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Fiscalité immobilier

Le climat social et fiscal en France va-t-il peser sur le marché de l'immobilier de luxe?

Le mouvement des gilets jaunes ne joue pas encore sur l'immobilier de luxe

Le mouvement des gilets jaunes ne joue pas encore sur l'immobilier de luxe - Philippe Lopez - AFP

L'année 2018 a été "exceptionnelle" pour l'immobilier de luxe, selon Laurent Demeure, PDG de Coldwell Banker, spécialiste du secteur. Mais le climat social et surtout la cacophonie du gouvernement sur la fiscalité de l'immobilier pourraient peser sur le marché en 2019.

L'année 2017 avait déjà été exceptionnelle pour le marché de l'immobilier de luxe. L'année 2018 a battu tous les records. "Après un début d'année poussif, le marché a connu une forte reprise", explique Laurent Demeure, patron de Coldwell Banker, un réseau d'agences spécialiste du secteur du luxe, à l'occasion de la présentation de son bilan annuel. Le volume des ventes du groupe a ainsi atteint 754 millions d'euros sur l'ensemble de la France, contre près de 570 millions en 2017. Soit une progression de plus de 32% sur un an. La propriété moyenne au sein du réseau a été mise en vente à 1,279 million d'euros, un prix en hausse de 8,9% en douze mois.

Le grand retour des non-résidents a été l'un des éléments marquants de l'année écoulée. "Ce sont notamment des Français partis vivre aux États-Unis, en Belgique, au Luxembourg ou en Suisse après l'élection de François Hollande, lors de l'exil des forces vives", note Laurent Demeure. Ils reviendraient notamment, selon lui, grâce à la transformation de l'ISF en impôt sur la fortune immobilière (IFI).

Ce sont également les "clients du Moyen-Orient qui veulent diversifier leurs risques par rapport à Londres, à la suite du Brexit", précise Coldwell Banker. Aujourd'hui, Paris semble la seule capitale qui pourra récupérer le monde de la finance. Mais pour combien de temps?

"Nous constatons des reports de ventes, mais pas d'annulation"

Le climat social en France commence à inquiéter les professionnels de l'immobilier de luxe. Le mouvement des gilets jaunes n'a, pour l'instant, que peu d'impact. "Nous constatons des reports de ventes, mais pas d'annulation", précise Laurent Demeure. "Les étrangers nous disent qu'ils ont l'habitude de voir la France toujours en grève. Ce mouvement ne modifie pas leur perception du pays. La France reste un investissement sécurisé".

En revanche, d'autres événements commencent à impacter la confiance des étrangers et notamment des banques anglo-saxonnes qui hésitent à bouger leurs équipes sur le sol français. Coldwell Banker cite par exemple la cacophonie du gouvernement sur la non-suppression de la taxe d'habitation pour les 20% de Français les plus aisés ou le "grand débat national" qui pourrait aboutir à une taxation plus importante des foyers les plus aisés.

Genève pourrait prendre la place de Paris?

Le PDG de Coldwell Banker cite également, comme sujet d'inquiétude, la réouverture du débat sur la taxation des héritages. Terra Nova propose, en effet, de taxer globalement plus lourdement les successions, y compris sur les sommes transmises par le biais des assurances-vie, tout en abaissant la note pour les petites successions (moins de 150.000 euros par part). La France fait pourtant déjà partie des champions du monde de la taxation des héritages.

Genève pourrait en profiter et accueillir certains banquiers peu désireux de se frotter à l'instabilité fiscale française, "surtout si un accord entre la Suisse et l'Union européenne est signé". La Confédération helvète et l'UE sont actuellement en pleine négociation d'un accord-cadre, qui doit permettre de simplifier les relations entre les deux parties et de les sécuriser au niveau juridique.

Au sein de l'Hexagone, la concurrence se fait également sentir. Désormais, des villes comme Bordeaux (qui a connu une flambée des prix de 20% en deux ans) et Lyon attirent de plus en plus les investisseurs. Et en 2019, Toulouse devrait également "se mêler à la compétition", pronostique Coldwell Banker.

Diane Lacaze