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Fiscalité immobilier

Plus-values immobilières : Le gouvernement passe au forceps

Les députés ont voté une réforme lourdement amendée

Les députés ont voté une réforme lourdement amendée - dr

Le durcissement de la fiscalité sur les plus-values immobilières a été voté dans la nuit par l’Assemblée nationale. Prochaine étape, le Sénat. Si le texte est voté en l’état, il entrera en vigueur le 1er février prochain, et pourrait provoquer un afflux temporaire de biens sur le marché.

Les députés ont dit oui. Au terme d’intenses discussions et après une refonte quasi-totale de son projet, le gouvernement est parvenu à faire accepter sa réforme de la taxation des plus-values immobilières par l’Assemblée nationale.

En l’état, le texte n’a plus grand-chose à voir avec celui présenté le 24 août dernier par François Fillon. Là où le projet initial prévoyait la suppression pure et simple des abattements pour durée de détention, hors résidence principale, le texte validé dans la nuit par les députés maintient le principe de l’exonération, mais uniquement pour les biens détenus depuis plus de 30 ans, contre 15 à l’heure actuelle. Dans le détail, les plus-values seront imposées à plein, soit 32,5 %, si la cession intervient moins de 5 ans après l’acquisition du bien (résidence secondaire, logement vacant, bien locatif ou terrain constructible). Des abattements progressifs seront ensuite appliqués : de 2 % par an entre la sixième et la seizième année de détention, de 4 % à compter de la dix-septième année, et de 8 % chaque année après vingt-quatre ans. De facto, le vendeur sera totalement exonéré de taxes après 30 ans.

Mise en place le 1er février

L’autre grand changement concerne la date d’application de la réforme. Face à la levée de boucliers suscitée par la perspective d’une mise en place rétroactive de la réforme, le gouvernement a accepté de reporter son entrée en vigueur de six mois, et de ne l’appliquer qu’aux actes de vente signés après le 1er février 2012. Avec pour double but « d'assurer la sécurité juridique des contribuables et, […] d'inciter les propriétaires à mettre des biens en vente et ainsi d'augmenter l'offre de logements ».

Baisse des prix ?

Et c’est bien ce qui risque de se passer… Si la première mouture du texte pouvait laisser craindre un effet, sinon d’abandon au moins de report de certains projets immobiliers, la réforme ainsi votée risque d’inciter les propriétaires qui pensaient vendre à accélérer le mouvement. Principalement ceux qui détiennent un bien depuis plus de 15 ans mais moins de 30 ans, et qui risquent fort, si le texte est validé par le Sénat, de passer à côté d’une exonération totale de leur plus-value… Dans un entretien aux Echos, Nicole Goulard, avocate associée chez Jeantet et associés, estime que « ceux qui ont envie de céder un bien doivent accélérer le mouvement. Cela va provoquer quelque afflux chez les notaires ». A terme, cela pourrait même avoir une répercussion sur les prix, même si, de l’aveux de Christian Lefebvre, président de la Chambre des notaires de Paris, également interrogé par Les Echos, cet effet est « impossible à chiffrer » sans être « aléatoire et fantaisiste ». Sans oublier que, si la mesure dope les ventes à court terme, un effet de reflux peut raisonnablement être anticipé pour l’après 1er février. Autant de questions qui devraient être évoquées demain par les Notaires de Paris, lors de la présentation de leur dernière note de conjoncture immobilière.

Le texte doit maintenant être examiné par les sénateurs. S’il est validé en l’état, et après un passage devant la Commission mixte paritaire, il pourrait être définitivement adopté d’ici le 15 septembre.

Emmanuel Salbayre