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Le Cap Ferret va-t-il disparaître?

Vue du Cap Ferret

Vue du Cap Ferret - Nicolas Tucat - AFP

La presqu'île est grignotée par l'érosion. À "la Pointe" du Cap Ferret, celle-ci est de 4 à 5 mètres par an.

La presqu'île du Cap Ferret, cette flèche sableuse fermant le bassin d'Arcachon où Guillaume Canet a filmé ses "Petits mouchoirs", est inexorablement grignotée par l'érosion, condamnant ses habitants à se défendre sans relâche, avant peut-être de se replier devant l'océan. Guillaume Canet et Marion Cotillard mais aussi d'autres habitués comme Pascal Obispo, Calogero ou Philippe Starck pourraient bien se retrouver un jour les pieds dans l'eau.

Selon l'Observatoire de la côte aquitaine, l'érosion à "la Pointe" du Cap Ferret est de 4 à 5 m par an en moyenne. Ce secteur et surtout celui -adjacent- des "44 hectares" forment une sorte de bout du monde où dunes, forêt de pins et chemins de terre servent d'écrin à de splendides villas, avec vue sur la dune du Pyla pour les chanceux en "première ligne".

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Rechargements de sable massifs

"L'érosion, c'est l'enjeu majeur des années à venir", assure Philippe de Gonneville, premier adjoint au maire. La commune vient de décider sa stratégie de gestion du trait de côte, indispensable pour toucher des fonds publics et financer les différentes méthodes de défense. Car l'évolution du "Cap" répond à des phénomènes différents côté océan (vents/houle) et côté bassin (marées/courants).

Si la municipalité mise sur des rechargements de sable massifs côté océan (plus de 150.000 m3 d'ici 2020), à la Pointe et dans les 44 hectares, des riverains financent seuls des ouvrages en dur, avec l'autorisation de l'État. Parmi eux, tout au bout et donc le plus exposé, l'homme d'affaires Benoît Bartherotte remblaie inlassablement sa propriété en déversant des tonnes de roche. De l'avis général, sa digue a contribué à ralentir l'érosion. Comme celle érigée par le célèbre restaurant "chez Hortense".

Avec ces ouvrages, "on a sauvé plus de 100 villas des riches des 44 hectares. Des riches qui, entre parenthèses, vous réclameront toujours de l'argent (pour les services publics) mais qui ne nous ont jamais donné un franc pour les défenses!", lançait Benoit Bartherotte lors d'un récent débat public sur le sujet. Mais l'État souhaite que ces riverains harmonisent leurs pratiques de défense. Certaines digues ont en effet été construites "hors des règles de l'art" selon un rapport qui a conduit le préfet à prendre la décision drastique d'interdire, côté bassin, le sentier piéton le long des "44" et de la Pointe.

"On ne construira pas le mur de l'Atlantique!"

Mais la lutte par ré-ensablement, à l'efficacité incertaine, ou par enrochement, au coût certain, est-elle suffisante, surtout face à la montée du niveau des océans due au réchauffement climatique ? Non, tranche la députée locale Sophie Panonacle. "On ne construira pas le mur de l'Atlantique!". Elle a dévoilé lors du débat un rapport devant alimenter une proposition de loi qui permettrait juridiquement une "relocalisation" non contrainte des propriétaires dont les biens sont menacés par l'érosion côtière partout en France.

Un fonds, abondé par un prélèvement sur les droits de mutation, financerait des "acquisitions amiables". Le prix d'achat d'une maison menacée serait basé sur sa valeur locative et sa durée de vie restante. Moins profitable qu'une indemnisation à la valeur immobilière. "Personne ne sera mis dehors. Mais le jour où vous aurez les pieds dans l'eau, ce sera trop tard", prévient Sophie Panonacle, concédant que "les propriétaires dans les 44 hectares ne vont pas être ravis", leurs maisons valant des millions d'euros.

L'idée n'enchante guère Philippe de Gonneville: "La relocalisation nous pose un problème moral car en tant qu'élus, nous sommes là pour défendre notre territoire et nos habitants. L'envisager, pour le moment ça n'est pas possible". De la Pointe, Benoît Bartherotte voit, comme souvent, les choses à sa façon: "J'ai toujours payé moi-même mes défenses sans jamais rien demander aux pouvoirs publics. Alors si j'estime que je n'arrive pas à me battre (contre l'érosion), je n'ai qu'à partir et je n'ai pas besoin d'indemnités!".

Avec AFP

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