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Le coronavirus fait chuter le marché de la location touristique en Italie

Vue de Rome pendant le confinement

Vue de Rome pendant le confinement - Filippo Monteforte - AFP

A Rome, la quasi totalité des réservations saisonnières pour cet été ont été annulées. Un coup dur pour les hôteliers et les propriétaires qui arrondissaient leurs fin de mois grâce aux plateformes de location touristique.

Le secteur du tourisme en Italie qui emploie 4,2 millions de personnes et génère 13% du PIB de la troisième économie d'Europe, se demande comment redémarrer alors qu'il lui faudra "cohabiter" avec le coronavirus. Pâques marque habituellement le début de la saison dans la péninsule, avec le retour des voyageurs étrangers, touristes et pèlerins. Mais dès l'éclatement de l'épidémie de coronavirus fin février en Italie, premier pays atteint en Europe, le tourisme étranger s'est effondré, avant même le confinement du pays à partir du 10 mars.

L'organisation professionnelle du secteur, Confturismo, avait initialement calculé "une chute de 45 millions des présences (nuitées) sur le premier trimestre, soit un manque à gagner de 22 milliards d'euros. Néanmoins avec le confinement prolongé, on peut tabler sur le double, soit 90 millions de présences en moins, et uniquement du début de l'année jusqu'à la fin mai", explique à l'AFP Alberto Corti, directeur en charge du tourisme de Confcommercio/Confturismo.

Les loueurs sur Airbnb en grande difficulté

La location saisonnière est particulièrement touchée. Pour Chiara Ippoliti, agent immobilier chez Link à Rome, la saison touristique est très compromise: "On enregistre une diminution de 80 à 90% du chiffre d'affaires depuis le début de l'année, et, pour le moment, toutes les réservations d'été sont annulées".

La multitude d'appartements proposés sur Airbnb dans les quartiers prisés de Monti, Trastevere ou du Vatican sont en majorité gérés par de petits entrepreneurs qui les ont pris en location. "Sans aucune entrée, ils ne pourront pas payer leur loyer aux propriétaires et vont soit leur restituer les biens, soit chercher des locations longue durée non touristique", explique cette spécialiste. Les propriétaires sans autre moyen de subsistance risquent de devoir vendre sur un marché déprimé qui commençait à peine à remonter la pente.

Vers un tourisme moins massif

Chiara Ippoliti met en garde contre le risque de voir débarquer des "chacals", en évoquant la réponse devenue virale d'un agent immobilier italien à un investisseur australien qui proposait de racheter une villa en Toscane à 55% de sa valeur. "Il est sans le moindre courage, le chien qui aboie sur le cadavre d'un lion", lui a répondu l'agent.

Le Premier ministre italien a averti qu'il faudrait "cohabiter" longuement avec le virus. Il faudra donc maintenir les distances de sécurité, éviter les regroupements et foules. Ce sera très compliqué pour les petits cafés et restaurants des ruelles exiguës des centres historiques italiens. Comment feront les hôtels pour garantir une distance d'un mètre dans leur salle de restaurants, de sports ou leur centre thermal? Pour la secrétaire au Tourisme Bonaccorsi, "ce pourrait être l'occasion d'aller vers un tourisme moins de masse, plus respectueux de l'environnement. On ne verra plus les longues files devant le Colisée. Tout sera plus réglementé. On devait de toutes façons déjà affronter le problème de l'overtourisme dans des villes comme Rome ou Venise".

Maison isolée en pleine campagne

Alberto Corti pense aussi aux établissements balnéaires de Rimini et l'Adriatique ou aux campings du Lac de Garde, très fréquentés par les Européens du Nord: "Même si le standing est élevé désormais, ce sera difficile de rouvrir des structures comportant une piscine ou des douches en commun où les coûts de gestion et d'assainissement vont grimper". Le monde des transports sera également bouleversé. "Vous auriez le courage de monter dans un wagon de Freccia Rossa (train à grande vitesse) rempli de 80 voyageurs ou un avion low cost avec 270 passagers?", s'interroge Alberto Corti.

Le segment de niche de la maison isolée en pleine campagne avec piscine privée pourrait devenir "tendance". Mais l'agent immobilier Chiara Ippoliti met en garde contre un possible retour à un tourisme d'élite de style années 50: "Le low cost n'a pas provoqué une massification mais a démocratisé le tourisme: tout le monde peut découvrir la beauté d'un pays étranger."

Avec AFP

D. L.