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Plafonds, sanctions, villes concernées... Tout savoir sur l'encadrement des loyers

Encadrement des loyers recouvre plusieurs dispositifs

Encadrement des loyers recouvre plusieurs dispositifs - AFP

Derrière la notion d'encadrement des loyers, il y a en réalité plusieurs dispositifs distincts qui s'appliquent en France, dont celui du plafonnement des loyers. Décryptage.

Afin de protéger les locataires des abus de certains bailleurs, plusieurs dispositifs ont été mis en place pour limiter la hausse des loyers. Il existe ainsi trois formes différentes d'encadrement des loyers: pour le niveau des loyers (avec un plafond en euros par m2), pour la hausse d'un loyer en cours de bail et pour la revalorisation du loyer entre deux baux.

Quelles sont les communes concernées?

Toutes les communes situées en zone tendue sont concernées par les mesures d'encadrement de la hausse des loyers entre deux baux. Sont visées les "zones d'urbanisation continue de plus de 50.000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant, qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d'acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d'emménagements annuels dans le parc locatif social", précise l'article 18 de la loi du 6 juillet 1989. En tout, cela représente 28 agglomérations. La liste des communes est la même que celle fixée par le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 dans le cadre de la taxe sur les logements vacants.

L'encadrement de la hausse des loyers pendant le bail s'applique en revanche sur l'ensemble du territoire.

Pour le plafonnement des loyers (où il existe un loyer maximal à ne pas dépasser), il ne concerne que les villes qui en ont fait la demande et pour lesquelles le gouvernement a donné son autorisation. C'est le cas de (par ordre chronologique):

  • Paris (depuis le 1er juillet 2019)
  • Lille (depuis le 1er mars 2020)
  • Hellemmes, ancienne commune associée désormais à la ville de Lille (depuis le 1er mars 2020)
  • Lomme, ancienne commune associée désormais à la ville de Lille (depuis le 1er mars 2020)
  • Aubervilliers (depuis le 1er juin 2021) - Plaine Commune (Seine-Saint-Denis)
  • Épinay-sur-Seine (depuis le 1er juin 2021) - Plaine Commune (Seine-Saint-Denis)
  • L’Île-Saint-Denis (depuis le 1er juin 2021) - Plaine Commune (Seine-Saint-Denis)
  • La Courneuve (depuis le 1er juin 2021) - Plaine Commune (Seine-Saint-Denis)
  • Pierrefitte-sur-Seine (depuis le 1er juin 2021) - Plaine Commune (Seine-Saint-Denis)
  • Saint-Denis (depuis le 1er juin 2021) - Plaine Commune (Seine-Saint-Denis)
  • Saint-Ouen-sur-Seine (depuis le 1er juin 2021) - Plaine Commune (Seine-Saint-Denis)
  • Stains (depuis le 1er juin 2021) - Plaine Commune (Seine-Saint-Denis)
  • Villetaneuse (depuis le 1er juin 2021) - Plaine Commune (Seine-Saint-Denis)
  • Lyon (depuis le 1er novembre 2021)
  • Villeurbanne (depuis le 1er novembre 2021)
  • Bagnolet (à partir du 1er décembre 2021) - Est Ensemble (Seine-Saint-Denis)
  • Bobigny (à partir du 1er décembre 2021) - Est Ensemble (Seine-Saint-Denis)
  • Bondy (à partir du 1er décembre 2021) - Est Ensemble (Seine-Saint-Denis)
  • Le Pré-Saint-Gervais (à partir du 1er décembre 2021) - Est Ensemble (Seine-Saint-Denis)
  • Les Lilas (à partir du 1er décembre 2021) - Est Ensemble (Seine-Saint-Denis)
  • Montreuil (à partir du 1er décembre 2021) - Est Ensemble (Seine-Saint-Denis)
  • Noisy-le-Sec (à partir du 1er décembre 2021) - Est Ensemble (Seine-Saint-Denis)
  • Pantin (à partir du 1er décembre 2021) - Est Ensemble (Seine-Saint-Denis)
  • Romainville (à partir du 1er décembre 2021) - Est Ensemble (Seine-Saint-Denis)
  • Montpellier (à partir du 1er juillet 2022)
  • Bordeaux (à partir du 15 juillet 2022)

Le plafonnement des loyers

Le plafonnement des loyers interdit aux propriétaires bailleurs de louer leur bien au-delà d'un certain plafond (le loyer de référence majoré), à compter de la date d'entrée en application de la mesure. Il s'agit ici des loyers hors charges. Les loyers de référence sont fixés en fonction de quatre critères: le quartier, la date de construction de l'immeuble, le nombre de pièces et le fait que le bien soit meublé ou loué vide.

