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Fiscalité immobilier

Pourquoi votre taxe d'habitation a grimpé ou n'a pas baissé autant que prévu

Le calcul de la taxe d'habitation est complexe

Le calcul de la taxe d'habitation est complexe - AFP

Exemples réels à l'appui, voici les explications pour comprendre le montant de taxe d'habitation que vous devez payer en 2018.

Après les premiers envois papiers de la semaine dernière, la plupart des Français ont désormais accès à leur avis de taxe d'habitation. La découverte du montant à payer fut pour certains contribuables une douche froide. Car nombre d'entre eux, estimant faire partie des 80% des foyers les moins aisés, anticipait une baisse de la note de 30%.

Pour rappel, le gouvernement a mis en place une suppression progressive de la taxe d'habitation de la résidence principale pour 80% des foyers. En 2018, un dégrèvement de 30% s'applique, avant de passer à 65% en 2019 et une suppression totale en 2020. Les 20% de foyers restant verront à leur tour leur taxe d'habitation sur leur résidence principale supprimée, au plus tard en 2021.

Mais alors, pourquoi certains contribuables ont constaté une baisse plus faible que 30% voire une augmentation de la facture? Nous avons pris trois cas réels de contribuables pour vous expliquer comment la réduction fonctionne et qui elle concerne. On notera qu'il existe également des cas où la baisse de la taxe d'habitation peut-être plus importante que 30%, par exemple si le taux communal ou intercommunal a baissé en 2018.

Exemple n°1 : -13% pour un contribuable à Montfrin dans le Gard

Ce contribuable habite à Montfrin, une commune d'environ 3.000 habitants dans le Gard, à une dizaine de kilomètres de Nîmes. Son revenu fiscal de référence est suffisamment bas pour bénéficier de la réforme et ce contribuable dispose du même nombre de parts fiscales (1,5) que l'année précédente.

Pourtant, sa taxe d'habitation passe de 234 euros en 2017 à 203 euros en 2018, soit une baisse de seulement 13,3%.

Comment expliquer cette différence par rapport aux 30% promis ? En réalité, le gouvernement s'est engagé sur un dégrèvement de 30% par rapport à ce qu'auraient dû payer les Français mais à taux constants. Il ne s'est pas engagé sur une baisse de la note de 30%. La nuance est de taille !

Il convient donc de rappeler que la taxe d'habitation est calculée à partir d'une valeur locative brute définie par le fisc. S'applique ensuite sur cette valeur locative plusieurs taux différents : le taux décidé par la commune, celui de l'intercommunalité, le taux pour la taxe spéciale d'équipement et celui pour la taxe Gemapi (taxe inondations). Dans un deuxième temps, il existe des abattements obligatoires (par exemple quand vous avez un enfant à charge, vous bénéficiez d'une ristourne) et des abattements facultatifs décidés à l'échelon local.

Dans son cas, plusieurs éléments expliquent l'addition finale. En premier lieu, les valeurs locatives pour son logement, comme pour tout le monde en France, ont progressé mécaniquement de 1,2%. Cette hausse reflète l'inflation. Si notre contribuable avait fait des travaux important, la revalorisation de la valeur locative pour son logement, qui est alors spécifique à l'amélioration ou l'agrandissement d'un logement, aurait été plus importante. Mais ce n'est pas le cas ici.

Deuxièmement, le taux appliqué pour la taxe spéciale d'équipement a légèrement progressé, passant de 0,143% à 0,144%. Troisièmement, une nouvelle taxe Gemapi a fait son apparition cette année. Cette taxe additionnelle, qui est facultative rappelons-le, sert à financer la gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, une compétence prise en charge depuis cette année par les intercommunalités. Pour notre contribuable, c'est une nouvelle colonne qui apparaît avec un taux de 0,145% qui s'applique à la valeur locative.

In fine, sans la réforme de la taxe d'habitation, ce contribuable aurait dû verser 288 euros à taux constants. Le dégrèvement de 30% s'y applique. Reste un peu plus d'un euro de différence qui correspond à l'augmentation du taux (ici la taxe spéciale d'équipement) qui n'est pas compensée dans la réforme.

Exemple n°2 : +1,58% pour un contribuable à Beaumont Puy-de-Dôme

Notre deuxième contribuable vit à Beaumont, une ville de 12.000 habitants dans le Puy-de-Dôme. Ici ses revenus excèdent les plafonds pour bénéficier du dégrèvement. Pour rappel, les contribuables qui bénéficient de la réforme ne doivent pas avoir un revenu fiscal de référence dépassant :
- Pour 1 part : 27 000 €
- Pour 1,5 part : 35 000 €
- Pour 2 parts : 43 000 €
- Pour 2,5 parts : 49 000 €
- Pour 3 parts : 55 000 €
- Pour 3,5 parts : 61 000 €
- Pour 4 parts : 67 000 €
- Pour 4,5 parts : 73 000 €
- Pour 5 parts : 79 000 €

Afin d'éviter les effets de seuil, il existe un dégrèvement progressif pour les revenus juste au-dessus de ce barème, comme expliqué ici.

Notre contribuable paie donc à 100% sa taxe d'habitation. Mais pourquoi celle-ci augmente? Là encore, l'évolution mécanique de la valeur locative de son logement (+1,2%) alourdit la note. Ensuite, si les taux appliqués par sa commune et son intercommunalité n'ont pas changé, celui de la taxe spéciale d'équipement passe de 0,109% à 0,123%. En revanche ici, aucune taxe Gemapi n'est appliquée.

En conséquence, le montant de sa taxe d'habitation passe de 950 à 965 euros, soit une progression de 1,58%.

Exemple n°3 : +62% pour une contribuable à Bordeaux

Cette contribuable, interrogée par le correspondant de BFMTV à Bordeaux, vit des minima sociaux avec environ 500 € par mois. Elle est donc concernée par le dégrèvement de 30%. En 2017, elle n'avait payé que 37 euros de taxe d’habitation. Sur son avis 2018, elle est passée à 60 euros, soit 62% de hausse.

Comment cela est-il possible alors que les taux communal et intercommunal sont restés inchangés ? En fait, le conseil municipal de Bordeaux a voté en faveur d'une modification de l'abattement général. Ce dernier passe de 19% à 15%. Votée en 2017, cette mesure n'est effective que depuis cette année. A l'époque de cette décision, la municipalité avait calculé que les habitants concernés allaient payer jusqu'à 48 euros de plus par an, comme le soulignait France Bleu.

Jean Louis Dell'Oro