BFM Immo
Fiscalité immobilier

Echanges musclés entre Airbnb et la mairie de Paris

84% des annonces sur Airbnb n'ont pas de numéro d'enregistrement.

84% des annonces sur Airbnb n'ont pas de numéro d'enregistrement. - Martin Bureau - AFP

Pour se justifier de ne pas respecter la loi, Airbnb affirme que "la réglementation à Paris est complexe, confuse". Un argument réfuté par Ian Brossat qui rappelle à la plateforme qu'elle respecte la loi à San Francisco. L'adjoint à la Maire de Paris, en revanche, pose cette question: "le manque à gagner en cas de retrait serait-il trop important?"

Paris a décidé de frapper fort. La municipalité vient d'annoncer qu'elle assignait en référé Airbnb et Wimdu. Son grief? Ne pas respecter la loi qui leur impose de retirer de leurs sites internet les annonces de locations sans numéro d'enregistrement. Depuis le 1er décembre 2017, tout loueur de meublé touristique doit être enregistré et son numéro d'enregistrement doit figurer sur l'annonce en ligne, afin de vérifier que les propriétaires ne dépassent pas la durée limite légale de location de 120 jours par an.

La Ville de Paris demande en cas de non-respect de retrait des annonces une astreinte de 1.000 euros par jour de retard, et de 5.000 par jour pour toute nouvelle publication sans numéro d'enregistrement. Si elle obtenait gain de cause, cela obligerait Airbnb à payer des dizaines de millions d'euros par jour pour garder en ligne une offre qui fait aujourd'hui de Paris la destination où elle engrange le plus de transactions dans le monde. Impensable.

Contactée, la filiale d'Airbnb en France élude le problème des conséquences financières qu'entraînerait une victoire juridique de la ville de Paris. La communication de l'entreprise se contente de critiquer cette "décision décevante" qui "impacte principalement des habitants de Paris". Et pour justifier le maintien des annonces litigieuses, la plateforme explique que "la réglementation à Paris est complexe, confuse et davantage adaptée à des professionnels qu'à des particuliers".

Un argument fallacieux estime Ian Brossat. L'adjoint à la Maire de Paris, chargé du logement, de l'habitat durable et de l'hébergement d'urgence nous affirme, en effet, que "l'enregistrement est hyper simple. Il prend cinq minutes. Si quelqu'un est capable de mettre une annonce sur Airbnb, il est capable de s'enregistrer".

"Booking.com a fait le boulot. Pourquoi pas Airbnb ?"

Airbnb insiste aussi sur le fait que 30% des hébergements que la Ville de Paris demande de retirer n'ont pas été loués depuis au moins un an et que 90% respectent la limite des 120 jours accordés aux logements déclarés comme résidence principale. Pour prouver sa bonne foi, la plateforme affirme avoir rempli sa mission d'information des nouvelles règles d'enregistrement. "Nous encourageons Paris à suivre le chemin d’autres villes comme Londres et Berlin, avec lesquelles nous avons travaillé efficacement à des mesures de bon sens pour promouvoir une location meublée touristique responsable et empêcher les abus". L'une des solutions serait le blocage automatisé du nombre de nuitées.

Mais pour la mairie de Paris, là n'est pas la question. "La loi oblige à retirer les annonces qui dépassent 120 jours. Et pour le moment, Airbnb ne propose de le faire que dans les quatre premiers arrondissements seulement", affirme Ian Brossat qui va même plus loin: "À San Francisco, Airbnb a retiré 4000 annonces non enregistrées. Pourquoi ce qui est possible là-bas est impossible ici? Par ailleurs, Booking.com a fait le boulot. Pourquoi pas Airbnb?"

Et l'adjoint à la Maire enfonce le clou. "La vraie question : pourquoi Airbnb est si réticent à appliquer la loi? Faut-il en conclure que la part des annonces illégales (résidences secondaires) est beaucoup plus importante qu'ils ne le disent et que le manque à gagner en cas de retrait serait trop important?"

Diane Lacaze