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La piscine publique de Bruay-la-Buissière, un joyau d'Art déco

Dans l'ex-bassin minier, une piscine publique joyau de l'art déco

Dans l'ex-bassin minier, une piscine publique joyau de l'art déco - Denis Charlet - AFP

Cette piscine a été inaugurée en 1936. Elle est inscrite depuis 1997 à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques.

Style monumental, structures en béton armé, surfaces planes, lignes droites épurées et symétriques: la piscine publique de Bruay-la-Buissière (Pas-de-Calais), joyau de l'Art déco au cœur de l'ex-bassin minier, est l'une des rares piscines du genre en France encore ouverte à la baignade. "Ville de Bruay, école de natation", peut-on lire sur le fronton de l'entrée triomphante aux deux colonnes cannelées de cette piscine inspirée des paquebots transatlantiques d'avant-guerre.

Avec ses deux candélabres sur l'avant, la piscine "Roger Salengro", conçue pour les mineurs par l'architecte local Paul Hanote dans une approche "fonctionnaliste" et "hygiéniste", a été inaugurée en 1936 sous le Front populaire, en plein avènement du sport, des loisirs et des congés payés. Elle fait partie d'un ensemble, "le stade-parc", avec parc et stade d'athlétisme. "C'est un cadre exceptionnel, un peu de vacances dans une ville minière... ça contraste !", sourit Marie-Christine, une habituée de cette piscine majestueuse ouverte de mai à septembre.

Un lieu où les mineurs peuvent se détendre

À sa construction, elle traduisait la volonté de la municipalité socialiste d'alors de "construire un espace dédié aux loisirs", dans lequel les mineurs pouvaient "venir se détendre" lors de leur "temps libre" et "apprendre à nager", relate Cindy Malassingne, guide à l'office de tourisme de Béthune-Bruay.

Inscrite depuis 1997 à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, cette piscine, dont l'entrée coûte au maximum 3,40 euros, a vocation depuis son origine à accueillir un public "le plus large possible". Installée au milieu des corons, elle a en effet été créée avec une "dimension sociale", sous "l'impulsion" de Léo Lagrange et "en réaction au sport élitiste avec la naissance du sport de masse", relate Christine Bongart, chargée de la protection des monuments historiques à la Direction régionale des affaires culturelles des Hauts-de-France. Souvent, "il a été reproché à l'art déco d'être fait pour le grand bourgeois, mais il a pratiquement été conçu pour Monsieur Tout-le-monde, le Français des couches populaires", affirme Emmanuel Bréon, conservateur et expert du mouvement artistique.

Pour cette piscine de style "paquebot", courant "tardif" de l'art-déco, l'architecte s'est inspiré des grands navires: "les 246 cabines autour du bassin font penser à celles des grands transatlantiques, les oculus aux hublots, la chaufferie cubique aux grandes cheminées, les solariums aux bastingages", note Cindy Malassingne. "Le style paquebot, c'est permettre sur des petites surfaces de faire du grand", résume Emmanuel Bréon.

33 mètres de long

Avec ses deux bassins symétriques de 33 m de long, sa pataugeoire en demi-cercle, ses plongeoirs, ses gradins et ses solariums, la piscine, d'une capacité d'accueil d'environ 700 personnes, s'inscrit aussi dans le "courant hygiéniste", avec une "nouveauté", les "pédiluves": "les utilisateurs ont l'obligation d'y passer pour éviter la propagation des maladies", indique Cindy Malassingne.

Gérée par la Communauté d'agglomération de Béthune-Bruay, la piscine Roger Salengro, du nom du ministre de l'Intérieur du gouvernement de Léon Blum, "est tout à fait dans l'esprit Front Populaire" et cette idée de "vouloir développer la culture pour tous", de "permettre à chacun d'avoir une hygiène de vie" et de "se détendre", explique Emmanuel Bréon. Elle répond ainsi aux préoccupations de l'époque: les "loisirs" et la "santé publique", ajoute-t-il, vantant un "très bel exemple" de l'architecture des années 30.

Lors de la Première Guerre mondiale, la région des Hauts-de-France a été dévastée et "les reconstructions se sont alors faites dans ce nouveau style que les Français ont créé et qui va faire fureur dans le monde entier", explique Emmanuel Bréon. Après-guerre, "on a envie de modernité, d'aération, d'épiderme blanc, pas de surcharge... l'art déco va naître".

Avec AFP

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