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Deux étudiantes espionnées chez elles... pour imaginer l'appartement du futur

Des chercheurs étudient le comportement de deux étudiantes chez elles.

Des chercheurs étudient le comportement de deux étudiantes chez elles. - StockSnap - Pixabay

Une expérience scientifique a été lancée pour mieux comprendre les usages connectés. Deux étudiantes ont accepté de vivre avec des dizaines de capteurs et détecteurs chez elles.

Du sol au plafond, des dizaines de capteurs et détecteurs ne perdent pas une miette des habitudes de deux étudiantes montpelliéraines, qui vivent dans un appartement chamboulé pour une expérience scientifique destinée à comprendre les usages des objets connectés. Depuis un mois, ces deux étudiantes sont scrutées par des dizaines de capteurs dissimulés sous le sol. Des détecteurs enregistrent le moindre mouvement sur les portes et les tiroirs, et les murs sont parsemés de boîtiers qui relèvent température, pollution, radiations et consommations diverses.

Rien n'échappe à l'oeil des machines : tout dans cet appartement est connecté. Le but ? "Rendre compte de ce qui est possible, souhaitable, acceptable" d'envisager dans le futur en matière de nouvelles technologies dans les logements, résume Malo Depincé, membre du directoire du projet Human at Home (HUT) et maître de conférence à l'université de Montpellier.

Des puces dans le frigo

Dans la cuisine, des puces équipent placards et frigo : elles identifient les denrées, ceux qui les déplacent, et permettent de deviner les habitudes alimentaires. À terme, elles pourraient être utiles pour faire des préconisations de santé, imaginent les chercheurs. Au sol, des capteurs mesurent la masse, ce qui peut permettre de détecter un corps anormalement immobile et donner l'alerte, mais aussi, en identifiant les personnes présentes par leur poids, de dessiner la vie sociale des habitants ou identifier une intrusion. "Parce qu'il est utile de s'interroger sur les conséquences des nouvelles technologies, le projet HUT se concentre d'abord sur les usages et sur les conditions du bien-être dans le logement de demain", poursuit Malo Depincé. L'équipe envisage, à l'issue de l'expérience, d'émettre des recommandations auprès des pouvoirs publics.

Après la phase de récolte des données, stockées dans un centre sécurisé, viendra le temps de l'analyse courant 2019, par des logiciels et algorithmes développés au sein de l'université de Montpellier. D'ici là, les deux étudiantes ont la consigne de vivre "le plus normalement possible", explique Malo Depincé. Pour ne pas entraver l'expérience, les interactions avec elles sont limitées au maximum. Toutes les quatre à six semaines, deux chercheurs recueilleront leur ressenti par le biais de tests et de questionnaires.

Manque de connaissance des usages

"En France, nous avons un manque de connaissance des usages. Or, si l'on produit de nouveaux objets, nous devons d'abord savoir comment ils sont utilisés, et identifier les problèmes qu'ils posent", explique le professeur Jean-Gabriel Ganascia, membre du comité éthique du projet HUT et président du comité d'éthique du CNRS, chargé de la vigilance sur l'utilisation des données. Spécialistes du langage, du mouvement, du commerce, de la culture, mais aussi architectes, juristes, historiens, psychologues et anthropologues : le projet, né à l'initiative du directeur de l'Institut d'électronique et des systèmes Alain Foucaran, réunit 12 laboratoires.

Des linguistes s'intéressent notamment à la façon dont les machines pourraient s'adresser aux habitants. "Si l'occupant ouvre sa fenêtre tous les matins, alors que c'est l'heure du pic de pollution, comment lui conseiller de fermer, tout en lui laissant le choix ?", s'interroge Laurent Rousseau, président de l'entreprise Oceasoft, qui conçoit une partie des capteurs. Des paniers connectés pourraient également donner l'alerte en cas de rupture de la chaîne du froid.

Des chercheurs en marketing veulent, eux, travailler autour des offres commerciales. Des offres publicitaires seront diffusées dans l'appartement début 2019, "émanant d'abord des collectivités territoriales notamment sur les transports en commun ou la culture. Le but est de relier la smartcity au logement", précise Malo Depincé. Soutenu financièrement par la métropole de Montpellier et le conseil régional, le projet est financé pour une durée de trois ans, à raison de deux locataires par an, mais l'équipe espère l'élargir, à un immeuble voire tout un quartier.

(Avec AFP)

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