Les plafonds concernent les premières locations, les relocations (nouveau locataire dans un logement loué auparavant) mais aussi les renouvellements de baux (lorsque, à l'expiration du bail, le propriétaire propose un renouvellement du bail au locataire, que les conditions soient similaires ou différentes). Les baux mobilité sont également visés.

En revanche, ce plafonnement ne s’applique pas aux baux en cours ni aux reconductions tacites. Les reconductions tacites (de 3 ou 6 ans) interviennent quand le locataire reste dans les lieux et que son bailleur n'a pas expressément proposé de renouveler le bail ni engager une démarche pour récupérer le bien. Le locataire peut cependant entamer une action en diminution de loyer, si ce dernier est supérieur au loyer de référence majoré. Le locataire fait sa demande au minimum 5 mois avant le terme du bail, comme le précise le site service-public.fr ici par exemple.

Il est possible de dépasser le plafond via ce qu'on appelle "un complément de loyer", si le bien présente des caractéristiques exceptionnelles (éléments de confort, vue sur un monument historique…), comme le rappelle le site service-public.fr ici. Cette notion juridique reste cependant assez floue. Précisons aussi que le loyer de base (hors charges) doit être dans ce cas égal au loyer de référence majoré.

Un arrêté préfectoral fixe le loyer de référence, le loyer de référence majoré (équivalent au loyer de référence +20%) et le loyer de référence minoré (équivalent au loyer de référence -30%) dans chaque quartier de chaque commune concernée.

Une histoire mouvementée :

Le plafonnement des loyers a connu un destin mouvementé. Créé initialement par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ou loi Alur), ce dispositif devait être appliqué dans 28 agglomérations. Il ne l'a été que dans deux grandes municipalités: à Paris, à partir du 1er août 2015, et à Lille, à compter du 1er février 2017. Mais le tribunal administratif de Paris l'a annulé le 28 novembre 2017, après une décision similaire à Lille en octobre 2017. Des décisions qui ont été confirmées en appel en juin 2018 pour Paris et en juillet 2018 pour Lille. En effet, cet encadrement du niveau des loyers devait concerner l'ensemble d'une agglomération et non une seule commune. Mais en juin 2019, nouveau revirement : le Conseil d'Etat valide finalement les dispositifs mis en place à Paris et à Lille.

Quoi qu'il en soit, le plafonnement des loyers a fait son retour avec la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ou loi Elan). Il peut désormais être expérimenté pendant 5 ans par les villes qui en font la demande.

Où trouver les plafonds de loyers à appliquer?

Pour Paris et les villes de Plaine Commune et Est Ensemble en Seine-Saint-Denis:

Il faut se rendre sur le site de la Direction régionale et interdépartementale de l’hébergement et du logement (DRIHL) d'Ile-de-France qui a mis en ligne une carte interactive qui permet de savoir, quartier par quartier, les loyers applicables. Pour rappel, Paris est divisé en 80 quartiers administratifs. Le site donne le loyer de référence, le loyer de référé majoré et le loyer de référence minoré.

Par exemple, dans le quartier de La Villette, le plafond de loyer pour un studio loué nu dans un immeuble haussmannien sera de 31,7 euros par m2 pour les baux signés entre le 1er juillet 2021 et le 30 juin 2022. Soit 634 euros pour un appartement de 20 m2. Sur la période précédente (du 1er juillet 2020 au 30 juin 2021), ce plafond était de 31,2 euros par m2 (624 euros pour 20 m2). Le montant du loyer de référence majoré a donc augmenté de 1,6% entre juillet 2020 et juillet 2021.

Pour Lille, Hellemmes et Lomme :

La ville de Lille a mis en ligne sur son site un test qui permet de connaître les plafonds de loyer en fonction des critères de votre logement (adresse, date de construction de l'immeuble, etc.).

Il existe également un portail avec un simulateur, réalisé par le SIILAB (le laboratoire d'innovation publique de la région) et la DDTM (Direction départementale des territoires et de la mer) du Nord.

