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Quand les riches New-Yorkais font flamber les prix immobiliers à Woodstock

La ville de Woodstock, située à 172 kilomètres au nord de New York

La ville de Woodstock, située à 172 kilomètres au nord de New York - Google Street View

Cinquante ans après le festival éponyme, la ville de Woodstock est toujours un symbole de la culture hippie contestataire. Une réputation qui a attiré de nombreux ménages riches en provenance de New-York.

La ville de Woodstock, située à 172 kilomètres au nord de New York, n'a en réalité pas accueilli le festival éponyme. Mais il n'était pas inhabituel d'y rencontrer des célébrités du rang de Jimi Hendrix, selon Richard Heppner. Et le sexagénaire, historien de la ville, d'affirmer que l'âme artistique de sa bourgade natale ne date pas de 1969.

Certes les organisateurs du festival de Woodstock - dont le cinquantième anniversaire a été célébré jeudi dernier - aspiraient à organiser ces trois jours de paix, d'amour et de musique ici, dans cette commune de l'Etat de New York, un havre de créativité pour des artistes tels que Bob Dylan. Toutefois, ils ont finalement choisi un autre lieu -forcé pour des questions d'espace et de permis- situé à une centaine de km au Sud-Ouest mais ont réussi à conserver le nom originel de leur festival, Woodstock.

Trompés par ce coup du destin, les touristes affluent depuis un demi-siècle dans cette ville aujourd'hui peuplée d'environ 6.000 personnes. Ce pèlerinage manqué fait sourire Richard Heppner. "Le nom continue à assurer la magie", glisse-t-il, installé dans les locaux de la "Société historique de Woodstock".

Un point de ralliement pour de nombreux artistes

Pour ce résident de 67 ans et d'autres habitants de Woodstock, cette ville mérite sa réputation de commune artistique et anti-autoritaire, qui ne date pas de son mariage raté avec le festival. Après avoir partagé leurs rêves dans des lettres d'amour, l'artiste américaine Jane Byrd McCall Whitehead et son époux en devenir, l'Anglais Ralph Radcliffe Whitehead, ont ouvert la résidence d'artistes de Byrdcliffe en 1903, dans les montagnes surplombant Woodstock. Le lieu existe toujours.

"C'est une ville qui fut créée par ce genre d'esprit artistique", avance Derin Tanyol, directrice des expositions et des programmes à la Woodstock Byrdcliffe Guild. Cet endroit "a réellement remporté son titre de résidence d'artiste", dit-elle, devant l'une des maisons principales de Byrdcliffe, où une exposition psychédélique hors les murs intitulé "Psych Out!!!" est organisée.

Alan Baer, un architecte et conservateur d'exposition, a atterri à Woodstock il y a une trentaine d'années avec sa femme artiste, attirés par l'énergie du coin. "Il y a tellement d'histoire ici", se réjouit-il. "On travaille indépendamment de cette histoire mais c'est dans nos gênes; on peut vraiment le ressentir".

A Woodstock, les touristes peuvent aujourd'hui se régaler dans des restaurants chics et respectueux de l'environnement, repartir avec un t-shirt délavé du groupe Grateful Dead, et déambuler en centre-ville, attirer par les produits dérivés hippies proposés par les magasins qui misent sur la marque qu'est devenue le nom Woodstock.

L'arrivée de riches New-Yorkais

Mais la réputation de la ville a surtout attiré de plus en plus de riches New-Yorkais à la recherche d'une nouvelle bouffée d'air, poussant les prix de l'immobilier à la hausse et le nombre de personnes vivant de leur art à la baisse. Même si les prix se sont tassés de 4,3% sur un an, le prix médian d'un bien a grimpé de près de 50% en cinq ans, selon les données du site immobilier Zillow. Le prix médian d'un logement est ainsi passé de 252.000 à 368.000 dollars. Et même sur dix ans, les prix restent en progression de 26%, malgré la chute du marché après la crise.

"C'est une ville qui est vraiment culturellement et économiquement définie par... deux genres très distincts, les artistes affamés et les New-Yorkais aisés qui ont une maison secondaire ici", développe Derin Tanyol. "Les artistes ont besoin des gens riches afin de financer les organisations qui donnent aux artistes des lieux pour accueillir leurs expositions -- et les gens riches ont besoin de l'art", calcule-t-elle.

Mais l'afflux d'argent et de touristes dans une ville, symbole de la culture hippie contestataire, interroge. "Woodstock a-t-elle perdu son sens véritable ? Certains disent oui", résume l'historien Richard Heppner. Mais pas d'inquiétude professe l'architecte Alan Baer: Woodstock est un endroit chargé d'histoire, un "lieu magique" qui ne disparaîtra pas.

(Avec AFP, édité par Jean-Louis Dell'Oro)

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