a eu des effets désastreux", a jugé Jean-Louis Dumont, président de l'USH, dans un communiqué.

Fortes hausses de loyers dans d'autres pays

Le rapport lui-même n'occulte pas cette comparaison avec d'autres pays, citant ainsi l'exemple de l'Allemagne où une grande partie du parc social a été vendue à des acteurs privés après la réunification, provoquant "de fortes hausses de loyers dans les zones attractives" comme la capitale, Berlin.

Ce diagnostic est toutefois relativisé par certains partisans d'une plus grande ouverture des HLM aux fonds privés, comme André Yché, président de CDC Habitat, filiale de la Caisse des dépôts et acteur central du logement social français.

"Les Allemands ont été habitués à un système de loyers bas (...), il y a eu des effets d'accoutumance", expliquait-il en septembre à l'AFP, rappelant le bas niveau des loyers berlinois par rapport à Paris.

(Avec AFP)

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