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Fiscalité immobilier

Les députés En Marche veulent alourdir l'impôt sur la fortune immobilière dès 2019

L'IFI devrait rapporter 1,2 milliard d'euros en 2018

L'IFI devrait rapporter 1,2 milliard d'euros en 2018 - AFP

La majorité a déposé un amendement au projet de Budget qui pourrait alourdir la note de l'IFI pour des milliers de ménages. Explications.

Les promesses des gouvernements successifs sur la stabilité fiscale n'engagent que ceux qui les écoutent. A peine né en 2018 en remplacement de l'ISF, l'impôt sur la fortune immobilière pourrait déjà subir un lifting d'ampleur. Alors que la commission des Finances de l'Assemblée nationale entame mardi l'examen du Budget 2019, le rapporteur du budget Joël Giraud (LREM) a déposé un amendement pour "plafonner le plafonnement de l'IFI", comme le souligne le journal Les Echos.

Derrière cette terminologie absconse pour les néophytes se cache en réalité une augmentation d'impôt pour de nombreux contribuables soumis à l'IFI. En effet, Joël Giraud veut mettre en place une sorte d'IFI minimum, en s'inspirant d'un dispositif qui était déjà en place de 1996 à 2011 pour l'ISF.

Plus de ristourne d'IFI de plus de 50%

Aujourd'hui, comme c'était le cas avec l'ISF, le montant total de l'impôt sur les revenus, des prélèvements sociaux et de l'IFI ne peut dépasser 75% des revenus du contribuable. Ce plafonnement de l'IFI est précisé dans l'article 979 du Code général des impôts. Or, le député de la majorité souhaiterait mettre en place un deuxième plafonnement, de sorte que, "en même temps", la ristourne ne puisse pas dépasser 50% de l'impôt dû au titre de l'IFI.

Prenons un exemple pour mieux comprendre. Un contribuable possède un patrimoine immobilier net taxable à l'IFI de 6 millions d'euros. Il devrait en théorie payer 48.190 euros d'impôt sur la fortune immobilière. Mais comme il affiche des revenus relativement modestes de 30.000 euros et qu'il a déjà payé 2.000 euros d'impôts par ailleurs (via les prélèvements sociaux et l'impôt sur le revenu), son IFI ne pourra dépasser 20.500 euros, du fait du plafonnement à 75%. Si un "plafonnement du plafonnement" est mis en place, sa ristourne sera réduite à 50% de l'IFI initial. Il devrait alors payer 24.095 euros d'impôt sur la fortune immobilière, soit 3.595 euros de plus qu'avec le dispositif actuel.

Officiellement, selon l'exposé des motifs de l'amendement, "ce mécanisme anti-abus permettait d’éviter que le plafonnement de l’ISF (sic) soit utilisé dans le cadre de montages fiscaux pour annuler, ou réduire excessivement, le montant de son ISF". Traduction : il devrait alourdir la note de plusieurs milliers de ménages.

Un impôt qui rapporte beaucoup plus que prévu

En 2017, époque où l'ISF était encore en place (avec une assiette beaucoup plus large que l'IFI), le plafonnement à 75% de l'impôt de solidarité sur la fortune permettait à 11.514 ménages d'obtenir une ristourne globale de 1,326 milliard d'euros, comme en atteste une annexe au budget 2019. Soit en moyenne une économie de 115.164 euros par ménage concerné.

Les montants en jeu devraient toutefois être beaucoup moins élevés. Dans le même document, l'Assemblée nationale a budgété une dépense fiscale pour l'IFI (comprendre un montant total des différents dispositifs pour diminuer l'impôt) de seulement 103 millions d'euros pour 2018 comme pour 2019. Mais sur les quelque 120.000 foyers qui devraient être imposés cette année, on ne sait pas encore combien auront bénéficié du plafonnement à 75%.

D'ailleurs, ce qui n'a rien d'anormal lors de la mise en place d'un nouvel impôt, les estimations sur l'IFI sont encore à prendre avec des pincettes. Ainsi, alors que Bercy anticipait des recettes de 850 millions d'euros en 2018, l'IFI devrait finalement rapporter 1,2 milliard d'euros cette année. Pour 2019, le projet de Budget mise sur 1,53 milliard. Si l'amendement de Joël Giraud était adopté, l'IFI deviendrait à n'en pas douter encore plus rentable pour le fisc.

Jean Louis Dell'Oro