Pour Lyon et Veilleurbanne :

La métropole de Lyon a mis en ligne un simulateur qui permet de connaître les plafponds de loyer à appliquer en fonction des critères du logement.

Pour Montpellier :

La métropole de Montpellier a mis en ligne un simulateur qui permet de connaître les plafponds de loyer à appliquer en fonction des critères du logement.

Pour Bordeaux :

La métropole de Lyon a mis en ligne un simulateur qui permet de connaître les plafponds de loyer à appliquer en fonction des critères du logement.

Que risque un bailleur qui ne respecte pas les plafonds de loyers?

Le propriétaire qui ne joue pas le jeu de l'encadrement des loyers, en demandant à son locataire un montant supérieur aux loyers majorés de 20%, s'expose à une action en diminution de loyer de la part de ce dernier. Le locataire peut solliciter en premier lieu la commission départementale de conciliation (CDC), puis le cas échéant saisir le tribunal d'instance.

"Après une mise en demeure, restée infructueuse, de mettre son contrat en conformité et de rembourser au locataire les trop perçus éventuels, le préfet de département peut prononcer une amende administrative, pouvant aller jusqu’à 5.000€ pour une personne physique et 15.000 € pour une personne morale", détaille la préfecture de Paris. La procédure de mise en demeure est notamment précisé par le décret n° 2019-437 du 13 mai 2019. Ces sanctions administratives s'ajoutent donc aux sanctions décidées par la justice (abaissement du loyer convenu dans le bail et remboursement des trop perçus par exemple).

L'encadrement de la hausse des loyers pendant le bail

Pendant la durée du bail pour un logement utilisé comme résidence principale (loué vide ou meublé), si le propriétaire a prévu une clause de révision du loyer, celui-ci ne peut pas augmenter plus rapidement que l'indice de référence des loyers (IRL), disponible sur cette page. Cet indice correspond à "la moyenne, sur les 12 derniers mois, de l'évolution des prix à la consommation hors tabac et hors loyers". La hausse est annuelle avec une date fixe.

Afin de calculer la hausse de loyer autorisée, il faut réaliser le calcul suivant: Loyer en cours x nouvel IRL du trimestre de référence du contrat/IRL du même trimestre de l'année précédente = nouveau loyer.

Cette limite s'applique à tout le territoire dans toutes les communes de France. "A défaut de manifester sa volonté d'appliquer la révision du loyer dans un délai d'un an suivant sa date de prise d'effet, le bailleur est réputé avoir renoncé au bénéfice de cette clause pour l'année écoulée", précise l'article 17-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.

L'encadrement à la relocation ou lors du renouvellement de bail

Si, lorsqu'un propriétaire met en location pour la première fois un bien, il en fixe librement le montant. Ce n'est pas le cas par la suite.

Dans les zones tendues, en cas de renouvellement de bail (le locataire reste le même), le propriétaire ne peut augmenter le loyer que s'il est "manifestement sous-évalué par rapport au prix du marché" mais sous certaines conditions très précises. Dans les autres communes, une réévaluation à la hausse lors du renouvellement de bail est aussi possible en cas de loyer sous-évalué, avec des conditions allégées. L'article 17-2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précise ces conditions.

En zones tendues, lors d'une remise en location (nouveau bail au nom d'un nouveau locataire), si le logement n'a pas été loué au cours des 18 derniers mois, le bailleur peut fixer librement le montant du loyer. En revanche, le nouveau loyer ne peut excéder celui versé par l'ancien locataire si le logement a été loué au cours des 18 derniers mois. Toutefois, toujours dans ce deuxième cas, "si aucune révision de loyer n'est intervenue au cours des douze mois précédant la conclusion du nouveau contrat de location, le loyer appliqué au nouveau locataire ne peut excéder le dernier loyer appliqué au précédent locataire révisé en fonction de la variation de l'indice de référence des loyers", précise le décret n° 2017-1198 du 27 juillet 2017. Il existe aussi une possibilité de réviser à la hausse le loyer en cas de réalisation de gros travaux entre deux locations ou de loyer manifestement sous-évalué par rapport au marché, mais là encore sous certaines conditions précisées à l'article 4 dudit décret.

Jean-Louis Dell'Oro