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Son propriétaire manquant de moyens, ce petit château risque d'être rasé

Le "Petit Château de Navarre" est menacé de destruction.

Le "Petit Château de Navarre" est menacé de destruction. - BFMTV

Ce bâtiment du XIXème siècle, dans un état très dégradé, était en sursis depuis un an. La Commission régionale du patrimoine et d’architecture de Normandie a finalement décidé de ne pas le classer monument historique.

Le "Petit Château de Navarre", une grande bâtisse bourgeoise du XIXème siècle construite à Évreux, risque de vivre ses derniers instants. Sa dernière propriétaire, Marthe Réveilhac, l'avait cédé à la communauté Sainte-Marie-de-Torfou en 1938 qui en a fait un institut catholique. Mais l'Iton, un affluent de l'Eure, coule à proximité et fragilise peu à peu le bâtiment. Le château s'affaisse, les fondations ne sont pas assez solides. Après des inondations en 2004, l'Institut de l'Immaculée d'Évreux décide de condamner le bâtiment et de déménager ses locaux.

Seulement, l'Immaculée ne peut pas le laisser en l'état. Au micro de BFMTV, Isabelle Collin, présidente de l'organisme de gestion de l'Immaculée, explique que le château représente un danger pour les élèves et le personnel de l'école, mais également pour les habitants du quartier. Si le bâtiment tombe dans l'Iton, il risque d'inonder le quartier de Navarre.

Un petit sursis

L'Institut réfléchit donc, en 2016, à le démolir. À cette époque, Laurent Loubière, le directeur de l'Immaculée, expliquait au site Paris-Normandie.fr : "notre rôle est d'entretenir l'outil pédagogique et d'offrir les meilleures conditions d'enseignement aux élèves. Nous ne sommes pas là pour faire de l'immobilier". En clair, l'école et notamment l'Organisme de gestion de l'enseignement catholique qui possède les murs, ne compte pas mettre sur la table les millions d'euros nécessaires à la rénovation. D'après ses estimations, il aurait fallu 2 millions d'euros simplement pour empêcher l'enfoncement de la bâtisse. Raser la demeure est donc la meilleure solution. Le terrain pourrait alors servir à faire un parking, selon le site actu.fr reprenant une information de La Dépêche d'Evreux

En 2017, le château gagne un petit sursis. La ministre de la Culture, Françoise Nyssen, prend une instance de classement au titre des monuments historiques. Cela signifie que le château bénéficie pendant un an du statut de monument historique. Son propriétaire ne pouvait donc pas le détruire et devait entreprendre des travaux en cas de péril.

Mais la semaine dernière, le couperet est tombé. La Commission régionale du patrimoine et d'architecture de Normandie a refusé de classer définitivement cette demeure. L'Institut peut donc, à nouveau, décider pleinement de son avenir.

"Génocide du patrimoine du XIXème siècle"

Alexandra Sobczak-Romanski, présidente et fondatrice d'Urgence Patrimoine, s'est immédiatement mobilisée. Elle a relancé sa pétition qui datait de l'an dernier, "Non à la démolition du Petit Château de Navarre", qui a déjà récolté 6.565 signatures. Elle rappelle qu'il "n'y a aucune urgence à vouloir le détruire, pas d'état de péril imminent et aucun projet immobilier prévu, puisque le terrain est situé en zone inondable et que de ce fait, aucun permis de construire ne sera accordé".

Elle dénonce ce qu'elle appelle une "destruction abusive". Au micro de BFMTV, elle avoue que ce bâtiment n'est certes "pas le château de Versailles, il n'a pas un grand intérêt architectural. Mais il y a un intérêt au niveau de la mémoire". En effet, la ville d'Évreux a payé un lourd tribut pendant la seconde guerre mondiale, subissant des bombardements en 1940 et en 1944. Il est donc primordial, pour la présidente d'Urgence Patrimoine, de sauvegarder le "fleuron du quartier", cet exemple de "l'histoire industrielle de la ville". Mais Alexandra Sobczak-Romanski est consciente du peu de chance de réussite de sa démarche. Non seulement, "une pétition est un bien faible moyen de défense", écrit-elle sur Change.org. Mais elle estime également que le patrimoine du XIXème siècle n'est pas toujours la priorité du ministère de la Culture. Sur BFMTV, elle évoque même un "génocide du patrimoine du XIXème siècle. C'est un patrimoine méprisé".

Pour autant, tout n'est pas forcément perdu. Samedi dernier, lors des Journées du Patrimoine, Ollivier Lepinteur, adjoint au maire d'Évreux spécialisé dans les Finances et les marchés publics, président du conseil d'administration d'Eure Aménagement Développement, a annoncé qu'il allait ouvrir des négociations avec l'institut. S'il n'a pas encore annoncé ce qu'il comptait faire de la bâtisse, peut-être un hôtel, des partenaires se seraient déjà montrés intéressés comme l'’Établissement public foncier de Normandie et le département de l’Eure.

Diane Lacaze