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Fiscalité immobilier

Le gouvernement n'exclut pas de revenir sur la réforme de l'impôt sur la fortune

Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement

Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement - Ludovic Marin - AFP

Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement, a assuré que les effets de l'IFI seront évalués à l'automne 2019. Si la mesure ne fonctionne pas, des ajustements pourraient avoir lieu.

L'ISF va-t-il faire son grand retour? En plein mouvement social des gilets jaunes, Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement, était interrogé sur RTL sur un possible rétablissement de l'Impôt sur la fortune (ISF), transformé l'an dernier en Impôt sur le fortune immobilière (IFI).

Benjamin Griveaux a assuré que "ce sujet-là n'est pas sur la table", demandant "18 à 24 mois pour que la mesure fasse son plein effet". Il a donc donné rendez-vous à l'automne 2019 pour une évaluation par le Parlement. Mais il a ajouté que "si quelque chose ne marche pas, on n'est pas idiot, on va le changer".

"Le sujet pourra être rouvert"

Il a rappelé que le gouvernement "n'a pas supprimé l'ISF", il l'a transformé. "Sur les patrimoines immobiliers on a maintenu la fiscalité telle qu'elle était. On a supprimé sur quoi ? Sur les actions, parce que on en avait assez que des gens qui gagnent très bien leur vie décident de placer leur argent sur des fonds étrangers. Cela n'a aucun sens, cela ne revient pas dans l'économie réelle (...). Ce n'est pas un cadeau aux riches". L'idée est de "voir si cet argent" est "fléché dans nos PME pour les développer, pour qu'elles innovent, qu'elles investissent, pour qu'elles embauchent".

Dans quelques mois, le Parlement va donc vérifier que les effets de l'IFI se font bien sentir en France. "Si l'évaluation n'est pas la bonne, le sujet pourra être rouvert". Mais Benjamin Griveaux n'a pas donné plus d'information sur les futures pistes.

"Le gouvernement le rétablira"

De son côté, la secrétaire d'État à l'Égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, est prête à proposer de "rétablir l'ISF" si les évaluations du nouveau dispositif qui le remplace ne sont pas concluantes, selon un communiqué de son cabinet.

Dans un tweet ce matin à 8h, la secrétaire d'Etat a écrit: "Ce n’est plus uniquement ma position personnelle mais celle du gouvernement. @BGriveaux l’annonce: si l’évaluation de la transformation de l’ISF ne prouve pas que des capitaux ont été suffisamment réinjectés dans l’économie, le gouvernement le rétablira ! @EmmanuelMacron".

Le rétablissement de l'ISF tel qu'il était avant la réforme fait partie de la liste des revendications des gilets jaunes.

"Pas une bonne solution" pour Larcher

Le président du Sénat Gérard Larcher n'est "pas favorable" à la suppression de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) et au rétablissement de l'impôt sur la fortune (ISF), même si le "dialogue" sur le sujet lui "semble légitime", a-t-il déclaré.

"Si l'évaluation démontrait que cet impôt n'est autre chose qu'un sparadrap pour parler à l'opinion publique, rien n'est impossible. Mais je ne crois pas que ce soit une bonne solution", a-t-il insisté. "Notre travail ce n'est pas simplement de voter la loi, c'est aussi de contrôler", a-t-il souligné. "Que cette question fasse l'objet du dialogue, tout ceci me semble légitime", a-t-il poursuivi.

"L'ISF est un faux débat"

"L'ISF est un faux débat. On l'a dit depuis le premier jour de la campagne: on n'a pas besoin d'appauvrir les riches pour sortir de la pauvreté les moins riches", a toutefois assuré à l'AFP l'entourage d'Emmanuel Macron, niant tout changement d'approche sur le sujet. "L'ISF, ça tue la prospérité parce que ça fait fuir les entrepreneurs. Faire de la justice sociale aux dépens de la prospérité, ce n'est pas dans notre philosophie politique", a-t-on ajouté.

Promesse de campagne d'Emmanuel Macron, la réforme de l'ISF, entrée en vigueur au 1er janvier 2018, a entraîné un recentrage de l'impôt sur la fortune, appliqué aux foyers dont le patrimoine dépasse 1,3 million d'euros sur les seuls biens immobiliers. Cette mesure, censée stimuler l'activité en encourageant les contribuables les plus aisés à investir dans les entreprises françaises, devrait entraîner un manque à gagner de près de trois milliards d'euros pour l'État.

"Mission d'évaluation"

Une ardoise jugée colossale par la gauche, mais aussi par les "gilets jaunes", qui dénoncent un "cadeau" fiscal pour les ménages les plus fortunés, sans garantie de résultats en matière de croissance et d'emploi. "Le gouvernement est mal à l'aise vis-à-vis de cette mesure" qui fait figure "d'épouvantail", observe Alain Trannoy, directeur de recherches à l'EHESS. "Il n'a pas réussi à faire entendre les arguments qui motivaient la réforme, notamment en termes d'emploi."

Dès le projet de loi de finances 2018, voté voilà un an, le Parlement avait prévu la mise en place d'une "mission d'évaluation", chargée de mesurer les effets de la réforme "en termes d'investissement dans les entreprises" et de "répartition des richesses". Cette mission, votée dans le cadre du projet de loi de finances 2018, devrait être mise en place dans les prochaines semaines. Composée de parlementaires et de membres de la Cour des comptes, elle devrait rendre ses premières conclusions au début 2020.

Un calendrier délicat à gérer pour la majorité, soucieuse de corriger rapidement l'image de "présidence des riches" qui colle à l'exécutif, mais aussi de ne pas donner le sentiment de renoncer à son cap politique. Une telle évaluation "ne peut pas se faire à moins de deux ans. 18-24 mois, c'est le cycle économique pertinent pour évaluer ces mesures", a dit à l'AFP Laurent Saint-Martin, vice-président LREM de la commission des finances de l'Assemblée nationale. Un message relayé par la rapporteure spéciale du budget à l'Assemblée, Amélie de Montchalin (LREM): "L'évaluation est un combat essentiel et permanent. C'est plus qu'un principe. On ne vote pas des lois éternelles", assure-t-elle.

Avec AFP

Diane Lacaze