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A San Francisco, les habitants appelés à se prononcer sur "l'initiative Airbnb"

Les habitants de San Francisco appelés à voter sur "l'initiative Airbnb"

Les habitants de San Francisco appelés à voter sur "l'initiative Airbnb" - Pixabay

Les habitants de la ville californienne doivent voter sur l'opportunité de limiter les locations de courte durée, de type Airbnb, dans la ville. Un scrutin symbolique à San Francisco, où les prix ont flambé ces dernières années, pour beaucoup à cause du boom du secteur technologique.

Vote sous tension dans la ville qui a vu naître Airbnb. San Francisco est invité ce mardi 3 novembre à se prononcer pour ou contre la "proposition F", surnommée "initiative Airbnb" du fait de la notoriété du site, et dont l'objectif est de durcir davantage la réglementation de la location saisonnière. La mesure centrale de cette proposition entend plafonner à 75 jours par an et par logement les locations de courte durée.

Un régime plus strict que les règles actuelles, qui prévoient une limite de 90 jours si l'occupant habituel du logement le laisse entièrement à disposition des visiteurs, mais ne fixent aucune limite s'il reste présent, en louant juste sa chambre d'amis par exemple.

Pour comprendre la colère des habitants, il suffit de se plonger au coeur du marché immobilier, où les prix ont grimpé de 60% en 5 ans. Au point qu'il est difficile de trouver, dans cette ville très prisée par les touristes, un deux pièces à moins de 4.000 dollars par mois. A l'achat, il faut compter plus de 1 million de dollars.

"Au moment où San Francisco fait face à une grave crise des logements abordables, un nombre croissant d'appartements existants sont proposés illégalement (...) en location de courte durée sur des sites internet comme Airbnb ou VRBO", souligne le préambule de la proposition.

"L'objectif de ces limites est d'interdire la conversion pour un usage touristique de logements à louer à usage résidentiel, et d'aider à préserver la disponibilité de logements à San Francisco", précisent encore les documents explicatifs mis à disposition des électeurs.

Une crise du logement qui "empire"

Une proposition soutenue par un large éventail d'associations de locataires, de propriétaires ou de quartier, ainsi que par le syndicat des travailleurs des secteurs de l'hôtellerie et de la restauration. Et surtout par la coalition "Share Better SF", qui milite de longue date contre ces plateformes de location touristiques - Airbnb en tête.

Le collectif avance ainsi qu'environ 10.000 locations de court terme sont actuellement proposées dans la ville, dont 70% pour des appartements entiers. Ce qui "empire notre crise du logement" en ville, en remplaçant des logements abordables dont les occupants sont expulsés et en contribuant à l'envol des loyers. Il faut dire que la flambée du marché immobilier est notable depuis plusieurs années dans toute la Silicon Valley.

A San Francisco en particulier, de nombreux quartiers autrefois très populaires subissent une gentrification accélérée par l'arrivée massive de salariés du secteur technologique à pouvoir d'achat élevé.

8 millions de dollars pour soutenir le "non"

Chez Airbnb, on se défend de participer à la gentrification, bien au contraire. "Le partage de logement permet à des milliers de familles de la classe moyenne de joindre les deux bouts et de rester dans la ville", rétorque Christopher Nulty, porte-parole du groupe. Il dénonce "une mesure soutenue par les hôtels, qui créent de manière fausse un lien entre des habitants normaux de San Francisco qui partagent leur maison et une crise du logement qui dure depuis des décennies".

La plateforme en ligne, déterminée à ne rien lâcher, a été le principal contributeur de la campagne pour le "non" à cette mesure. Et elle a mis le paquet, en payant plus de 8 millions de dollars, contre moins de 800.000 dollars pour les partisans du "oui", selon des statistiques de la San Francisco Ethics Commission.

Plus généralement, les partisans du non estiment surtout que certaines mesures menacent vie privée, comme l'obligation de faire des rapports tous les trois mois sur les visiteurs des appartements, ou la possibilité de lancer des poursuites élargie à n'importe qui vivant dans un rayon d'une trentaine de mètres.

Des risques d'espionnage mutuel

"Que feriez-vous si le gouvernement vous obligeait à rapporter quand vous dormez dans votre propre maison... et même dans votre propre lit?", interroge notamment un spot télévisé. "La proposition F va encourager les voisins à s'espionner les uns les autres, et même encourager les plaintes", prévient un autre.

L'argument touchera-t-il les habitants de SF? Réponse mercredi, date à laquelle les résultats du scrutin devraient être connus. Un vote néanmoins relativement symbolique pour Airbnb, qui a certes son siège à San Francisco, mais est actif dans plus de 34.000 villes dans le monde.

Reste que la proposition prévoit tout de même des amendes pour les sites publiant des annonces illégales, à hauteur de 250 à 1.000 dollars par jour. Et surtout, l'idée de procéder à la consultation du peuple pourrait germer dans d'autres métropoles mondiales, également confrontées au phénomène Airbnb...

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Avec AFP

Léo Monégier